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Interpellation du
21/09/05
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La confusion entre communication institutionnelle...
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Interpellation de Philippe Fontaine, Député wallon, au Ministre Philippe Courard, Ministre des Affaires intérieures et
de la fonction publique, concernant :
« La confusion entre communication institutionnelle et propagande personnelle de certains élus politiques »
Monsieur le ministre,
Le 22 juillet 2005, dans l’édition de Charleroi de la Nouvelle Gazette, on pouvait découvrir en pleine page une
communication de la Fédération du Tourisme de la Province de Hainaut sur le thème suivant : « Patrimoine et mémoire,
Convivialité, folklore et loisirs au Pays de Charleroi… »
Jusque là, où est le problème me direz-vous ? Effectivement, jusque là, il n’y a aucun problème, sinon se féliciter de
rappeler aux habitants du Pays de Charleroi qu’ils habitent une région pleine de richesses architecturales, patrimoniales,
culturelles et naturelles.
Par contre, ce qui est plus particulier est de voir figurer en bonne place, c’est-à-dire en plein centre de l’annonce,
la photo d’un mandataire provincial qui rappelle ses titres et le message suivant : « vous offre un aperçu des multiples
richesses du Pays de Charleroi ». Cette photo est quatre fois plus grande que celles des sites dont l’annonce est
sensée faire la promotion. De plus, parmi les quelques 15 sites cités dans l’annonce, une extrême minorité a quelque chose
à voir avec la Province et sont directement dépendants de la Région wallonne, de la Communauté française ou sont tout
simplement privés.
Cela dit, que la Fédération du Tourisme de la Province de Hainaut respecte son objet qui consiste à promotionner le
patrimoine, la mémoire, le folklore et les loisirs de la Province avec des accès particulier comme le Pays de Charleroi ne
me pose aucun problème, au contraire on pourrait lui reprocher de ne pas le faire. Par contre, je que je soumets à votre
avis est la personnalisation du propos par l’image d’un mandataire provincial, député permanent et Président de la dite
fédération.
A l’approche des prochaines élections communales et provinciales d’octobre 2006, je trouve ce procédé extrêmement limite ,
je dirais même sujet à caution.
Au niveau fédéral, constatant cette même dérive de multiplication de communications de mandataires publics aux frais du
contribuable, la Loi du 04 juillet 1989 relative à la limitation et au contrôle des dépenses électorales engagées pour les
élections des chambres fédérales est venue mettre de l’ordre dans ces pratiques.
Les textes sont en effet très clairs en la matière : « Quant aux communications gouvernementales, les ministres ou
présidents d'assemblée qui veulent, avec de l'argent public, mener une campagne de communication ne sont par exemple pas
autorisés à personnaliser leur message en publiant leur photo. La communication se doit donc de rester fonctionnelle et
neutre. Bien entendu, nous tolérons dans certaines situations que la photo apparaisse mais de manière discrète, non
ostentatoire. Ils doivent nous soumettre leur projet de campagne. Nous l'autorisons en fixant éventuellement certaines
conditions. »
Le 21 février 2002, la Région de Bruxelles capitale adoptait une ordonnance relative au contrôle des communications
gouvernementales qui prévoit notamment au paragraphe 4 que « dans le cas où le collège de contrôle décide que la
communication gouvernementale vise à promouvoir l'image personnelle d'un ou plusieurs membres du Gouvernement ou d'un ou
plusieurs Secrétaires d'Etat régionaux, ou à promouvoir l'image d'un parti politique, il impute les frais de cette
communication gouvernementale sur les dépenses électorales des intéressés lors des prochaines élections auxquelles ils
se présentent.
§ 5. Dans le cas ou l'avis du collège de contrôle, tel que prévu par le présent article, n'a pas été
demandé, le collège de contrôle se saisit d'office et le coût de la communication gouvernementale est de plein droit
imputé sur les dépenses électorales des intéressés lors des prochaines élections auxquelles ils se présentent. »
Le 25 avril 2002 c’était au tour de la Région wallonne d’adopter son décret instituant le contrôle des communications des
membres du Gouvernement wallon.
Ce décret prévoit notamment que dans le cas où la communication gouvernementale vise à promouvoir l'image personnelle d'un
ou de plusieurs membres du Gouvernement wallon ou l'image d'un parti politique, la Commission de contrôle applique les
sanctions selon les modalités suivantes :
- pour une première contravention : un blâme au contrevenant avec parution dans
la presse;
- pour une deuxième contravention : imputation du quart du coût total de la communication gouvernementale au contrevenant;
- pour une troisième contravention : imputation des trois quarts du coût total de la communication gouvernementale au contrevenant;
- pour une quatrième contravention et les suivantes: imputation de la totalité du coût total de la communication gouvernementale au contrevenant.
L'imputation visée à l'alinéa précédent porte sur les dépenses électorales des intéressés lors des prochaines élections auxquelles ils se présentent.
Il ne vous aura pas échappé Monsieur le ministre que les textes auxquels je fais référence concernent les communications
gouvernementales des niveaux de pouvoirs les plus élevés de la nation.
Mes questions seront donc les suivantes, Monsieur le Ministre :
Ne pensez-vous pas qu’il y a manifestement confusion entre promotion de l’image personnelle et celle des richesses
architecturales, patrimoniales, culturelles et naturelles du Pays de Charleroi ?
Ne pensez-vous pas que cette communication est susceptible de semer la confusion dans l’esprit du lecteur du journal ,
donc du citoyen et donc de l’électeur entre un organisme dont le travail est de promotionner le tourisme en Hainaut et
cette personne comme acteur de promotion du tourisme ?
Quelles mesures comptez-vous prendre pour que ce type de communication à double message ne se développe pas à l’approche du
prochain scrutin électoral ?
Que comptez-vous mettre en œuvre pour , qu’à l’instar de l’Etat fédéral et des entités fédérées, on puisse clarifier la
situation en matière de communication aux autres niveaux de pouvoir et particulièrement au niveau provincial ?
Enfin, comptez-vous imputer aux dépenses électorales de ce député permanent de la province de Hainaut tout ou partie du
montant de cette communication et/ou comptez-vous prendre une autre forme de sanction à son égard et si oui, laquelle ?
Merci déjà des réponses que vous voudrez bien me donner.
Réponse du Ministre Philippe Courard,
La problématique soulevée par l'honorable Membre a déjà retenu toute mon attention, dans la mesure où, eu égard à la
répartition des compétences régionales, je suis en charge de l'organisation des prochaines élections communales et
provinciales d'octobre 2006 et que, dans ce cadre, le volet « contrôle des dépenses électorales» ne peut être négligé.
Ce volet fera l'objet d'un chapitre particulier du projet de décret « Elections» actuellement en cours de rédaction
dans mes services.
Je tiens à préciser, à titre liminaire, qu'il ressort d'un avis du Conseil d'Etat que la compétence régionale est
strictement limitée au contrôle des dépenses électorales, et non à leur limitation.
En ce qui concerne l'article de presse incriminé, je ne souhaite pas polémiquer sur la taille de la photo querellée.
Toutefois, ainsi que le souligne l'honorable Membre, cet article soulève des questions importantes sur la communication
institutionnelle, la propagande personnelle et les dépenses électorales.
La Région wallonne a, par son décret du 25 avril 2002, institué le contrôle des communications des membres du Gouvernement
wallon. La Commission de contrôle de dépenses électorales et des communications, dont je sais toute la sévérité dont elle
est capable, a décidé que le nom d'un Ministre ou du Président de l'Assemblée peut figurer dans un document écrit qui
remplit notamment les conditions suivantes:
- son contenu relève des compétences de l'autorité politique concernée;
- il a un rôle explicatif de la mesure envisagée et non promotionnel de l'image de l'autorité politique concernée;
- il a une portée wallonne et non sous-locale.
Rien n'empêche les conseils provinciaux et communaux d'adopter des règles similaires.
Plusieurs Parlementaires wallons ont récemment déposé une proposition de décret visant à assurer le respect d'un Code de
déontologie régissant les services fournis aux citoyens par les élus provinciaux et communaux.
Cette proposition va être discutée cette après-midi au sein de notre Assemblée. Ce Code ne pourrait-il définir les limites
dans lesquelles un mandataire local peut utiliser son nom et son image en dehors de la période suspecte fixée dans la loi
du 7 juillet 1994 ?
Je relève par ailleurs que la loi du 7 juillet 1994 relative à la limitation et au contrôle des dépenses électorales
engagées pour les élections des conseils provinciaux, communaux et de district et pour l'élection directe des conseils de
l'aide sociale réglemente particulièrement la période de trois mois qui précède le scrutin. La période suspecte n'ayant
pas encore commencé, il ne me paraît pas possible d'imputer l'article incriminé au titre des dépenses électorales du
mandataire local concerné.