Parlement wallon

Interpellations

     

 Interpellation du 27/06/08

-

 L’avenir de MECAR à Seneffe ...
Interpellation de Philippe Fontaine, Député wallon à Rudy Demotte, Ministre-Président du Gouvernement de la Région wallonne, Jean-Claude Marcourt, Ministre de l'Economie, de l'Emploi, du Commerce extérieur et du Patrimoine et André Antoine, Ministre du Logement, des Transports et du Développement territorial, concernant :
« L’avenir de la fabrique de munitions MECAR de Seneffe »


Monsieur le Ministre-Président,
Messieurs les ministres,
C’est pratiquement chaque année depuis quelques temps que je suis amené à interpeller au sujet de l’entreprise MECAR de Seneffe. Lors de ma dernière interpellation au Ministre Marcourt en novembre 2007, je m’inquiétais de la tournure que prenaient la situation face à la pétition de 3000 signatures du comité anti MECAR. Je m’inquiétais encore bien plus de la décision que prendrait votre collègue de l’environnement par rapport à la demande de permis d’environnement introduite par l’entreprise, un refus voulant dire qu’il n’y aurait plus de tir à Elsenborn, actuel champ de tirs d’essais de la fabrique de munitions ce qui conduirait à mettre l’entreprise dans une situation commerciale et financière délicate, comme le ministre l’avait reconnu lui même.

Le Ministre de l’Economie me précisait alors que le permis était toujours à l’examen et devrait déboucher sur une décision fin d’année et il ajoutait que : « Le Gouvernement a été informé de la situation actuelle et a demandé que les parties concernées se revoient rapidement en vue d'examiner toutes les pistes de solution et de lui faire rapport d'ici la fin du mois. », il s’agissait du mois de novembre 2007.

Le 05 juin 2008, nous apprenions que le Ministre Antoine avait refusé le permis unique introduit par MECAR le 1er juin 2007 pour la construction d’un champ de tir dans le camp militaire d’Elsenborn. Le dossier introduit par MECAR semble pourtant avoir été accepté par la DPA le 24 septembre 2007. Est-il exact que la DPA avait accepté le dossier ? Le permis unique a-t-il bien été délivré ? Pourquoi n’avez-vous pas suivi ?

Les raisons invoquées par le Ministre restent celles liées à l’impact du projet en matière d’environnement, de santé et de nuisances sonores. Pourquoi les nuisances sonores sont-elles une des raisons invoquées alors que les études ont démontré que MECAR respectait les normes en vigueur ? Pourquoi une distinction a-t-elle été faite entre les munitions tirées par MECAR et celles tirées par l’armée elle-même ? Pourquoi MECAR semble-t-elle particulièrement visée alors que les tirs d’essais effectués par l’entreprise ne représente que 4% des tirs qui sont effectués sur le site ?

En effet, quand MECAR a du quitter le site de Marche et s’est vu refuser le site de Doische, un accord a été pris avec la Défense Nationale en 2002. Celle-ci souhaitait mettre ses installations à disposition du civil et a ainsi passé une convention avec MECAR mais aussi avec d’autres sociétés d’armements comme la FN et CMI. La décision qui vient de tomber est-elle la chronique d’une interdiction annoncée pour la FN et CMI ? Eut égard aux arguments avancés pour refuser le permis à MECAR – santé, pollution, bruit – l’armée se verra-t-elle contrainte elle aussi d’arrêter ses tirs sur son propre terrain  ou les tirs extrêmement majoritaire de l’armée n’ont-ils, eux, aucune influence sur l’environnement, la santé des riverains et seraient totalement silencieux ?

- Disposez-vous des résultats des études qui ont été réalisées sur la toxicité des poudres utilisées pour la fabrication des projectiles ? Est-il exact qu’il s’agit essentiellement de cellulose de bois ? Ce produit est-il dangereux pour l’environnement ? En ce qui concerne les risques de pollution des sols, est-il exact que MECAR nettoie les sols après chaque tirs ? Ces nettoyages ont-ils été estimé insuffisants ?

- Par ailleurs, la zone militaire d’Elsenborn est en zone bleue ce qui en interdit toute activité privée or, je viens de le rappeler, l’armée s’est déclarée favorable à cette installation. Il suffirait que la zone passe en zone blanche pour pouvoir y autoriser MECAR. Le refus de permis est-il lié à cet aspect ? Est-il exact que la Défense nationale a demandé à la Région wallonne de remettre la zone militaire d’Elsenborn en zone blanche ? Pourquoi cela n’a-t-il pas été fait ? Y aurait-il possibilité pour MECAR de s’installer dans un autre camp militaire ? Lequel ? Sont-ils tous en zone bleue ? Une exception pourrait-elle être envisagée ? Sous quelle forme ?

Aujourd’hui, interdite de tirs à Elsenborn, MECAR réalise ses essais en Angleterre à un coût élevé et envisage de délocaliser ses activités faute d’avoir pu trouver chez nous une stabilité permettant d’inscrire sereinement l’entreprise dans une perspective de développement économique et technologique. Pourtant, MECAR y a cru quand il a reçu six millions d’euros de la SOGEPA quand l’entreprise s’est retrouvée en difficulté. A quoi aura servi cette aide puisque aujourd’hui, les mêmes poussent l’entreprise à partir ? Est-ce là les méthodes prônées par le plan Marshall pour favoriser le redéploiement économique de la Wallonie ? Ces aides seront-elles récupérées par la Région wallonne si MECAR s’en va ?

Alors que son carnet de commandes est plein pour assurer de l’activité jusque fin 2009, les 500 emplois tout confondu se retrouvent en sursis. Comptez-vous abandonner ces travailleurs en forçant MECAR a délocaliser ? Allez-vous priver la Région du Centre d’une entreprise de plus ?

Il s’agit bien ici d’une responsabilité collective du Gouvernement wallon au delà des compétences ministérielles. Il s’agit bien d’un élan de soutien de la Région du Centre et de la Communauté Urbaine en particulier ainsi que des élus locaux à cette entreprise pour trouver une solution durable afin que la délocalisation soit évitée et que développement social et économique riment avec avenir.

Merci des réponses que vous voudrez bien me donner.




Réponse du Ministre André Antoine, en son nom et celui des autres Ministres,
– Bien évidemment, nous avons tous le souci de favoriser les initiatives privées, la croissance, etc. dans le cadre du Plan Marshall.

Il y a cependant des entreprises qui sont plus difficiles à localiser. Quelle est la commune qui accueillerait à bras ouverts un champ de tirs ? Ce n'est pas évident. Ca n'a d'ailleurs jamais été simple pour MECAR. À l'époque, Michel Foret avait pris exactement la même décision que moi dans un autre site. C'est pour cette raison que MECAR avait dû déménager.

Elle est ainsi venue s'installer à Elsenborn sans le moindre permis. Une convention avec le Ministre Flahaut avait été conclue. Je pense que si l'armée peut se prévaloir de l'absence de permis, il n'en est pas de même pour une entreprise privée.

Je rappelle que contrairement à ce que M. Fontaine vient d'affirmer, ce n'est ni une zone blanche, ni une zone bleue, mais bien une zone forestière reprise dans le périmètre Natura 2000. La situation est donc toute particulière.

L'entreprise a introduit une demande de permis unique. Dans l'évaluation des incidences, nous avons constaté des lacunes concernant les substances utilisées par MECAR à titre expérimental. Je souligne que la Défense tirait avec des munitions connues.

Nous avons également été confrontés au problème de la récupération partielle des résidus d'explosions. La DNF a d'ailleurs émis un avis négatif.

Ensuite, nos amis allemands s'étaient portés à la cause nous menaçant d'un recours car une zone de captage d'eau est située en-dessous de la zone et alimente Aix-la-Chapelle.

Pour ces différentes raisons, nous avons dû refuser le permis. Ce n'est certes pas agréable car 500 personnes sont concernées mais ce n'est pas parce qu'il y a un enjeu économique qu'il faut de facto délivrer le permis. Il est exact que le Ministre Marcourt a consenti 6 millions d'euros à MECAR. Ceci constitue la preuve que nous croyons à son développement.

Cependant, le dossier était mal monté et entaché de lacunes dans le domaine environnemental.
Par ailleurs, les 9 communes germanophones ainsi que le Gouvernement germanophones se sont manifestés.
Différentes questions orales ont également été posées sur le permis avant même que je le refuse. Certaines d'entre elles me mettaient en garde de le délivrer.

Dès demain, je recevrai les représentants de cette entreprise ainsi que les syndicats. Je leur réserverai différentes propositions de terrain qui impliquent certains efforts de la part de cette société.

Je suis prêt pour que cette opération soit une réussite. Je n'en dis pas plus aujourd'hui car autrement les comités de riverains risquent d'être mécontents et la presse relayera trop vite ces informations.

Je vous demande de nous faire confiance car nous nous donnons tous les moyens pour que ce dossier soit une réussite.

Il faut trouver une autre formule à un autre endroit. Ce n'est pas simple ni pour nous ni pour MECAR car notre territoire est petit.

J'ajoute qu'il y a également de l'incompréhension par rapport à ce qu'est et ce que fait MECAR.
Aujourd'hui, la situation n'est pas la même qu'il y a 20 ou 25 ans. Il faut faire l'effort d'informer les citoyens car leur sensibilité est marquée. J'ajoute que la rumeur est beaucoup plus forte que l'information.

Dès demain, je proposerai une opération de communication car j'estime que la communication est importante. Je pense également que toute entreprise doit avoir un budget communcation pour lutter à armes égales avec d'autres.

Vous l'aurez compris, je vais essayer de trouver une solution. Nous en avons dans nos cartons.

M. Philippe Fontaine (MR). – Je remercie M. le Ministre pour sa réponse.
Nous attendrons demain pour voir les solutions que vous proposez, j'espère d'ores et déjà qu'elles tiendront la route.

Notre objectif est essentiellement de sauvegarder l'emploi dans la région du Centre. C'est d'ailleurs mon objectif depuis 2002. Mon intervention auprès de Michel Foret allait également en ce sens.

Je suis conscient qu'il s'agit d'un dossier difficile pour lequel le Gouvernement doit essayer de dégager une solution. Je suis d'avis qu'il ne faut pas laisser partir une entreprise implantée depuis aussi longtemps dans notre région.

Nous attendons vos solutions mais le problème risque d'être le même partout. Concernant Elsenborn, je n'accepte pas que l'on dise que MECAR est responsable de tout.

J'ai également parlé d'autres entreprises concernées mais qui ne sont pas dans ma région. Elles aussi, elles ont besoin d'utiliser le site d'Elsenborn. Allez-vous dégager pour ces entreprises-là des solutions ? Je pense qu'il est important de ne pas les oublier.

J'espère réellement que les solutions que vous porterez demain tiennent la route car les travailleurs de MECAR sont fort énervés. Cela fait des années qu'ils essaient de trouver une solution. Il est normal qu'ils soient inquiets.