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Le rapprochement annoncé entre ...
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Question orale de Monsieur le Député Philippe FONTAINE à Jean-Claude MARCOURT, Ministre de l’Economie et
de l’Emploi sur:
« Le rapprochement annoncé entre DUFERCO et NMLK »
La récente fusion, largement commentée en ces lieux, d’Arcelor et de Mittal semble avoir lancé une grande
vague de concentration dans un secteur sidérurgique il est vrai particulièrement fragmenté jusqu’ici. Tout
récemment encore nous apprenions le rachat par le conglomérat indien Tata Steel du sidérurgiste
anglo-néerlandais CORUS. L’ensemble devrait ainsi devenir le numéro 5 mondial de l’acier.
Force est donc de constater, en paraphrasant un éditorialiste de la presse financière, que « le vent des
pays émergents souffle sur le monde sidérurgique ».
Aujourd’hui, c’est semble-t-il au tour de Duferco d’être approché par un sidérurgiste russe, à savoir
l’entreprise Novolipetsk Steel (NMLK). Un communiqué de la direction de Duferco précisait mi-octobre –
confirmant ainsi des rumeurs courant depuis août dernier - que les deux entreprises étaient en train de
négocier un rapprochement de leur système industriel sous la forme d’une joint-venture paritaire intégrant
les sociétés Carsid SA, Duferco Clabecq SA et Duferco la Louvière SA pour la Belgique ; Sorral SA et Duferco
transformation Europe pour la France ; Acciaierie Grigoli pour l’Italie ; et Duferco Farrell Corporation pour
les USA.
Si les syndicats se sont déclarés préoccupés par cet élargissement du périmètre, la direction du groupe s’est
voulue rassurante faisant valoir la logique sous-jacente : plus grande sécurité et meilleur approvisionnement
en brame (à meilleur marché) et consolidation financière et industrielle…. Antonio Gozzi a par ailleurs noté
que dans un contexte global de consolidation actuel, il valait mieux négocier un partenariat maintenant que
de le subir plus tard.
Des conseils d’entreprises extraordinaires étaient d’ailleurs prévus le 25 octobre dernier dans les sociétés
belges du groupe pour informer le personnel du projet de rapprochement et de ses modalités.
Au terme de près d’une décennie de présence dans notre région, Duferco figure aujourd’hui au top 5 des
employeurs industriels wallons, investit de manière importante sur notre territoire et a assuré le
redéploiement d’activités industrielles avec un succès certain. Il va donc de soi que nous nous devons de
rester attentifs à toute évolution de ses activités sur notre sol.
J’aimerais dès lors vous poser les questions suivantes :
- Disposez-vous d’informations sur le rapprochement annoncé ? Avez-vous rencontré la direction du groupe ?
- En ce qui concerne les différents engagements de Duferco, disposez-vous d’assurances de la direction ?
Quid de la rénovation du Haut Fourneau N°4 de Carsid prévue pour l’été 2007, rénovation qui coûtera 80
millions EUR, garantira l’activité pour 15 ans et portera le volume de production à 2,2 millions de tonnes ?
Quid des investissements prévus à La Louvière et qui devraient permettre au site louviérois assurer d’ici
trois ans la moitié des livraisons à l’industrie automobile ?
-De manière plus générale, le rachat d’activités situées sur notre sol par des de pays émergents pose en
corollaire la question de nos investissements sur leurs territoires. A cet égard, quels ont été les
résultats de la mission économique récente en Chine en terme de retombée pour la « Grappe sidérurgique » qui
vous accompagnait ? Quid des investissements wallons en Russie ?
Réponse du Ministre Jean-Claude MARCOURT,
– L'ONEM a
publié, ce jour, des chiffres concernant le nombre de CCI. Sur un mois, il y a une diminution de 2.844 unités
en Wallonie. Sur base annuelle, cela représente une diminution de 5.929 unités. Cela peut paraître paradoxal,
au moment où sont annoncées d'énormes réductions d'emplois. Les choses sont, en effet, souvent plus
complexes qu'il n'y paraît.
Le secteur sidérurgique connaît, depuis quelques mois, une nouvelle vague de consolidations, dans
laquelle s'est inscrite l'OPE/ OPA de Mittal sur Arcelor. L'annonce récente de rapprochement entre le groupe
Duferco et Novolipetsk Steel s'inscrit dans le cadre de ce phénomène de consolidation.
Il était sans doute souhaitable, pour Duferco, de nouer des partenariats en vue d'asseoir sa position sur le
marché sidérurgique, de plus en plus dominé par des géants. L'acier chinois représente 40 % du marché et le
groupe Arcelor-Mittal, 10 %.
Ainsi, le rapprochement envisagé offrirait :
• dans le chef de Novolipetsk Steel, de nouveaux débouchés pour sa production et l'ouverture vers le
marché de l'Europe de l'Ouest ;
• dans le chef de Duferco, une ressource stable en matière d'approvisionnement en brames et
l'acquisition d'une taille plus importante dans un marché de concentration.
Je n'ai pas pu rencontrer la direction du groupe Novolipetsk. Des représentants de la SOGEPA ont
cependant rencontré cette direction. J'ai eu des contacts avec la direction du groupe Duferco.
Nous avons pu réunir des informations concernant le plan industriel.
Tout d'abord, l'accord entre Duferco et le Russe NLMK se traduirait par la constitution d'une société
holding qui détiendrait l'essentiel des actifs industriels du groupe, dont, notamment, les sites de Duferco
implantés en Région wallonne : Carsid à Charleroi, Duferco à La Louvière et Duferco à Clabecq. Cette société
serait détenue à concurrence de 50 % par Duferco et 50 % par NLMK.
Sur un plan industriel, l'objectif de la Joint-Venture serait d'augmenter la production des aciers plats de La
Louvière de 40 %, la production des plaques de Clabecq de 30 %, ainsi que la part des produits à haute valeur
ajoutée à Clabecq de 400.000 tonnes par an et, à La Louvière, d'un million de tonnes par an.
Dans le cadre des négociations, le partenaire russe aurait marqué son accord sur la poursuite du plan
industriel élaboré par Duferco et, notamment, sur les investissements prévus entre 2007 et 2010 par Duferco
dans les différents sites wallons. Le plan d'investissements prévoirait ainsi la réalisation de 337 millions
d'euros, répartis en 142 millions d'euros pour Carsid, 85 millions d'euros pour La Louvière et 110 millions
d'euros pour Clabecq.
Vous conviendrez avec moi que l'accord du partenaire russe sur le plan d'investissements à réaliser dans les
sites wallons constitue un facteur visant la continuité et la pérennité de l'activité industrielle en Région
wallonne.
Il y a encore un autre élément favorable, à savoir le maintien du management actuel mis en place par
Duferco dans les entités wallonnes. Ce facteur constitue un gage de la poursuite des activités dans un esprit de
continuité, plutôt que de rupture par rapport aux choix stratégiques adoptés antérieurement.
La SOGEPA restera membre des conseils d'administration des sociétés industrielles wallonnes, à savoir,
les conseils d'administration de Duferco La Louvière, Duferco Clabecq, Duferco Belgium et Manage Steel
Center. Elle aura, de cette manière, un rôle déterminant en tant qu'observateur de l'évolution de la Joint-
Venture Duferco-NLMK, en particulier en ce qui concerne le suivi des axes stratégiques retenus, de la
réalisation des investissements, ainsi que des retombées du développement des activités sur l'économie
wallonne et l'évolution de l'emploi.
Il est également prévu de constituer un Comité d'accompagnement comprenant les membres de la Joint-
Venture et la SOGEPA. Au cours de ce Comité, qui se réunirait une fois par trimestre, la SOGEPA serait
informée de l'évolution des affaires du groupe et du plan industriel.
Enfin, au niveau social, la Joint-Venture s'engage à respecter tous les accords et conventions existants déjà
conclus avec Duferco, et — s'il n'y a pas d'engagement de maintien d'un nombre préétabli d'emplois au seul
niveau des activités industrielles — la réalisation des investissements projetés et le développement des
nouvelles activités de diversification (énergie, assainissement, recyclage, immobilier) devraient permettre de
maintenir globalement sans difficulté le niveau d'emplois existant.
Les nouvelles sont donc plutôt rassurantes quant à l'impact potentiel — car il s'agit toujours d'un projet et
le conditionnel est de rigueur — du rapprochement sur l'activité industrielle en Région wallonne.
En outre, le rapprochement devrait apporter de nouvelles opportunités et des moyens financiers
complémentaires au groupe fusionné, Novolipetsk disposant de moyens financiers importants.
En ce qui concerne la deuxième partie de la question de M. Fontaine relative aux résultats de la mission en
Chine, j'ai, en effet, souhaité accompagner la grappe sidérurgique lors de la visite de deux grands groupes
sidérurgiques chinois : Benxi Iron & Steel Group (près de Shenyang) et Baosteel Nankin — filiale du premier
groupe sidérurgique chinois, Baosteel Shanghai -. On notera tout d'abord que ces groupes se trouvent
confrontés à des besoins immédiats pour remplacer des équipements qui commencent à devenir obsolètes et
pour lesquels il existe des débouchés potentiellement importants pour nos PME wallonnes. Si nous ne
pouvons, si tôt après notre retour, faire déjà un état des lieux complet et définitif des retombées précises à
moyen et long termes, les échos qui me reviennent sont que des contacts furent extrêmement positifs et qu'on
pourrait, par exemple, s'attendre à l'installation possible de l'une des sociétés sidérurgiques qui nous
accompagnaient à Benxi, suite à la rencontre que nous avons eue avec le groupe sidérurgique Benxi Steel.
En ce qui concerne l'avenir de la sidérurgie liégeoise, notamment du secteur du froid, certaines difficultés
sont effectivement rencontrées.
Pour rappel, Arcelor s'était engagé, en 2003, à fournir les coils nécessaires à la sidérurgie liégeoise et ce, à
partir de Dunkerke. Il s'avère, en fait, que l'approvisionnement de Liège par Dunkerke est inférieur au volume
envisagé, ce qui semble résulter du fait que Dunkerke n'atteint pas la capacité de production convenue. Les
raisons possibles de ce problème résideraient dans l'arrêt actuel pour rénovation d'un haut fourneau et dans une
série de problèmes logistiques de capacité de transport. Ces difficultés d'approvisionnement sont fortement
dommageables à l'activité sidérurgique en région liégeoise.
Ce point devra certainement être évoqué lors de la réunion tripartite qui se tiendra prochainement entre le
groupe Arcelor-Mittal, les organisations syndicales et le Gouvernement wallon.
En ce qui concerne le deuxième point abordé par M. Onkelinx, une distinction doit être faite entre
l'activité de fabrication d'acier pour emballages, relevant du groupe Arcelor-Mittal et, d'autre part, l'activité
d'emballage de tôles qui est assurée par des sous-traitants sur le site de production d'Arcelor.
Pour la première activité, il se confirme qu'Arcelor a décidé de recentrer le service commercial sur Paris, ce
qui représenterait la perte d'une dizaine d'emplois et un risque de perdre la maitrise du service clientèle.
Par contre, l'emballage des tôles qui, par définition, ne peut se faire que sur site, n'est pas sujet à
délocalisation.
Enfin, la troisième entreprise évoquée par M. Onkelinx, la société Polypal, est totalement indépendante du
groupe Arcelor-Mittal. Elle fait partie du groupe Whittan, qui détient des sites de production en Espagne et en
Angleterre.
Le site de Herstal sera fermé à la fin de l'année, ce qui se traduira par la perte de 83 emplois. On ne peut
que regretter l'évolution de la gestion de l'entreprise au cours des dernières années. Si l'on ne peut empêcher un
groupe de fermer une entreprise, il convient à tout le moins que les conditions de fermeture s'avèrent
acceptables.
Enfin, en réponse à la question de M. Ficheroulle qui s'interroge sur les déclarations d'Agoria visant à
favoriser le recours à l'acier chinois, je déclarerai qu'il ressort de la visite effectuée en Chine avec la grappe
sidérurgique, que les Chinois ont très fortement développé leur activité sidérurgie au cours des dernières
années et que les entreprises chinoises disposent d'outils neufs et performants dans ce domaine.
La Chine constitue dès lors, sans conteste, une source d'approvisionnement acier qui, selon l'évolution du
marché européen, pourrait s'avérer utile pour nos entreprises de transformation.
Toutefois, la consommation intérieure de la Chine en acier reste très importante et la Chine est
actuellement encore peu exportatrice de cette matière.
Par ailleurs, en termes de qualité de l'acier produit, la Chine reste encore en deçà de la qualité wallonne et
ne peut dès lors pas, à ce stade, être utilisée pour l'ensemble de la fabrication des produits à haute valeur
ajoutée.
Cela étant, la qualité de l'acier chinois augmentera et on peut être porté à croire qu'à terme, ce facteur ne
soit plus de nature à empêcher que l'acier chinois constitue une matière première adéquate pour la fabrication
de produits finis à haute valeur ajoutée.
M. Philippe Fontaine (MR). – Je remercie le Ministre d'avoir dressé un tableau clair de la situation de la
sidérurgie en Wallonie.
Finalement, force est de constater que le Ministre de l'Économie en Région wallonne ne peut jouer, pour
des raisons factuelles, un rôle actif en matière de sidérurgie. Son rôle est plutôt celui d'un observateur
privilégié. Un politique doit avoir le courage de pouvoir reconnaître ses limites.
Certes, j'ai entendu des choses intéressantes quant aux deux questions majeures que j'avais posées, ou
plutôt, ce que je savais déjà m'a été confirmé.
Aucune réponse n'a été apportée hélas quant aux inquiétudes des organisations syndicales de la Louvière,
notamment.
Par ailleurs, je reconnais qu'il est important que des entreprises de petite ampleur puissent être mises en
contact avec des groupes plus importants, dans le cadre de différentes missions menées.