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La situation de la sylviculture...
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Question orale de Philippe Fontaine, Député wallon, à Jean-Claude Marcourt, Ministre de l’Economie et à Benoît Lutgen, Ministre de l’Agriculture, concernant :
« La situation de la sylviculture en Région wallonne en général et les exportations vers la Chine en particulier »
Messieurs les Ministre,
A la fin du mois de juillet, la presse faisait état d’une situation de crise potentielle pour tous les métiers de la filière bois en Région wallonne.
Alors que la superficie forestière progresse annuellement en Europe d’un million d’hectares et que ce phénomène est également observable chez nous puisque la superficie boisée est passée de 25 à 33%, cette progression suffit à peine, semble-t-il, à couvrir les nouveaux besoins liés notamment à la hausse du coût des combustibles de chauffage et à l’utilisation croissante du bois dans la construction.
Un autre phénomène, apparemment plus inquiétant, préoccupe particulièrement le secteur : il s’agit de l’achat massif par des importateurs chinois de plusieurs essences de feuillus de nos Ardennes et particulièrement le chêne et le hêtre qui sont envoyés en tronc vers la Chine pour revenir chez nous manufacturés.
Le phénomène serait déjà à ce point important que certaines scieries ont dépassé le stade de craindre une pénurie de travail et en sont à tourner à capacité réduite.
Une pénurie semble même annoncée en Europe dans quelques années correspondant à 60% des besoins de la filière bois traditionnelle.
Mes questions sont les suivantes Messieurs les Ministres :
- Pouvez-vous d’abord me confirmer que la superficie forestière wallonne est bien en augmentation constante et quel est son ordre de grandeur ?
- Quelle est la fréquence et le volume de plantation ?
- Pouvez-vous me préciser s’il est envisageable de contrer la tendance amorcée par un programme de reforestation plus important en Région wallonne ?
Il semble que des politiques qui s’entrechoquent, toutes honorables prises séparément, soient en partie responsables de la situation actuelle et de son évolution défavorable au secteur.
Concilier 20% d’énergie renouvelable, grande consommatrice de bois, un marché qui évolue et qui se mondialise, les cours locaux du bois et le maintien de l’emploi dans le secteur est le véritable enjeu.
Vous avez annoncé la création de l’Office wallon du bois pour réagir à cette situation.
- Pouvez-vous m’expliquer quelles seront les lignes de force de l’Office ?
- Qui le composera ?
- Quelle sera la portée de ses responsabilités ?
- Comment sera-t-il articulé avec l’Europe qui prend aussi un certains nombres de décisions en la matière ?
L’Afrique a interdit l’exportation d’arbres et la Russie impose des taxes très élevées.
J’ai bien conscience que la réalité européenne ne laisse sans doute pas beaucoup de marges de manœuvre.
- Cependant, avez-vous fait un inventaire des mesures prises par d’autres pays européens en la matière ?
-Quelles mesures économiques concrètes peuvent être prises pour éviter de « vider » la Wallonie de ses plus belles essences d’arbres ?
- Existe-t-il des mesures spécifiques à prendre en cas de constat manifeste de tentative de déstabilisation d’un marché ?
- Quelles sont-elles ? Sont-elles applicables en Wallonie ?
Le secteur de la sylviculture, de l’exploitation forestière et services annexes représente plus de 2000 entreprises en Wallonie, 2109 exactement en 2005, mais est en forte régression puisqu’il y en avait encore 2573 en 1998.
Plus spécifiquement et à titre d’exemple, il y a quelques 150 scieries en Wallonie qui procurent de l’emploi à 3000 personnes et la filière bois emploie 15.000 personnes.
- Pouvez-vous me préciser les conséquences des exportations massives de bois wallon sur les scieries en terme d’emplois aujourd’hui ?
- Pouvez-vous me préciser l’évolution des exportations et des importations de bois en Région wallonne sur ces 5 dernières années ?
-Il serait en effet assez surréaliste de devoir importer du chêne français ou américain tandis que notre bois part en Chine !
Merci des réponses que vous voudrez bien me donner.
Réponse des Ministres Jean-Claude Marcourt et Benoît Lutgen,
– Je comprends vos inquiétudes sur l'évolution du marché mondial du bois.
Comme vous l'indiquez, la surface forestière a considérablement augmenté depuis la fin du 19ème siècle.
Aujourd'hui, cette surface est estimée à 33 % du territoire wallon et reste stable. En ce qui concerne les volumes
de bois sur pied, ils sont en constante augmentation. Les surfaces régénérées par plantation et par semis naturels
sont respectivement de 3.375 ha par an en feuillus et de 3.936 ha par an en résineux.
Vu la densité de population sur le territoire wallon et les besoins actuels en surface agricole, il est fort peu
réaliste de penser à des programmes de reforestation massive des zones agricoles.
Le commerce du bois est devenu mondial et on assiste à son augmentation dans un contexte global de
soutien du prix des matières premières. Peu de mesures de protectionnisme peuvent être prises ou sont prises
actuellement au niveau européen car elles faussent les règles du marché de la concurrence. On ne peut que
regretter que le principe de concurrence soit aussi absolu et que l'on ne puisse aménager certains tempéraments.
Il est difficile de préciser les mouvements d'importation et d'exportation du bois. Nous pouvons toutefois
déduire de notre capacité annuelle de transformation du bois (dix à onze millions de mètres cubes) et la
production annuelle wallonne (quatre millions de mètres cubes) que six à sept millions de mètres cubes
viennent d'autres pays.
Ici se termine la contribution de M. Lutgen à notre réponse commune.
Effectivement, la situation actuelle est préoccupante pour nos entreprises actives dans le domaine du bois.
Ce constat, je l'ai fait dès mon arrivée au Gouvernement en 2004.
J'ai donc lancé une large concertation avec les acteurs économiques du secteur pour définir la structure d'une
politique industrielle à mettre en place. Une première étape a été franchie en juin 2006 en créant la Financière du
Bois. Il s'agit d'une association entre la Région wallonne et Investsud pour créer un fonds de capital à risque
doté de trois millions d'euros de moyens financiers nouveaux. La Financière du Bois a pour mission spécifique
de fournir des moyens financiers aux entreprises de la filière bois pour leur permettre d'investir, d'innover et se
développer sereinement.
La deuxième étape a été franchie en juillet 2007, date à laquelle le Gouvernement m'a confié la mission de
mettre en place un office économique wallon du bois. Il sera chargé de développer une stratégie transversale de
développement de l'industrie du bois de l'amont vers l'aval.
Cet acteur fédérateur aura pour mission la mise en place d'une politique de développement économique du
secteur du bois en Wallonie.
C'est par la coordination et l'harmonisation des actions spécifiques dans le secteur du bois que le
Gouvernement entend concentrer et optimaliser l'ensemble des ressources humaines et financières.
Il ne faut pas oublier que toute stratégie régionale devra également s'intégrer dans un contexte globalisé et
européen.
M. Philippe Fontaine (MR). – Je remercie M. le Ministre pour sa réponse. Je constate que M. le Ministre
partage mes préoccupations et mes inquétudes. C'est un domaine où il convient de conserver l'emploi tout en
respectant les règles en la matière. La mise en place de vraies filières bois constitue une piste importante —
sinon la seule — à suivre..