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L’exploitation du grisou wallon par...
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Question orale de Philippe Fontaine, Député wallon, à André Antoine, Ministre du Logement, des Transports
et du Développement territorial, concernant :
« L’exploitation du grisou wallon par la société boraine de fabrication d’engrais Kemira »
Monsieur le Ministre ,
Vous connaissez mon intérêt pour les énergies renouvelables depuis un moment déjà. Qu’il s’agisse de
l’installation d’éoliennes verticales ou horizontales, la création de centres de biométhanisation, le
placement de panneaux solaires ou l’exploitation du méthane dans les anciens puits de mine, je n’ai plus à
vous convaincre que ces alternatives aux énergies traditionnelles sont pour moi des solutions à envisager
sérieusement.
Le 02 octobre 2006, je vous rappelais l’énorme potentiel, estimées à 200 gigamètres cube de ce qu’il convient
d’appeler bio-gaz. L’apport d’énergie renouvelable issu de son exploitation serait considérable, on l’estime
à 10.000 mégawatts.
Le bio gaz serait aussi plus propre et réduirait les émissions de gaz à effet de serre. De plus ce n’est pas
un gaz fossile, puisqu’il est produit lors de la transformation de la matière organique en charbon, il s’agit
donc bien d’une source d’énergie renouvelable. Ce bio-gaz ou grisou a toujours été un problème par sa
dangerosité, y compris après la fermeture des puits puisqu’il a pu alors s’accumuler dans les puits et faire
courir un risque aux zones de surface dont certaines ont été réaffectées en quartiers résidentiels, zoning
ou autre.
Je vous demandais surtout pourquoi vous pensiez ne pas devoir soutenir l’exploitation du grisou. Vous me
répondiez que « plusieurs spécialistes consultés à ce sujet se montraient dubitatifs d'une telle
exploitation ». Quant à l’octroi de certificats verts à ce type de production, vous me répondiez qu’il n’en
était pas question considérant que le grisou n’est pas une énergie renouvelable. Je pense qu’en réalité la
vraie raison est ailleurs.
Nous ne savons pas si les Australiens viendront ou pas exploiter ce bio-gaz sur notre territoire wallon, soit,
mais cette fois c’est bien une société wallonne de fabrication d’engrais, Kemira à Tertre, qui a de gros
besoin en gaz qui s’intéresse de très près à l’exploitation du grisou. La consommation annuelle de Kemira
s’élève en effet de 2 à 3% de la consommation nationale ce qui représente 15 millions de giga-joules par an.
La volatilité du marché du gaz fragilise l’entreprise qui devient dépendante de sa matière première et rend
les actionnaires finlandais attentifs aux perspectives de rentabilité long terme de leur site borain.
De plus, sans rentrer dans des détails techniques, Kemira veut faire coup double en envisageant d’exploiter le
grisou puisqu’il injecterait le CO² qu’il rejette dans le sol afin de faire remonter sous pression le méthane
qui sert à la production, le CO² se fixant sur le charbon.
Mes questions sont les suivantes Monsieur le Ministre :
- Les études concernant la pertinence de l’exploitation du grisou commencent à s’accumuler et vous devriez
disposer des résultats de celle confiée à l’Office des Investisseurs Etrangers. Mais il y a aussi celles
réalisées par les candidats investisseurs eux-même qui vont dans le même sens. Pouvez-vous me préciser les
éléments sur lesquels vous vous appuyez pour justifier le peu d’intérêt qui est le vôtre pour ce type
d’exploitation ?
- N’avez-vous pas l’impression de ramer à contre courant, ce qui n’est pas votre habitude, du moins dans le
domaine des énergies renouvelables ?
- L’entreprise Kemira qui voit en cette exploitation une opportunité aussi de survie pense pouvoir bénéficier
de certificats verts et donc de rentrées financières. L’investissement nécessaire à l’exploitation du grisou
n’est en effet pas confidentiel. Quelle est votre position actuelle en cette matière ?
Merci des réponses que vous voudrez bien me donner.
Réponse du Ministre André Antoine,
– Tout projet
qui concourre à la production énergétique m'intéresse, même si je ne suis compétent que pour les énergies
renouvelables. Le reste concerne mon Collègue, le Ministre Verwilghen.
Après avoir contacté l'OFI, qui ne dépend pas des matières dont j'ai la charge, il s'avère qu'aucune étude n'a
été commanditée par l'OFI, mais que des contacts ont été pris par cet organisme avec une société australienne
pour envisager l'exploitation du grisou.
Toutefois, afin de juger de la pertinence économique de l'extraction du
grisou, il ne convient pas seulement de considérer le chiffre d'affaire qui en résulterait mais, au strict minimum,
la différence entre le prix de vente final et le prix d'exploitation.
Je n'ai pas du tout l'impression de « ramer à contre-courant » puisque EDORA et APERE, respectivement
fédération pour les producteurs électricité verte et l'association pour la promotion des énergies renouvelables ont,
dans un communiqué de presse, estimé que le soutien via des certificats verts à l'exploitation du grisou
fausserait et minerait le développement des véritables filières de production d'électricité verte ! Même la
CWaPE, via son président s'est prononcée publiquement dans le magazine L'Echo affirmant que « Le grisou est
un combustible fossile, c'est du charbon en phase gazeuse. Cela n'a rien de renouvelable. Il n'y a aucune
ambiguité possible ».
Enfin, l'exploitation du grisou est une activité industrielle comme une autre. Si je me réjouis de sa mise en
oeuvre comme de toute activité économique en Wallonie, je ne compte pas la permettre en augmentant la
contribution que les consommateurs industriels et les ménages paient pour soutenir l'électricité verte au travers
les certificats verts.
Cela serait pénaliser le pouvoir d'achat des ménages et mettre en danger d'autres entreprises. Le bilan sur
l'emploi et l'économie de la Région est loin d'être garanti favorablement. Ne mélangeons pas les genres !
– Il s'agit d'un
problème de rentabilité économique. Actuellement, le business plan de l'entreprise intègre les certificats verts.
Reste à savoir si les prévisions restent équilibrées sans ces derniers.
M. Philippe Fontaine (MR). – Ce dossier va incontestablement continuer à évoluer, car des entreprises
seront de plus en plus intéressées par les matières énergétiques. Il semble que le projet wallon soit plus efficient
que le projet australien et je souhaite qu'il puisse aboutir.