Parlement wallon

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 Interpellation du 22/03/07

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 Les mesures prises par le Ministre suite...
Interpellation de Philippe Fontaine, Député wallon, à André Antoine, Ministre du Logement, des Transports et du Développement territorial, concernant :
« Les mesures prises par le Ministre suite aux grèves sauvages des TEC »


Monsieur le Ministre,
Sans doute allez-vous penser que je commence à me répéter. Je vous rassure de suite, je ne recommence pas la même question que celle que je vous ai posée en question d’actualité lors des travaux précédents de notre assemblée.

Une nouvelle grève sauvage s’est en effet produite récemment à Namur, le dépôt d’Onoz est parti en grève pour protester contre le nouveau plan de congés annuels.

Monsieur le Ministre, vous allez de déclarations musclées en déclarations encore plus musclées vis-à-vis de ces mouvements sauvages que vous déclarez vouloir enrayer afin que le service au client soit maximum.

Après avoir annoncé comme sanctions des retenues sur salaires, dont vous allez me fournir très bientôt le nombre total et le montant puisque j’ai déposé une question écrite dans ce sens, vous durcissez le ton en annonçant votre intention de licencier les responsables de la grève d’Onoz dès qu’ils seront identifiés.

Mes questions sont les suivantes Monsieur le Ministre :

Je pense que vous vous attendiez à une réponse tout aussi musclée de la part des syndicats à une mesure aussi dure que celle annoncée la semaine dernière. Pour le dire autrement, vous courrez au choc frontal avec les syndicats. Comment allez-vous gérer cette situation ?

Sur quelles bases légales allez-vous licencier les responsables de cette dernière grève sauvage ?

Vous évoquez la nécessité de mettre en place un service minimum pour pallier à ce genre de mouvement et maintenir une certaine qualité de service pour l’usager. Vous évoquez un modèle québécois en la matière. Mais pourquoi allez si loin. J’ai déposé avec mes collègues Borsus, Crucke et Jeholet, une proposition de décret le 25 mai 2005 visant à garantir un service minimum dans le cadre des missions de services publics assurées par le groupe TEC. Vous n’en avez pas voulu. Maintenant vous réinventez la poudre en parlant « service minimum ». A force de réinventer la poudre et de jouer avec le feu, la situation pourrait bien vous péter à la figure, Monsieur le Ministre. Pourquoi n’y a-t-il toujours pas de service minimum en Mars 2007 ? Quand sera-t-il opérationnel ?

Par ailleurs vous plaidez pour la mise en place d’un cadre légal plus strict autour du droit de grève. Outre le fait que cet état d’esprit doit plaire à votre partenaire socialiste, il est un peu facile de demander, entendez reprocher, au fédéral de ne pas mettre en place assez vite à votre goût des règles pour réduire les mouvements d’humeur sauvages alors que c’est votre parti, Monsieur le Ministre qui freine ce dossier à la Chambre. Avez-vous l’intention de vous concerter avec vos collègues du fédéral pour espérer une réforme du droit de grève ? Qu’entendez-vous pas « cadre légal plus strict » ? Etes-vous autour de la table avec les syndicats sur ce dossier ?


Merci des réponses que vous voudrez bien me donner.


Réponse du Ministre André Antoine,
– Je vais répondre, en Ministre responsable, à ceux qui oublient le silence de cinq ans de législature. Je tiens à signaler que, parmi ceux qui crient le plus fort aujourd'hui, certains se sont inscrits dans des colloques sur le sujet, mais en ont été absents toute la journée.
Il a d'ailleurs résulté de ces colloques que la matière relève bien du Fédéral.

Je veux rendre hommage aux nombreux travailleurs des TEC qui, pour leur grande majorité, ont permis par leur travail exceptionnel, que nous atteignions des résultats époustouflants en matière de transport en commun.
L'exercice précédent a permis de rencontrer une croissance de 15 % et une affluence de 200 millions de passagers grâce au travail des agents des TEC et aux moyens attribués au secteur par le Gouvernement. Les TEC ont connu une croissance budgétaire sans pareil !

M. Bernard Wesphael (Écolo). – Je tiens à faire observer que la croissance était déjà de 13 % en juin 2004.

M. André Antoine, – Les chiffres que je donne sont relatifs à la progression 2005-2006.
Nous avons lancé, en concertation avec le Ministre Courard, l'opération « bus locaux » qui a permis, notamment à des communes rurales, d'acquérir gratuitement des bus pour étoffer leur offre des transports en commun.
La semaine dernière, le Gouvernement a également augmenté, pour les cinq TEC, l'offre pour les personnes à mobilité réduite.
En plus de tout cela, nous avons dégagé une enveloppe de 13 millions d'euros pour l'opération « Sécuritec ».

La Région wallonne a consenti un effort global pour les transports en commun de l'ordre de 400 millions d'euros, au sein desquels une enveloppe annuelle de 600.000 euros est réservée à l'amélioration de la qualité du dialogue social.

Comme vous le voyez, ce sont là des résultats et pas seulement des paroles.

Je puis également vous annoncer que le Ministre-Président m'a demandé de mettre sur pied un Gouvernement spécial réservé à la mobilité pour le 14 avril 2007, et cela afin d'augmenter encore davantage notre action en la matière.

Je peux aussi vous communiquer la liste des jours de grève que nous avons connus dans le secteur depuis 2004. Ils ont été bien moindres que sous la précédente législature. La raison en est d'ailleurs très simple : sous la précédente législature, nous étions confrontés à des grèves généralisées alors que, depuis 2004, il s'agit de mouvements locaux.

Si j'ai réagi comme je l'ai fait dans le cas du mouvement de grève auquel vous avez fait allusion et que je n'ai par exemple pas réagi au mouvement survenu dans le Hainaut, c'est en raison de la nature du mouvement.
En effet, dans le Hainaut, un chauffeur a été blessé par une lame car l'agresseur s'est trompé d'agent.
Il pensait s'en prendre à un agent qui était par ailleurs arbitre de football et avec lequel il était en conflit.
L'agent blessé était donc une victime innocente d'un règlement de compte entre un footballeur et un arbitre. Je n'ai pas dit le moindre mot !

Par contre, dans le cas qui nous concerne, quelle était la cause du mouvement ? La FGTB, CGSP, en l'occurence, a souhaité revendiquer les bénéfices de 20 jours de congés au lieu de 19. La direction du TEC concerné a sollicité le Fédéral pour connaître la bonne application de la loi. L'inspecteur social a donné raison à la délégation syndicale, affirmant que les agents avaient bien droit à 20 jours de congés au lieu de 19. Mais, ce même inspecteur a été ébahi en constatant que les agents ne prenaient pas l'ensemble des jours de congé auxquels ils avaient droit, préférant un salaire supplémentaire.
Vous devez savoir que chaque agent du TEC en question prend en moyenne 16 jours de congé par an, est malade 18 jours par an et est absent 11 jours par an.
Pourquoi la grève, me direz-vous ? Parce que l'inspecteur a rappelé aux agents leur obligation de prendre deux semaines de vacances consécutives, ce qu'ils ont refusé de faire. Or, c'est la loi !

Il a donc été décidé, de commun accord entre les parties, de tenir une réunion de concertation huit jours plus tard. Et malgré l'accord signé par les deux parties, un groupe a décidé, sans prévenir le conseil d'aministration ni la direction, d'entamer le mouvement de grève pour protester contre l'application de la loi.

Vous devez savoir que le simple respect de la loi permettrait de recruter, dans ce TEC, 15 chauffeurs supplémentaires sans générer le moindre coût.

Je suis le garant du respect de la loi. J'agirai comme dans le dossier Sagawé. Je ne quitterai jamais cette ligne. A quoi bon légiférer si on ne fait pas respecter les règles.

Le motif de la grève était impropre et, conformément à mes précédentes déclarations, j'ai exécuté la menace que j'avais brandie. J'ai demandé l'application de la convention sectorielle qui m'autorise à solliciter la SRWT pour qu'elle décide de la perte de 20 % des crédits d'heures. Je regrette d'avoir demandé cela car des agents qui n'ont pas participé aux grèves seront victimes de cette perte, en vertu des conventions collectives.

Je note que le MR réclame le service minimum mais qu'il n'inscrit pas ce point au Fédéral qui est pourtant le siège de la matière.

J'ai indiqué ma volonté d'obtenir un accord social. Je respecte le droit à la grève, c'est fondamental dans une démocratie sociale, mais j'essaie d'abord d'obtenir un dialogue. Je demande de ne pas faire grève pour un motif illégal. Je tiens d'ailleurs à saluer l'infinie sérénité des délégués syndicaux qui veulent très vite se remettre autour de la table. Le climat social est bon. Nous négocions depuis des semaines dans une atmosphère tout à fait positive. Ces discussions portent sur des thèmes essentiels : le remplacement des bus, l'investissement dans la formation des agents, le développement des services à mobilité réduite et la sanction de grèves qui ne reposent pas sur un dialogue concerté.

Je continuerai donc à oeuvrer dans cette voie, au nom du Gouvernement.

M. Bernard Wesphael (Écolo). – Je suis plutôt enclin à vous croire à propos du pourquoi de cette grève sauvage. Cependant, mon interpellation porte également sur le caractère maladroit et autoritaire de votre prise de position à l'aune d'un accord presque signé. Vous avez pris un risque majeur. C'était un peu démagogique : vous saviez que vous n'auriez pas les têtes que vous réclamiez, qu'il y a des règles à respecter. Vous saviez aussi que la solidarité allait jouer à plein.

M. André Antoine, – On l'a déjà fait à Charleroi.

M. Maurice Bayenet (PS). – Le chauffeur de la ligne Nalinnes-Charleroi a été licencié.

M. Bernard Wesphael (Écolo). – Vous dites que la concertation a repris son train normal mais vous ne dites pas quand cet accord sera signé. Suite à votre prise de position, cet accord sera retardé. J'attends votre calendrier.

M. Philippe Fontaine (MR). – Je n'ai pas eu de réponse à ma question. J'en conclus qu'il n'y aura pas de licenciement à Onoz. Je n'ai pas eu non plus de délai pour la mise en place d'un service minimum. Vous voulez mettre fin aux grèves sauvages mais vous ne dites pas comment vous allez procéder. Comme d'habitude, vous renvoyez le problème au Fédéral.