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 Interpellation du 07/03/06

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Conséquences pour certaines Hautes Ecoles de Charleroi...
Interpellation jointe de Philippe Fontaine, Député wallon, à Marie-Dominique Simonet, Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche scientifique, concernant :
« Les conséquences pour certaines Hautes Ecoles de Charleroi de l’instauration d’un quota de non-résident au sein de certaines filières de l’enseignement supérieur »


Nous avons longtemps cru que la problématique de l’afflux d’étudiants étrangers, essentiellement français, était réservée à la faculté de médecine vétérinaire ou aux hautes écoles proches de la frontière, comme celles du Hainaut occidental, qui auraient donc été les seules concernées par les mesures que vous proposez.

Il est à présent avéré que le phénomène dépasse les zones frontalières, comme l’a d’ailleurs dit Mme Bertouille. J’en tiendrai pour preuve cet appel de hautes écoles de Charleroi que nous avons tous reçu. L’application de ce décret leur poserait problème, principalement dans leurs sections de kinésithérapie et d’ergothérapie. Bien qu’étant la première ville de Wallonie, Charleroi ne compte que très peu de hautes écoles. Pourtant, pour l’ensemble des formations, le nombre d’étudiants français avoisine, nous dit-on, 1 000 étudiants, voire davantage.

Ces écoles ont toujours accepté tous les Belges souhaitant s’inscrire et n’ont donc pas rencontré le même problème que les facultés de médecine vétérinaire. Elles ne remplissent en effet leurs auditoires d’étudiants français qu’au prorata de leurs capacités d’accueil en termes de locaux et de lieux de stage. Grâce au passage au type long, ces hautes écoles ont pu développer leurs outils de travail. Elles ont ainsi pu dégager des moyens pour la recherche, acheter du matériel hyper performant et créer des emplois. Elles ont en effet recruté des jeunes professionnels, pour la plupart docteurs en kinésithérapie. Ces hautes écoles, et c’est le cas pour tous les autres établissements concernés, considèrent à juste titre qu’elles exportent leur savoir-faire et la qualité de leur enseignement.

Ma collègue Chantal Bertouille a également abordé, d’une manière générale, les effets collatéraux de la mise en place d’une telle mesure. En voici une version chiffrée, que nous avons tous reçue, et qui devrait également vous poser question, madame la ministre. À raison de sept cents euros par mois et par étudiant, montant calculé sur la base d’un prix minimum pour son logement, sa nourriture, son carburant et ses sorties, un étudiant dépasse sept mille euros par an sur ses dix mois de présence en Belgique. Je suis certain que vous avez déjà calculé ce chiffre de sept millions d’euros de retombées économiques en moins pour une région déjà paupérisée, comme celle de Charleroi. Je vous rappelle que ce calcul ne concerne que deux hautes écoles proches de cette ville. Je n’ose imaginer l’ensemble des effets collatéraux pour toutes les hautes écoles concernées.

Il a beaucoup été dit que, jusqu’ici, seules les hautes écoles des réseaux officiels avaient levé le bouclier. Les hautes écoles de la région de Charleroi que j’évoque relèvent du réseau libre. Ce phénomène semble donc toucher tout le monde.

Mes préoccupations rejoignent dès lors celles qu’a évoquées ma collègue. Pourquoi, aux dires des hautes écoles elles-mêmes, n’y a-t-il eu aucune concertation avec les acteurs de terrain pour chiffrer ces 30%?
S’agit-il d’une proposition ?
Cela ne paraît pas être le cas. Avez-vous évalué les conséquences collatérales de la mise en place de telles mesures ?
Quels arguments ont-ils prévalu à la généralisation de ces dernières ?
L’argument selon lequel il n’y a jamais eu le moindre refus d’étudiants belges à l’inscription a-t-il été pris en compte ?

Enfin, le nord de la France s’ouvre de plus en plus au sud de notre Région wallonne. Des projets transfrontaliers émergent et les synergies se multiplient. Nous devrions être fiers de pouvoir exporter nos savoir-faire chez nos voisins. Craignez-vous que ce type de transfert soit préjudiciable pour vouloir ainsi en réduire sa proportion ?


Réponse de la Ministre Marie-Dominique Simonet,
Comme vous l’avez rappelé, cet avant-projet émane du gouvernement dans son ensemble, car il est passé en première lecture au conseil des ministres.

M. Demotte, qui ne fait pas partie du gouvernement de la Communauté française, a tout le loisir de s’exprimer et ce, d’autant plus en cette période d’effervescence précédant les élections communales. Il déclare que la présence des étudiants étrangers ne nuit pas aux hautes écoles, puisqu’elles sont financées par un système d’enveloppe budgétaire fermée.

Cet avant-projet ne vise donc pas à faire des économies mais à sauvegarder notre enseignement supérieur, fondé sur des valeurs de qualité, d’accessibilité et de mobilité des étudiants auxquelles nous sommes tous attachés.

M. Demotte veut répondre aux craintes. Mais notre avant-projet vise tous ceux qui, en Communauté française, sont dans des situations semblables.

Le ministre Demotte craint qu’il y ait à nouveau trop de candidats belges en kiné. Or, un examen devait être organisé par le pouvoir fédéral en vue de la délivrance des 180 numéros Inami. Cet examen a été organisé en Flandre, mais il n’a pas été nécessaire en Communauté française puisque le nombre de candidats était inférieur au nombre de numéros disponibles. Cela témoigne d’une désaffection progressive des étudiants de la Communauté française pour ces études alors que le nombre d’étudiants français augmente.

Certains affirment qu’aucun étudiant belge n’a jamais été refusé. J’ai entendu des témoignages qui relatent le contraire.

Monsieur Fontaine, vous me dites que certaines écoles ont accepté des étudiants français suivant les places disponibles dans les auditoires. Elles ne peuvent pas le faire. Ce n’est pas légal. Je me propose donc de donner un cadre légal et clair à cette situation.

La Belgique est un des plus petits États d’Europe et la Communauté française n’en est qu’une partie. La France, avec 62 millions d’habitants, est un des plus grands États européens. Elle n’a aucun problème financier, budgétaire ou intellectuel à organiser un enseignement. Elle a choisi de mettre en place des numerus clausus. Mais elle accepte sur son marché du travail des travailleurs formés en Belgique ! En effet, l’Observatoire français de la santé précise dans ses rapports qu’un tiers des vétérinaires sont formés en Communauté française.

Ce problème est extrêmement complexe. Les questions pertinentes que vous posez auront davantage leur place lors du débat que nous aurons lorsque le texte sera passé en deuxième lecture et que nous disposerons de l’ensemble des résultats des consultations.

De nombreuses questions doivent être éclaircies car cet avant-projet suscite une certaine incompréhension. Des craintes ont été exprimées. Elles vont parfois dans des sens contraires. M. Demotte redoute une augmentation du nombre d’étudiants belges. Les hautes écoles craignent de se retrouver en difficulté, faute d’un nombre suffisant d’étudiants. On peut en déduire que les craintes du ministre, si elles se concrétisent, peuvent être une source d’apaisement pour les hautes écoles !

Les inquiétudes sont nombreuses, mais on peut créer les conditions pour les faire disparaître. Vous-même aviez reconnu, lors de votre question du 14 février, que le nombre excessif d’étudiants dans certains cursus engendrait une situation préoccupante. Vous reconnaîtrez à tout le moins que je me suis attaquée à un problème en souffrance depuis des années, auquel personne n’a encore apporté de solution satisfaisante.

Il est du devoir d’une ministre, d’un gouvernement et d’un parlement, de veiller à la sauvegarde de son enseignement au profit de ses étudiants, tout en préservant une qualité et une mobilité qu’on est loin de supprimer aujourd’hui. Nous parlons d’un quota de 30 %, c’est-à-dire douze fois plus que la moyenne européenne.

Selon les statistiques en effet, le nombre d’étudiants qui étudient en Europe dans un autre pays que le leur, est de 2,5 %. Selon l’OCDE, la Belgique, et singulièrement la Communauté française, est le quatrième pays qui accueille le plus d’étudiants étrangers, avec un pourcentage de 10 à 11 % toutes disciplines confondues. C’est une bonne chose et nous souhaitons maintenir cette ouverture de notre enseignement, qui est aussi un enrichissement. Mais il faut aussi se montrer responsables et limiter l’afflux d’étudiants étrangers, dont la majorité provient en outre d’un des plus gros états européens.

À partir du moment où un projet de décret est connu, tout le monde s’empresse de tirer son épingle du jeu et de s’inscrire avant que le texte ne soit en application. C’est pourquoi nous avons volontairement bloqué les inscriptions afin que tout le monde soit sur un pied d’égalité.

Je comprends les inquiétudes ; elles surgissent dès que l’on modifie quelque chose. Mais les changements se feront le plus progressivement possible.

D’abord, le projet n’a pas pour but de faire des économies. L’enveloppe générale des hautes écoles sera maintenue. Mathématiquement, il n’y a pas de pertes d’emplois et l’on pourra toujours engager le même nombre d’enseignants. De plus, comme l’année dernière, j’ai prévu cinq millions pour faire face à l’augmentation des populations étudiantes.

Certains affirment qu’il y aura des licenciements à la prochaine rentrée. C’est faux ! L’enveloppe des hautes écoles est calculée sur la base du nombre d’étudiants des trois années précédentes. Elle est donc connue dès aujourd’hui, indépendamment de l’avant-projet de décret. En d’autres termes, même si le décret entre en vigueur et si le nombre des étudiants non résidants en première année est réduit à 30 %, les affectations budgétaires pour la prochaine rentrée ne seront pas modifiées. Pour 2006-2007, chacune des 29 hautes écoles connaît déjà le montant dont elle disposera. La perte annoncée de mille étudiants dans certaines hautes écoles ne commencerait à se faire sentir qu’en 2007-2008 et de manière tout à fait partielle. En effet, contrairement à ce que j’ai entendu, les étudiants qui sont chez nous pourront rester et terminer leur cursus. De surcroît, les éventuels redoublants pourront recommencer chez nous puisqu’ils ne seront pas des primo-inscrits. La mesure envisagée est extrêmement souple. Comme l’a signalé M. Fontaine, ne seraient renvoyés que des étudiants français qui n’étaient pas acceptés au départ et se trouvaient dans une situation de non-droit.

Je résume. L’allocation pour l’année prochaine ne changera pas et peut déjà être connue. Pour l’année suivante, l’allocation diminuera au maximum de 30 % en première année. Les autres étudiants, en deuxième et troisième baccalauréats, seront toujours comptabilisés. Le processus est donc extrêmement progressif afin de permettre à chacune des hautes écoles de s’adapter à la situation, soit en augmentant l’encadrement pédagogique, soit en remplissant certaines missions qu’il leur est actuellement difficile de mener par manque de personnel.

Enfin, puisque nous travaillons dans une enveloppe fermée, chaque étudiant non-résidant qui vient en Communauté française, prend un morceau de la part destinée à l’ensemble des étudiants. Chaque étudiant supplémentaire fait baisser la moyenne de tous, résidants ou non. En agissant de la sorte et en maintenant un seuil de 30 % qui n’existe nulle part, nous augmentons la qualité au bénéfice de l’ensemble des étudiants en Communauté française. J’entends bien que certaines régions transfrontalières se sentent particulièrement visées. Le critère que nous avons utilisé concerne tout le monde dans toutes les régions. On trouve des étudiants non résidants aussi bien à Namur qu’à Liège ou à Bruxelles. Pourquoi toutes les régions sont-elles concernées ?
Parce que nous avons établi des pourcentages d’étudiants non résidants pour toute la Communauté française. Si nous ne l’avions fait que pour certaines hautes écoles, nous aurions pénalisé les écoles des régions transfrontalières.

En kinésithérapie, dans l’ensemble de notre Communauté, on compte 78 % de non-résidants.

Ce ne sont donc pas uniquement les hautes écoles de Tournai ou de Mons qui font gonfler les statistiques. Nous rencontrons cette situation sur l’ensemble de la Communauté française. Aussi il est responsable de se demander si la mission de la Communauté française est de former 78 % d’étudiants étrangers. En médecine vétérinaire, où la situation est connue depuis longtemps, nous pouvons déjà constater les effets pernicieux de ce déséquilibre : seuls 34 étudiants belges sont inscrits en première du baccalauréat. Combien serontils en fin de parcours ?
En poussant le raisonnement, devons-nous continuer à fournir cet enseignement s’il ne reste que des étudiants étrangers ?
Ne devons-nous pas réorienter les hautes écoles vers le public qui répond aux objectifs du gouvernement de la Communauté française et que partagent l’ensemble des partis ?
Les hautes écoles doivent avoir comme priorité la formation d’un maximum de jeunes de la Communauté française.

Le projet permet une présence de 30 %, accompagnée de mesures de sauvegarde sur lesquelles je reviendrai plus tard. Les écoles dépendantes à ce point de décisions d’un gouvernement étranger, sur lequel nous n’avons aucune prise, seraient d’autant plus vulnérables face à une éventuelle modification du numerus clausus dans le pays en question. Notre intention n’est donc pas d’interdire mais de rééquilibrer cette situation. Avec ce projet, nous maintenons un enseignement ouvert.

Par ailleurs, les étudiants non européens suivent chez nous le second ou le troisième cycle. Or, la mesure ne vise que le premier cursus. Nous aurons l’occasion de nous étendre sur la question lors des débats parlementaires. Néanmoins, je souhaite déjà vous proposer quelques éléments de réponse. Les étudiants belges qui sont partis faire un an d’études à l’étranger ou ceux dont les parents résidant à l’étranger, ne perdent pas leur libre accès à notre enseignement. Ils ne sont évidemment pas considérés comme non résidants. C’est également le cas des étrangers, souvent européens, qui ont acquis le droit d’établissement après cinq ans de vie sur le territoire ou des non-Européens qui bénéficient d’une bourse dans le secteur de la coopération au développement.

Le projet vise aussi les inscriptions au premier cycle du cursus. Si nous avions uniquement réduit les inscriptions à la première année d’étude, les étudiants non résidants français seraient entrés chez nous par d’autres filières pour prendre ensuite des passerelles. Cela ne serait ni égalitaire ni juste.

Que peuvent faire les hautes écoles au-delà du taux de 30 %?
Non seulement l’étudiant est déclaré non finançable mais il ne pourra pas être inscrit. Nous réfléchissons à un moyen de tenir compte d’erreurs administratives afin de ne pas pénaliser les étudiants. Nous en sommes au stade des consultations.

Vous me demandez d’ouvrir les yeux au sujet de l’affirmation selon laquelle les hautes écoles ne doivent jamais refuser un étudiant belge. Certains étudiants français ont sans doute déjà été refusés. En outre, des étudiants m’ont signalé avoir eux-mêmes été refusés et avoir dû se diriger vers une autre haute école située plus loin de chez eux. D’autres n’ont pu faire face aux déplacements et aux coûts supplémentaires.

Je crois qu’il nous faut, à notre tour, ouvrir les yeux. En kinésithérapie, certaines hautes écoles déclarent être submergées de demandes d’inscription pour l’année prochaine. Comment allons nous procéder alors qu’aucune base juridique ne nous permet de refuser un étudiant belge ou un étudiant étranger ?
Comment allons-nous organiser ces études ?

En ce qui concerne les accoucheuses, nous constatons la difficulté d’organiser des stages. Le nombre de naissances en Communauté française s’avère relativement fixe. Si nous voulons bien former les accoucheuses, il serait souhaitable de pouvoir leur offrir plus de pratique. Dans certains cas, des étudiants retournent effectuer leur stage à l’étranger, à plusieurs centaines de kilomètres de la haute école qu’ils fréquentent. Cet état de fait ne permet pas à leurs enseignants de les suivre dans leur formation alors qu’ils sont disséminés, le cas échéant, hors de la Communauté française.

Lorsque vous déclarez que le critère décisif devrait être le nombre de places, j’attire votre attention sur le fait que nous entrerions ainsi dans une logique de numerus clausus. Peu importe que ce nombre soit élevé ou restreint. Je crois que le critère de sélection doit être la qualité. C’est elle qui doit nous guider. Ce critère doit tenir compte des capacités de financement de la Communauté française. Ces capacités ne sont pas illimitées, et nous le savons. Nous ne pouvons donc pas non plus demeurer des observateurs inactifs d’une situation où les étudiants ne cessent d’augmenter.

Si le nombre d’étudiants continue à augmenter – et aucun signe n’indique que cette évolution va s’arrêter – en raison de l’affluence d’étudiants étrangers empêchés de s’inscrire chez eux, à quelques centaines de kilomètres, cet accroissement mettra en péril la qualité de notre enseignement dans les filières en augmentation ainsi que dans l’ensemble de l’enseignement. Vous savez sans doute que le financement du cursus d’un étudiant varie de 18 000 à 93 000 euros. Ce n’est pas rien. Nous ne pouvons rester totalement inattentifs à la qualité de notre enseignement.

Je pense qu’il faut absolument se montrer responsables : sur quatre kinésithérapeutes que nous formons, trois retournent en France. Par ailleurs, je ne dispose évidemment d’aucune statistique sur le nombre d’étudiants qui auraient vu leur inscription refusée.

Le projet du gouvernement est de cibler les filières où les taux d’étudiants étrangers sont très élevés pour l’ensemble de la Communauté française. Dans certaines régions transfrontalières, le pourcentage d’étudiants français dépasse les 50 % sans atteindre les seuils critiques pour le reste de la Communauté. Ces filières ne sont donc pas visées. L’objectif est de préserver la qualité de l’enseignement sur tout le territoire.

Il existe une série de mesures alternatives. Les concours ne fonctionnent pas, comme l’ont montré ceux de médecine vétérinaire. Le fonds de compensation bilatéral n’a jamais abouti. Ce type de problème ne concerne que l’Autriche et la Communauté française de Belgique. Mes collaborateurs ont eu de nombreux contacts avec l’Union européenne à Vienne et à Bruxelles et j’ai moi-même rencontré ma collègue autrichienne. C’est ainsi que nous avons choisi ce critère de 30 % pour l’ensemble de la Communauté française. En effet, quand ce taux est atteint, cela signifie que la France a mis en place un numerus clausus. Des problématiques françaises sont donc exportées en Communauté française.

Le cas de la médecine vétérinaire est acquis. Nous avons étendu cette limitation à d’autres disciplines où la situation est semblable. Dans les études paramédicales, un numerus clausus très strict en France fait augmenter le pourcentage d’étudiants français en Communauté française. Nous ne pouvons former de manière illimitée des étudiants étrangers sans mettre en péril la qualité de notre enseignement.

Cette problématique est extrêmement sensible. Néanmoins, conçu et libellé tel qu’il est, l’avant-projet de décret peut répondre aux exigences de l’Union européenne même si celle-ci ne nous donne pas son blanc-seing. Ce projet apporte une solution proportionnée en visant certaines filières pertinentes et en poursuivant un objectif général de qualité et de santé publique incontestable.

Il est difficile de prévoir précisément les emplois menacés par cette mesure. Certains me disent qu’aucun enseignant ne sera mis en disponibilité, et c’est tant mieux. Nous avons prévu deux dispositifs de sauvegarde car nous sommes conscients que cette mesure, même très progressive, doit être accompagnée : solidarité des mises à disposition éventuelles – ces coûts relèveront de l’enveloppe générale et non pas de celle de la haute-école – et activation de fonds de solidarité pour les situations particulièrement difficiles. J’espère que certaines filières retrouveront de l’intérêt auprès de nos étudiants. Notre mission est de former davantage de nos jeunes dans l’enseignement supérieur, de rendre celui-ci plus attractif et de veiller à la réussite. Aujourd’hui, il est dangereux de dépendre d’un gouvernement étranger qui peut défaire, demain, ce qu’il a créé, comme par exemple supprimer ou ajouter un concours dans certaines disciplines.

Notre proposition sera équilibrée et progressive : accepter 30 % dans une mobilité de 2,5.

Philippe Fontaine (MR).
– Madame la ministre, vos réponses m’ont laissé sur ma faim.

Il me semble que vous avez mélangé plusieurs problèmes : celui de la faculté de médecine vétérinaire où se pose un réel problème de qualité de l’enseignement et celui de la rationalisation des hautes écoles.

Vous avez choisi d’affronter la difficulté en vous attaquant à la question des étudiants étrangers, et plus spécifiquement des Français. Cela ne me paraît pas la bonne manière.

Les 30 % qui manqueront aux hautes écoles, et plus particulièrement à celles du Hainaut et à celles dispensant des études de kinésithérapie, vont les mettre dans une position intenable. Elles seront tentées d’attirer des étudiants belges, ce qui créera un nouveau problème de pléthore.

Ne serait-il pas plus judicieux de se demander combien d’écoles de kinésithérapie il convient d’avoir ?
Il faut aborder ce problème clairement. Or, ce n’est pas ce que vous avez fait. Vous nous dites que l’enveloppe globale sera maintenue et le nombre d’emplois également. Je ne vois pas comment vous allez reconvertir des docteurs en kinésithérapie en professeurs dans les écoles d’ingénieurs industriels. Vous ne nous avez pas dit ce qu’allaient devenir ces enseignants.

Marie-Dominique Simonet.
- J’ai répondu à cela.

Philippe Fontaine (MR).
– Je ne pense pas que les intéressés se contentent de ce genre de réponse.

Je voudrais également insister sur le fait que la qualité n’est pas fonction du nombre d’étudiants étrangers dans les hautes écoles. C’est peut-être vrai pour la faculté de médecine vétérinaire, mais ça ne l’est absolument pas pour l’ensemble des hautes écoles.

Je ne vous ai pas non plus entendue sur les conséquences économiques que l’exclusion d’un certain nombre d’étudiants étrangers pourrait engendrer à terme.

En conclusion, j’estime que le problème a été mal abordé. En revoyant le quota d’étudiants étrangers, nous faisons exactement ce que fait la France, à savoir un repli frileux sur nous-mêmes à une époque où nous avons besoin d’ouverture, où ces étudiants sont nos ambassadeurs dans leur pays. Chercher à persuader les Français de faire quelque chose n’est peut-être pas une bonne idée.