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Interpellation
du 23/04/08 |
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Le rôle des Régions en matière de Culture ... |
Interpellation de Monsieur Philippe Fontaine, Député MR
A Monsieur Rudy Demotte, Ministre Président
Concerne :
"Les Déclaration du Ministre wallon, Monsieur Marcourt sur le rôle des Régions en matière de Culture : Que reste-t-il à la Communauté française ?"
Nous avons tous lu l’interview que Monsieur Jean-Claude Marcourt, Ministre wallon de l’Economie et de l’Emploi a donnée au Soir le 9 avril passé. Cette interview, aux accents régionalistes très marqués nous a étonnés, entre autre par la déclaration du Ministre sur la Culture. Monsieur Marcourt nous informe que, selon lui, « Ce qui est fondamental c’est que toutes les compétences qui pourraient être transférées du fédéral soient prioritairement transférées à la Région. » Toujours selon Monsieur Marcourt « On pourrait ensuite réduire la voilure de la Communauté française (…) En termes de Culture, il faudrait un exercice plus fort au niveau des Régions. »
Visiblement non informée préalablement de la sortie médiatique de Monsieur Marcourt, Madame la Ministre Laanan a réagi à ces propos dans Le Soir du 10 avril, soit le lendemain.
S’en est suivi une carte blanche des deux (ou trois ?) Ministres Présidents socialiste, Monsieur Picqué et Monsieur Demotte plaidant pour une fédération Wallonie-Bruxelles aux forts accents régionalistes. L’intention est bonne, nous n’allons pas le nier. La mise en œuvre pose pourtant plusieurs questions. Notamment en ce qui concerne la compétence culturelle.
Dans sa réponse au Ministre Marcourt, Madame Laanan déclarait que vous, éminent Parti socialiste, avez toujours voulu, je cite, « un lien fort entre Bruxelles et la Wallonie. Je pense que nous devons essayer de mieux articuler nos compétences de manière complémentaire. »
Votre carte blanche fait également état de, je cite toujours, « la nécessité de développer des synergies entre les Régions et d’assurer un lien de solidarité efficace entre la Wallonie et Bruxelles ».
- Sans revenir sur le geste fort que votre parti a voulu poser vis-à-vis de Bruxelles en nommant deux nouveaux Ministres wallons au sein du Gouvernement de la Communauté française, pourriez-vous nous expliquer les véritables intentions du Parti socialiste en ce qui concerne la Culture en Communauté française ?
- Le but de la carte blanche est, notamment, de rationaliser le nombre de Ministres, cela veut-il dire que, à partir du moment où vous aurez décidé de concrétiser vos bonnes intentions, le poste de Ministre bruxellois francophone en charge de la Culture disparaîtrait ?
- Avez-vous déjà réfléchi au niveau pratique à comment prendre en compte les spécificités de ces deux Régions dans le cas d’un Ministre unique ?
- Comment, par exemple, respecter la minorité flamande à Bruxelles et la minorité germanophone en Région wallonne ?
- Si par contre la Culture est régionalisée, de nombreux artistes wallons pourraient se plaindre de ne plus pouvoir profiter de la vitrine internationale offerte par Bruxelles. Comment comptez-vous remédier à cette difficulté ?
Face à la réaction de Madame Laanan dans les colonnes du Soir du 10 avril, le cabinet du Ministre Marcourt prolonge son idée de la veille en faisant part d’une volonté d’émancipation et d’ajouter, je cite, « qu’il est peut-être temps de réfléchir de manière plus large (…) mais aussi sans tabou à la manière dont les pouvoirs publics subsidient la culture. » Le cabinet Marcourt a malgré tout la décence de rajouter qu’il ne « jette la pierre à personne »….
- Pourriez-vous, Monsieur le double Ministre Président, nous expliquer ce qui se cache derrière de tels propos. Votre idée est-elle de remettre en cause votre politique de subventions en matière culturelle, mais comme le débat est posé par un de vos « Camarade », permettez-moi de vous demander ce que cela cache…Une grande réforme de la politique de subventionnement est-elle programmée ?
Le secteur de la Jeunesse se pose également des questions quant à son avenir institutionnel. Dans le cas où la Fédération Wallonie-Bruxelles voit le jour, qu’en est-il des subsides ?
- Pour le moment, les organisations de jeunes doivent organiser un nombre d’activités déterminé sur tout le territoire de la Communauté française, qu’en sera-t-il demain ?
- Ces O.J devront-elles choisir une des deux Régions pour établir leur siège ou organiser leurs activités ?
- Comment et sur quelles bases pourront-elles faire ce choix ?
Je vous remercie pour vos réponses.
Réponse du Ministre Ministre-Président Rudy Demotte,
- Je pourrais vous résumer la proposition formulée au Groupe Wallonie-Bruxelles de cette manière : plaidons pour une Belgique fédérale ; engageons-nous dans ce combat. Une Belgique fédérale construite sur la base de trois régions. Je sais que l’on n’a pas toujours tenu ce discours historiquement.
Les revendications flamandes ont vu naître, dans les années 1970, une communauté explicitement souhaitée sur la base de la langue et de la culture, étant donné les craintes exprimées dans le Nord du pays. Le discours régionaliste – ce n’est pas une découverte – était davantage tenu dans le Sud. Le fait que la Région de Bruxelles s’assume aujourd’hui de plus en plus doit être non seulement porté par les Bruxellois, mais par lesWallons qui sont leurs frères de combat, pour le renforcement des compétences et de l’autonomie constitutive de la Région de Bruxelles. La Communauté est un lieu d’articulation de nos régions et nous en avons besoin.
Tel est le message que je transmettrai au Groupe Wallonie- Bruxelles. Cette instance commune, nous proposons de la construire avec, évidemment, des compétences et un budget propres. Elle sera l’outil d’une solidarité entre les régions, pas seulement une solidarité imposée par l’institution, mais une solidarité de consentement, une solidarité d’adhésion. Cette évolution institutionnelle nous paraît indispensable, car à défaut d’y être attentif, nous connaîtrions, je pense, une dissolution de ce lien.
Comprenez-moi bien : nous proposons une Communauté française revisitée à la lumière de l’importance que prennent les régions, dans une volonté de synergie approfondie et structurée, basée autrement que sur l’épisode de rencontres fugaces, aussi agréables soient-elles, entre les entités régionales. Aujourd’hui déjà les régions interviennent en matière d’enseignement, d’infrastructures sportives et culturelles, parfois au moyen d’artifices nombreux que vous connaissez.
Cette complexité doit être transcendée ; la question essentielle est de savoir comment améliorer ces organisations et les simplifier. Je constate que les acteurs de compétences exercées par la Communauté française se sont montrés, eux aussi, intéressés – je parle ici des gens de terrain – par une meilleure organisation, une meilleure articulation avec les régions, tout en assurant des tailles critiques nécessaires à leurs activités. Après avoir rappelé le contenu de notre proposition, je voudrais aussi préciser ce qui n’y est pas.
Certains ont dit craindre, non pas ce qui a été dit mais ce qui ne l’a pas été. Je ne ferai pas la liste de tout ce dont on ne parle pas, la distance de Mars à la Terre et d’autres choses du genre. Je précise cependant qu’il n’est fait nulle part allusion à une quelconque scission de l’enseignement ou de la culture, ni à une mise en péril d’emplois dépendant de la Communauté française.
M. Fontaine craint, à la suite des propos de M. Marcourt, que la culture ne devienne un espace de débat régional, un objet de dissolution. Selon moi, ce patrimoine commun doit être jalousement préservé. Il suscite en effet l’intérêt d’une écrasante majorité des citoyens de Wallonie et de Bruxelles, et doit faire l’objet d’une collaboration plus marquée entre Wallons et Bruxellois francophones. Parallèlement, une région ne peut se développer sans dimension culturelle.
Lorsque M. Miller et moi-même avions en charge certains segments culturels, nous avions souhaité que la culture soit reconnue, bien qu’étant un secteur non marchand, comme levier de développement territorial. Nous étions en effet convaincus qu’oublier ce rôle de la culture eût été une erreur.
Notre carte blanche reprend ce même principe de base : décliner utilement la culture pour le plus grand nombre, y compris dans des domaines extra-culturels. Quant à la mobilisation des compétences pour l’emploi, le patrimoine, les travaux subsidiés et le tourisme, les régions y participent pour permettre la démocratisation de la culture. Elle représente un gage d’émancipation, dans leurs diversités culturelles, des citoyens francophones de Bruxelles, des Wallons et des germanophones.
La culture doit effectivement être envisagée sous l’angle du capital humain, mais aussi de son impact économique. Toutefois, je ne pense pas qu’il faille peser sur une balance d’apothicaire ce qui est réalisé ici ou là, car des politiques culturelles peuvent mettre davantage l’accent sur une région, puis sur une autre. Ce sont les résultats qui importent, davantage que les moyens. Cependant, articuler, intégrer, favoriser ne signifient pas gérer en solo.
La culture est intrinsèquement liée à cette Fédération Wallonie- Bruxelles, même si elle peut prendre des formes qui soient davantage en adéquation avec les réalités du terrain.
M. Philippe Fontaine (MR). – Je partage les propos de M. Cheron sur l’ambiance dans les parlements.
Les déclarations de M. Marcourt sur l’avenir de la culture en Communauté française étaient inquiétantes. Vous avez remis les choses en place. Il n’empêche qu’il est impossible d’interpeller un ministre wallon sur ses déclarations dans des matières qui ne relèvent pas de sa compétence.
Je me réjouirais de pouvoir interpeller le ministre wallon de l’Économie, M. Marcourt, lorsqu’il nous parle de la culture. Nous somme donc favorable à la mise en place d’un gouvernement unique. Nous regrettons néanmoins que ce ne soit pas pour tout de suite. Il ne suffit pas de lancer de belles idées, il faut encore réfléchir aux modalités pratiques et voir comment elles tiendront la route.
En revanche, il me semble qu’il était possible de mettre en place immédiatement un gouvernement commun et d’organiser ensuite le fonctionnement institutionnel en apportant les rectifications éventuelles.