Parlement wallon

Questions orales

     

 Questions du 04/03/08

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 La surpopulation de gibier en Région wallonne ...

Question orale de Philippe Fontaine, Député wallon, à Benoit Lutgen, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme, concernant :
« La surpopulation de gibier en Région wallonne »


Monsieur le Ministre,
La forêt wallonne s’étend sur 550.000 ha et serait promise à une amélioration de sa gestion grâce à la réforme du code forestier adopté en première lecture par le gouvernement wallon.

Nos forêts renferment une faune riche et variée et notamment un abondant gibier.
Les sangliers et cervidés sont en effet en nette surpopulation au point de déréguler l’équilibre général.
Les effectifs de cervidés auraient doublé et ceux du sanglier auraient triplé selon l’association de protection de la nature, Natagora.
Ainsi, les forêts wallonnes compteraient pas moins de 40.000 chevreuils, 20.000 sangliers et plus de 10.000 cerfs.
Il semblerait donc que de telles populations soient excessives pour la surface de forêts dont nous disposons en Région wallonne.

La forêt wallonne est aussi le terrain des chasseurs qui, pour se garantir un gibier de qualité maintiendraient les animaux dans de trop bonnes conditions par un nourrissage excessif qui dépasse le nourrissage dissuasif destiné à éviter que le gibier ne cause des dégâts aux cultures.
Le résultat serait donc à l’inverse de l’effet recherché dans ce cas précis puisque la surpopulation entraînerait quand même des dégâts aux cultures en plus de détruire la forêt.
En effet, les cervidés s’attaquent de manière excessive aux écorces des arbres, condamnant à mort bon nombre d’entre eux ou les exposant davantage aux maladies.
Les sangliers eux s’attaquent aux œufs des oiseaux qui nichent au sol ou encore aux bulbes.

Mes questions sont les suivantes Monsieur le ministre :

- Confirmez-vous la surpopulation de gibier dans les forêts wallonnes ainsi que les chiffres donnés par Natagora ?
- De tels chiffres de population mettent-ils effectivement la forêt wallonne en danger ?
- Existe-t-il des mesures des dégâts causés par cette surpopulation ? Sur la faune ? Sur la faune ?
- Est-il exact que le nourrissage excessif du gibier par les chasseurs pour s’assurer des quotas de chasse importants est la cause de cette surpopulation ?
- Le nouveau code forestier semble ne rien prévoir pour tenter de limiter la surpopulation de gibier. Pourquoi ? Limiter le nourrissage, réglementé par le décret chasse, est-il la seule solution ?
- Disposez-vous déjà des résultats de l’étude sur le nourrissage que vous avez demandée ? Quels sont-ils ?

- Il semblerait que les quotas de bêtes à abattre ne soient pas toujours respectés par les conseils cynégétiques. Vous avez déclaré que des amendes administratives pouvaient être prises. Pouvez-vous me dire combien d’amendes administratives ont été données depuis 2004 ?

- La surpopulation de gibier a aussi des effets collatéraux. Ainsi, il semble qu’il y ait de plus en plus d’accidents de la route causé par des bêtes qui sont affolées par les battues ou qui traversent la voirie. Pouvez-vous confirmer cette accroissement ? Disposez-vous de chiffres en la matière ? Existe-t-il un lien de cause à effet entre la surpopulation et les accidents de plus en plus nombreux ? Quelles mesures avez-vous ou allez-vous prendre face à ce problème ?

- Un autre effet collatéral est la dégradation des cultures malgré les nourrissages dissuasifs. Quelques sangliers peuvent en effet littéralement labourer un champ en moins d’un nuit. Je suis bien conscient qu’augmenter le nourrissage dissuasif serait aller dans le sens du sur nourrissage pratiqué par les chasseurs mais la surpopulation poussent les animaux à se déplacer de plus en plus vers les cultures.

- Disposez-vous de chiffres permettant de se faire une idée des dégâts causés par ce déplacement vers les cultures ?
- Quelles solutions sont à l’étude pour le limiter ?
- Pourriez-vous me donner le montant qui est versé en dommages aux agriculteurs ? Sont-ce les assurances des chasseurs qui paient dans ce cas ?

Merci des réponses que vous voudrez bien me donner.
Réponse du Ministre Benoit Lutgen,
– Tout d'abord, je vous confirme les chiffres avancés par Natagora qui proviennent de mon administration. Dans plusieurs massifs forestiers, le nombre de grands ongulés sauvages dépasse largement ce qui est habituellement admis en fonction de la richesse du milieu. L'avenir de la forêt est donc compromis à certains endroits. Ce phénomène est observé dans tous nos pays voisins.

Concernant les dégâts causés, un inventaire annuel des dégâts d'écorcement est réalisé par mon administration. Si rien ne change, près d'un arbre sur deux aura été touché et déprécié dans plusieurs jeunes peuplement résineux.

Par rapport au nourrissage du sanglier, il doit être dissuasif et non pas persuasif pour éviter les dégâts. Ce n'est cependant la seule cause de l'augmentation de grands gibiers. D'autres facteurs tels que le climat y contribuent également. En effet, les hivers doux de ces dernières années y participent. Quand on est bien nourri, on se reproduit plus.

Concernant le nourrissage excessif, celui-ci est réglementé depuis 1994 au niveau de la Loi sur la chasse. Il serait donc incohérent d'introduire d'autres dispositions dans le Code forestier, d'autant plus que notre position peut évoluer d'ici quelques années.

Par ailleurs, l'étude demandée se heurte actuellement à quelques difficultés pratiques telles que l'obligation de trouver des territoires d'étude suffisamment importants dans lesquels on devrait pouvoir nécessairement tester des saisons de chasse avec et sans nourrissage.

Concernant les quotas de bêtes à réguler, je confirme que pour la saison cynégétique 2006-2007, trois conseils n'ont pas atteint les quotas de tirs minimums imposés par mon administration. La possibilité d'infliger des amendes administratives sera inclue dans le décret relatif aux infractions en matière d'environnement.

Je rappelle que concernant les sangliers, les conseils cynégétiques ont adopté certaines dispositions restrictives qui sont inacceptables car il y a beaucoup trop de sangliers en Région wallonne. Leur responsabilité est engagée dans ces cas-là.

Pour ce qui est des statistiques relatives aux accidents de la route impliquant des animaux sauvages, il n'en existe pas. Je redemanderai néanmoins à qui de droit de pouvoir en disposer. Pour régler cette problématique, la solution est évidente : il faut installer des clôtures.

Enfin, concernant l'indemnisation, les pouvoirs publics n'interviennent pas pour indemniser les dégâts causés par le grand gibier. Il appartient aux chasseurs sur le bois d'où proviennent ces animaux d'indemniser l'agriculteur. Je ne dispose pas de statistiques concernant le nombre de règlements à l'amiable ou le nombre d'affaires introduites devant le Juge de Paix. Je conseille toujours de ne pas en arriver là.

La réflexion continue, des études vont sortir. Le chasseur a un rôle de régulation tant pour la flore que pour la faune.

M. Philippe Fontaine (MR). – Même si Monsieur le Ministre prétend avoir répondu à toutes mes questions, je voudrais lui faire remarquer que je n'ai pas obtenu de réponse quant au nombre d'amendes administratives infligées depuis 2004.

Je pense qu'il faut effectivement que les différents acteurs qui ont une responsabilité jouent leur rôle dans le système de régulation du gibier si on ne veut pas courir à la catastrophe.

Vous n'ignorez pas que je suis souvent un ardent défenseur des animaux mais il faut le faire de manière raisonnée et raisonnable.

Il est dommage de ne pas pouvoir disposer de chiffres pour certaines questions. C'est néanmoins logique car ces statistiques se trouvent ailleurs. Le secteur des assurances devrait pouvoir fournir ces statistiques car ce sont les assurances qui indemnisent. Elles ne devraient pas montrer de difficultés si elles veulent voir le nombre d'indemnisation diminuer.