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Interpellation
du 28/03/07 |
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Commission d’homologation et équivalence des... |
Interpellation de Monsieur Philippe Fontaine, Député,
A Madame Marie Arena, Ministre-Présidente, en charge de l’Enseignement obligatoire et de promotion sociale et
À Monsieur Claude Eerdekens, ministre de la Fonction publique et des Sports concernant:
"Commission d’homologation et équivalence des diplômes de l’enseignement obligatoire:"
L’équivalence de diplôme de l’enseignement obligatoire est nécessaire pour tous les étudiants qui ont accompli tout ou en partie leur cursus scolaire à l’étranger, afin, soit poursuivre des études en Communauté française, soit y travailler, sur base de ce diplôme obtenu à l’étranger.
Lorsqu’une demande d’équivalence de diplôme de l’enseignement obligatoire est introduite, le processus est le suivant :
- l’Administration reçoit le dossier ; s’il est complet, elle le transmet à la Commission d’Homologation pour analyse ; dans la majorité des cas, l’Administration, ici, le Service des Equivalences, prendra une décision sur base de l’Avis de la Commission d’Homologation.
En 2006, ce Service des Equivalences a reçu 19.658 demandes, c’est énorme. Ces agents abattent un travail considérable, d’autant plus que la moitié de leur temps est consacrée à gérer les relations publiques (téléphone, visites, contacts).
Fin février 2007, nous aurions d’ailleurs dû recevoir le Rapport de fonctionnement du Service des Equivalences. Ce document est-il déjà en votre possession ?
Indéniablement, ce Service cristallise en fait bien des espoirs et des frustrations, et il en est bien conscient. Depuis quelques années, de nombreux efforts ont été effectués en faveur d’une amélioration de la qualité du contact avec le public : l’édition d’une brochure fort bien faite, la diffusion d’une circulaire destinée à toutes les écoles et les universités, la mise en place d’une possibilité de contact spécifique pour les établissements scolaires et la mise à jour du site Internet.
Pourtant, le Rapport 2006 du Service du Médiateur de la Communauté française relève encore certaines améliorations à apporter au Service des Equivalences. Je me propose d’en relever quelques unes.
Il recommande aujourd’hui formellement de pérenniser l’organisation et la structure du Service des Equivalences, en renforçant le personnel et en le dotant d’un statut non précaire.
En octobre 2005, mon collègue Pierre Boucher avait déjà eu l’occasion, Monsieur Eerdekens, de vous interroger sur le sujet. Vous sembliez conscient du problème.
- Pourriez-vous faire le point en ce début d’année 2007 sur ce département où la moitié des agents ont un statut précaire et où nous assistons à une forte rotation du personnel ?
Par ailleurs, il apparaît que certains dossiers n’ont pas été correctement remplis car l’information délivrée par l’établissement scolaire en Communauté française était incorrecte ou incomplète. Bien entendu, une circulaire et un site Internet existent, mais l’étudiant étranger est-il au courant de leur existence ? A-t-il des raisons de douter de l’information délivrée par l’établissement où il désire s’inscrire ?
Or, le Service des Equivalences ne reconnaît apparemment pas qu’une mauvaise information diffusée par un tiers soit considérée comme une circonstance exceptionnelle afin d’accepter un dossier, même si ce tiers est l’établissement scolaire.
- Quelles mesures préconisez-vous pour résoudre ce problème spécifique ?
D’autre part, si le dossier est introduit quelques semaines ou jours avant la date limite du 15 juillet, le personnel est très occupé, et presqu’aucune possibilité de compléter son dossier ne sera laissée au demandeur.
Or, il suffit parfois de peu de choses, et les conséquences peuvent être lourdes : report de son dossier à l’année suivante par exemple…Conséquences dont le demandeur n’est pas spécialement informé lors de l’introduction de son dossier…
Bien entendu, il vaut toujours mieux introduire un dossier le plus tôt possible, mais tous les étudiants n’ont pas la possibilité de s’y prendre ainsi à l’avance.
- Que pouvez-vous recommander pour aider les demandeurs à ne pas être ainsi discriminés parce la date du dépôt de leur dossier les désavantage ?
Le Médiateur pense également que la seule absence de preuve de paiement dans un dossier, alors même que les frais ont été versés dans les délais requis (le 15 juillet) ne peut être une cause de renvoi du dossier à l’année suivante.
Pour lui, un assouplissement de l’exigence réglementaire inscrite dans l’article 9bis de l’AR du 20 juillet 1971 est nécessaire.
- Partagez-vous cette analyse ?
Dernière remarque à propos du Service des Equivalences : la date de production du diplôme définitif.
En effet, s’il a fait ses études dans certains pays bien spécifiques, le demandeur doit produire son diplôme original.
Or, et je cite le Rapport du Médiateur, certains demandeurs attendent plusieurs années pour obtenir ce dernier, soit parce que l’impression n’a pas encore été réalisée, soit parce que le Gouvernement ne délivre ceux-ci qu’après un temps déterminé pour éviter notamment les contrefaçons, soit parce que l’instabilité règne dans leur pays…
Une dérogation de production de l’original du diplôme ne peut être introduite auprès du Service des Equivalences qu’à deux reprises. Ensuite, l’intéressé risque de voir son parcours académique réduit à néant, puisque sans équivalence, l’ensemble du parcours effectué dans notre enseignement supérieur sera non validé.
Bien entendu, vous me répondrez que ce problème ne se pose que pour une minorité de demandeurs. C’est vrai, mais faut-il pour autant ne pas chercher une solution à ce cas spécifique, indépendant de la volonté des demandeurs ?
- Comment croyez-vous pouvoir lever cet obstacle ?
Cependant, ce qui me semble le plus problématique est, d’après les informations qui me sont parvenues, le fonctionnement de la Commission d’Homologation des certificats de l’enseignement secondaire.
- Pourriez-vous tout d’abord m’expliquer clairement le fonctionnement et la composition de cet organe.
Autant le Service des Equivalences possède un site Internet clair, a une visibilité auprès des demandeurs, autant la Commission d’Homologation reste dans le flou aux yeux du grand public.
Et qui dit une certaine opacité, dit des soupçons de mauvaise organisation interne. Ce qui est sans doute loin d’être le cas…
Une plus grande transparence et communication ne pourrait qu’être bénéfique à cette Commission d’Homologation.
Cette fameuse Commission a été créée par arrêté en 1989. Elle délibère de manière indépendante, au nom du Gouvernement de la Communauté française.
Ses membres sont certainement fort compétents et travaillent également, j’en suis certain, énormément.
Malheureusement, les avis qu’elle rend sont souvent peu compréhensibles par le citoyen moyen, ne parlons donc pas de l’étudiant étranger un peu perdu dans les méandres de nos administrations et filières d’enseignement.
Le Médiateur signale combien la forme manuscrite et les abréviations sont encore largement utilisées. Le langage utilisé n’est pas toujours accessible, les avis rendus pas toujours très compréhensibles, et du coup, parfois sujets à interprétation.
En octobre 2004, vous affirmiez, Madame la Ministre-Présidente, en Commission de l’Education : « La jurisprudence du Conseil d’Etat permet, quand il y a un afflux de demandes, d’avoir des motivations restreintes. Celles-ci peuvent sembler dangereuses en termes de stabilité juridique parce qu’elles pourraient ouvrir la porte à des recours….Nous avons fait un choix de procédure…Cela nous a permis de traiter un maximum de demandes en matière d’équivalences. »
Qui dit de surcharge de travail dit aller à l’essentiel. Motivations restreintes ne signifient pas motivations peu compréhensibles.
- Cependant, n’y a-t-il pas moyen de trouver une voie médiane ? D’utiliser un langage un peu moins technique et de faire comprendre au demandeur les raisons de la décision prise ?
Par ailleurs, la Commission d’Homologation analyse les documents contenus dans le dossier sur le fond et sur la forme. Certains dossiers restent bloqués dans dans l’attente de la vérification de tel ou tel document. Le demandeur n’étant le plus souvent pas au courant des enquêtes en cours.
De manière générale, n’y aurait-il pas moyen d’améliorer la communication entre la Commission d’Homologation et le Service des Equivalences, nécessaire au bon traitement de ces dossiers ?
Le temps exagéré qui s’écoule parfois entre l’introduction du dossier et la décision finale est parfois du temps perdu pour le demandeur, vu les délais d’inscription dans les établissements scolaires, à des épreuves de jury de la Communauté française ou au Diplôme d’Accès à l’Enseignement supérieur, l’examen de maturité organisé par la Communauté française.
- N’y aurait-il pas moyen de mieux synchroniser mes échéances administratives et scolaires ?
Réponse de la Ministre-Présidente Marie Arena,
– Depuis le début de la législature, toutes les personnes concernées s’efforcent d’améliorer le fonctionnement du Service des équivalences. Le rapport de la médiatrice souligne les progrès effectués. L’accès, l’accueil du public, le délai de traitement des dossiers et le suivi des demandes ont été améliorés de façon significative. Nous nous en félicitons, mais nous sommes consciente qu’il reste bien des problèmes à résoudre.
Le rapport d’activités 2006 du Service des équivalences est en gestation. Il sera disponible le 15 avril 2007. En ce qui concerne l’organisation et la structure du service, M. Eerdekens indique que ce dernier souffre d’une importante rotation du personnel, principalement due aux exigences de la fonction. Les responsables du service ont engagé l’équipe dans un processus intensif de changement qui semble être bénéfique et avoir un impact direct sur les usagers. Le personnel n’est pas plus précaire que dans d’autres entités du ministère, qui compte plus ou moins 46 % de contractuels. Cette situation découle de la difficulté d’organiser des concours de recrutement auprès du Selor. Un concours de recrutement de niveau 2, qualification générale, sera toutefois annoncé avant les vacances scolaires. La fonction publique de la Communauté française devrait donc pouvoir bientôt compter plus de personnel statutaire dans ses rangs.
La communication vers les citoyens est un souci constant du Service des équivalences. L’avancement des dossiers peut désormais être suivi en temps réel sur internet. Dès le 18 avril, ce sera également possible via le centre d’appels téléphoniques. La brochure Petit guide des équivalences de diplômes de l’enseignement secondaire a été améliorée. En outre, des affiches rappellent l’existence et le fonctionnement du Service des équivalences.
La mise hors délai de dossiers incomplets ne concerne que 0,61 % des dossiers traités par le Service des équivalences. La réglementation prévoit la possibilité de demander une dérogation si la date limite pour le dépôt n’a pu être respectée. Sur les 809 demandes de dérogation introduites, tous pays confondus, 40 % ont été refusées. Mes services mettent tout en oeuvre pour diffuser une large information auprès des demandeurs afin de réduire encore le nombre de dossiers problématiques.
J’en viens à la preuve de paiement. L’exigence réglementaire inscrite dans l’article 9bis de l’arrêté royal du 20 juillet 1971 dispense mes services de procéder à une vérification du crédit bancaire pour chaque dossier. En période d’intense activité, pendant les mois de juin, de juillet et d’août, il faudrait vérifier plus de 8 257 demandes, ce qui représente plus du tiers de la charge annuelle de travail. Il faut mettre en balance l’effort à fournir par le service pour vérifier tous ces paiements et l’effort pour le demandeur qui doit fournir un document adéquat.
Enfin, j’attire l’attention sur la différence entre l’obligation de fournir le diplôme original imposée aux demandeurs en provenance de pays à haut potentiel de production de faux diplômes et l’obligation de produire le diplôme définitif. La première obligation est justifiée par la mission de contrôle de l’authenticité des pièces confiées au Service des équivalences par les textes réglementaires, confirmés par plusieurs arrêts du Conseil d’État. Mes services se sont dotés de moyens à la hauteur de la mission. Ils possèdent notamment un microscope binoculaire permettant de détecter les falsifications invisibles à l’oeil nu.
La deuxième obligation trouve son origine dans l’article 6 de l’arrêté royal du 20 juillet 1971 relatif à l’équivalence des diplômes qui impose l’obligation de produire le diplôme définitif d’études secondaires dans un délai déterminé. Certaines dérogations sont prévues, notamment pour les candidats réfugiés. Cette exigence se justifie par analogie avec les situations existantes pour les diplômés en Communauté française qui sont soumis à l’obligation de contrôle de leur dossier scolaire par la Commission d’homologation. Il est donc logique de soumettre les étudiants étrangers, titulaires de titres étrangers, à la même obligation que les étudiants de la Communauté française.
Je voudrais signaler que les éléments du rapport de la médiatrice relatif à la procédure d’homologation m’interpellent autant que vous. C’est pourquoi j’ai interrogé les présidents indépendants de la Commission d’homologation afin qu’ils me présentent leurs éléments de réponse. Force est de constater qu’il est difficile d’avoir un rapport d’autorité avec ces présidents indépendants. Cependant, je ne manquerai pas d’être vigilante à cet égard, le sujet me tenant fort à coeur. Un suivi particulier sera donné car je me sens interpellée par le rapport de la médiatrice.
Mme la présidente. – La parole est à M. Fontaine pour une réplique.
M. Philippe Fontaine (MR). – Je remercie la ministre pour ses réponses. Même si le personnel de ce département ne bénéficie pas d’un statut plus précaire qu’un autre, il faudrait peut-être encore diminuer le caractère précaire de l’emploi dans ce type de service si on veut que le personnel garde sa motivation et son efficacité. Un autre problème est celui de la rotation importante du personnel qui est soumis à de fortes tensions. Vous nous dites que le pourcentage de problèmes n’est pas très important mais il faut noter que derrière les pourcentages, il y a des gens. Même si on ne peut pas résoudre tous les problèmes, il faut faire preuve de souplesse et de transparence. C’est ainsi que j’ai pu constater que la transparence existe pour les équivalences mais pas pour l’homologation où on constate une opacité totale.
Un autre problème est celui des mauvaises informations données par les établissements scolaires. Dans le rapport de la médiatrice, il est dit que des dossiers sont refusés parce que l’établissement scolaire a donné une mauvaise information aux étudiants. Il faudrait faire preuve de plus de souplesse dans ces cas pour que l’examen du dossier ne soit pas remis à l’année suivante.
La Commission d’homologation est indépendante dans le traitement des dossiers mais cela ne permet pas de justifier l’opacité totale, elle a une mission de service public à garantir. Travailler sans contrainte ne veut pas dire se réfugier derrière un silence total, sans rendre de comptes.
Comme moi, vous trouvez inadmissible que la seule justification qui vous est donnée soit l’indépendance du service. Même la justice n’ose invoquer ce motif pour justifier l’arriéré judiciaire.