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La destruction des chats harets...
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Question orale de Philippe Fontaine, Député wallon, à Benoit Lutgen, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme, concernant :
« La destruction des chats harets »
Monsieur le Ministre,
Le chat haret est un chat domestique retourné à l’état sauvage par marronnage, phénomène par lequel des animaux domestiques relâchés ou échappés forment des populations vivant partiellement ou totalement à l'état sauvage. Il peut avoir connu la vie auprès des hommes ou bien être né dans la nature. Il n'en reste pas moins un chat domestique.
La différence entre le chat domestique proprement dit et le chat haret est donc uniquement éthologique mais ne doit notamment pas être confondu avec le chat sauvage.
En Région wallonne, pour des raisons de protection des chats forestiers, la loi sur la chasse autorise la régulation des chats « harets » pour éviter notamment le croisement entre les deux espèces ce qui menacerait directement la survie du chat forestier qui est une espèce protégée en voie de disparition.
Mes questions sont les suivantes Monsieur le Ministre :
- Le chiffre moyen de cinq chats détruits par les chasseurs est avancé soit près de 80.000 destructions par an. Ces chiffes sont-ils exacts ?
- Dispose-t-on de statistiques fiables à ce sujet ?
- Les chasseurs déclarent-ils systématiquement les destructions ? Doivent-ils le faire ? Combien de déclarations correspondant à combien de chats harets détruits ont été faites ?
- Les modalités de destruction de certaines espèces de gibier relèvent de l’AGW du 18 octobre 2002. Une autorisation est nécessaire pour toute destruction. Est-ce aussi le cas pour les chats harets ?
- Leur influence négative sur la régulation des autres espèces (oiseaux, rongeurs, etc) et sur la biodiversité de la faune a-t-elle été avérée au travers d’éventuelles études ? Lesquelles et avec quels résultats ?
- Ne peut-on pas, chez les chasseurs, soupçonner de vouloir éviter une certaine concurrence avec les chats qui les priveraient d’une partie de leur réserve de chasse (oiseaux et petits gibiers) ?
- Pour sa part, le chat sauvage est un animal protégé au niveau européen depuis 1979. Pour beaucoup de spécialistes, cet animal est considéré comme un indicateur de biodiversité et comme régulateur des populations de rongeurs dans les forets et sous bois. Après une longue absence, notre région abrite à nouveau quelques spécimens de cet animal rare. La destruction du chat haret ne porte-t-elle pas préjudice à la re-colonisation des bois par cet animal ?
- Des cas de destruction de chats sauvages ont-ils été constatés ? Pouvez-vous me donner quelques chiffres ?
Merci des réponses que vous voudrez bien me donner.
Réponse du Ministre Benoit Lutgen,
– Je vous
remercie pour votre correction des chiffres.
Il n'existe pas d'obligation légale de déclarer la destruction de chats harets dans notre Région. Les données
dont je dispose sont donc très partielles.
Une autorisation spécifique de régulation du chat haret est obligatoire uniquement lorsqu'il est fait usage de
piègeages. Des études menées en Grande-Bretagne et aux États-Unis mettent clairement en évidence l'impact très
négatif des chats harets sur la faune sauvage, notamment sur des espèces en voie de disparition. Une étude de
l'Université de Bristol, menée sur 1.000 chats domestiques vagabondant à leur guise, a montré qu'ils avaient
tué, en cinq mois, quelques 14.000 animaux sauvages. Une extrapolation sur les huit millions de chats
domestiques recensés sur les îles britanniques donnent des chiffres ahurissants. Il est clair que la prédation du
chat haret est un facteur aggravant pour certaines espèces. Les chats harets seraient notamment une des causes de
raréfaction du moineau dans les villes comme Bruxelles.
Des extrapolations ont aussi été faites au niveau de la Région pour éclaircir la situation. Nous devons mettre
l'accent sur une politique de restauration des habitats et sur l'aménagement. Nous avons procédé de même avec
le projet « moules perlières » concernant une espèce très sensible. Telle est la priorité absolue sur le plan de la
préservation de la biodiversité. Nous maîtrisons peu certains facteurs comme le réchauffement climatique ou la
dégradation des sols, et il y en a d'autres contre lesquels nous pouvons prendre des mesures. Le chat haret en
fait partie.
Le chat haret et le chat sauvage ne peuvent être confondus. La morphologie est différente, tout comme le
comportement. Alors que le chat sauvage va tuer pour se nourrir de sa proie, le chat haret va tuer beaucoup
d'animaux et n'en consommer que quelques uns. Le risque de confusion est limité.
Concernant certains soupçons, par rapport aux chasseurs, cela me semble injustifié. La régulation du chat
haret permet d'éviter la propagation de certaines maladies telle la rage ou l'echinococcose.
Heureusement, le chat sauvage est plus fréquent aujourd'hui. Les individus victimes du trafic routier montre
que cette espèce n'est pas aussi rare qu'on aurait pu le penser. Son air de répartition progresse lentement vers le
Nord et l'Ouest.
Le croisement entre les chats harets et les chats sauvages est à éviter puisque celui-ci donne des chats
hybrides. Les risques de confusions sont limités en la matière mais la confusion génétique pourrait amener à
une disparition de l'espèce des chats forestiers encore malgré tout très fragile.
M. Philippe Fontaine (MR). – Je remercie M. le Ministre pour sa réponse. Je pense que l'origine du
problème ne se situe pas véritablement dans les forêts mais plutôt dans nos villes.