Question orale de Philippe Fontaine, Député wallon, à Jean-Claude Marcourt, Ministre de l'Economie, de l'Emploi, du Commerce extérieur et du Patrimoine, concernant :
« L’interventionnisme du Ministre dans le règlement du conflit à la SONACA »
Monsieur le Ministre,
Le 12 mars dernier, la SONACA partait en grève suite à l’annonce de la délocalisation d’une partie des activités vers la filiale brésilienne du groupe aéronautique. Les responsables de l’usine de Gosselies annonçaient alors que les bords d’attaques des EMBRAER 170 et 190 seraient entièrement assemblés au Brésil.
Depuis la grève s’est achevée après dix jours d’arrêt de travail. Les ouvriers ont repris le travail après avoir obtenu une suspension de la délocalisation d’une partie des activités vers la filiale brésilienne, une prolongation de la garantie du maintien de l’emploi d’un an et la garantie du maintien d’un minimum de 1500 emplois jusque 2010.
Cette grève coûtera cher malgré tout puisque le mouvement de grève a entraîné des dizaines de milliers d’heures de retard qu’il faudra combler par des heures supplémentaires payées à 150% ce qui est mal venu dans une entreprise qui délocalise pour raison économique.
Par ailleurs, il convient de regretter l’impact négatif en terme d’image des grèves à répétition que connaît l’entreprise (dont la région est l’actionnaire principal !). On est loin de la « paix sociale » annoncée par le Ministre-Président lors de son entrée en fonction.
Mes questions sont les suivantes Monsieur le Ministre :
- La Région wallonne est actionnaire à 98% dans la SONACA mais l’autonomie de gestion et de décision du Conseil d’administration est en principe garantie. Doit-on considérer que par votre intervention dans le règlement du conflit que le CA de la SONACA est totalement ou partiellement désavoué et qu’en est-il de l’autonomie de gouvernance de la SONACA ?
- Pouvez-vous me dire qu’elles ont été les réactions du CA dans ce contexte ?
- Doit-on se laisser aller à tirer les conclusions qui s’imposent et s’attendre à un renouvellement à la tête de la SONACA ?
- Où en est l’étude sur le repositionnement stratégique de la SONACA ? Quelles sont les premières conclusions de cette dernière ?
Merci des réponses que vous voudrez bien me donner.
Réponse du Ministre Jean-Claude Marcourt,
– J'ai informé les organisations syndicales, en décembre 2007, que j'avais décidé d'initier une
démarche de réflexion stratégique quant au positionnement de la SONACA dans son secteur.
L'annonce de cette réflexion stratégique et d'une éventuelle recherche de partenariat a été bien acceptée par les
organisations syndicales. Celles-ci ont toutefois attiré mon attention sur la nécessité d'éviter tout processus de
délocalisation.
À la même époque, la direction de l'entreprise déposait devant le Conseil un proposition de délocalisation
des bords d'attaque au Brésil, sans perte d'emploi eu égard aux augmentations de cadence dans d'autres
programmes.
Compte tenu du blocage complet de l'entreprise qui en a suivi, j'ai invité les organes de gestion à suspendre
la mise en oeuvre de la décision de délocalisation dans l'attente des résultats de l'étude concernant le plan
stratégique.
J'ai également insisté auprès de la direction pour qu'elle prenne une part active à la réalisation de cette étude.
L'ensemble des parties semblent avoir compris l'importance de cette approche et tout va être mis en oeuvre pour
avancer rapidement dans ce sens.
Je connais bien Airbus et ai récemment visité Boeing. Tous les deux sont sur le chemin de l'externalisation
de la construction et sont de plus en plus enclins à la concentration de l'assemblage. La SONACA doit s'inscrire
dans cette nouvelle configuration de la compétition.
Nous sommes donc obligés de réfléchir à la stratégie à développer et j'apporte tout mon soutien dans cette
perspective. Nous connaissons aujourd'hui une explosion considérable du nombre des avions construits, mais
parallèlement, le coût de production des avions diminue.
Nous devons donc trouver une solution pour que les travailleurs restent à Charleroi tout en veillant à
développer la compétitivité.
M. Philippe Fontaine (MR). – Le problème, dans un dossier comme celui-ci, est de savoir qui prend
finalement la décision. Est-ce le Ministre ou le conseil d'administration ? De l'extérieur, on a l'impression que
c'est le Ministre et cela pose question au regard de la gouvernance des entreprises à actionnariat public.
Je comprends la difficulté à expliquer les choses aux travailleurs. Ils ont été habitués à des restructurations
régulières. Il y a toujours eu et il y aura toujours des hauts et des bas dans le domaine aéronautique. La
difficulté est de le faire comprendre et de faire en sorte qu'une activité reste sur le site de Charleroi.
J'attends comme vous l'étude de repositionnement stratégique. La décision est aujourd'hui suspendue en
attente de cette étude. Je souhaite que tout le monde soit assez patient pour attendre. S'il faut un
repositionnement stratégique, il y aura des efforts à faire de part et d'autre.