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Le travail au noir en Région wallonne ...
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Question orale de Philippe Fontaine, Député wallon, à Jean-Claude Marcourt, Ministre de l’Economie et de l’Emploi,
concernant :
« Le travail au noir en Région wallonne »
Monsieur le Ministre,
Ainsi commence un communiqué de Belga de ce 27 mai 2006 : « Le dernier rapport McKinsey sur la prospérité pointe la Belgique
parmi les économies souterraines les plus florissantes de l’Union européenne. » C’est évidemment un triste record à
détenir et le sujet n’est pas neuf. Certains de mes collègues l’ont déjà abordé notamment sous l’angle particulier de la
formation dans le secteur de la construction et le suivi des personnes formées.
Le secrétaire d’Etat à la lutte contre la fraude fiscale, Hervé Jamar, estime à au moins 15% du PIB le coût des différentes
formes de fraudes fiscales mais le dernier rapport de McKinsey sur la prospérité va plus loin et estime à 22% du PIB le
poids de l’économie souterraine belge, la cinquième place des pays européen, et s’élèverait à 30 milliards de recettes
fiscales en moins par an.
En terme de population, il semblerait qu’un cinquième de la population travaille au noir à temps plein, temps partiel ou
épisodiquement.
Mes questions sont les suivantes, Monsieur le Ministre :
Disposez-vous d’une évaluation de ce que représente l’économie souterraine en Région wallonne ?
Par rapport au PIB wallon ?
Quelles sont les mesures que vous avez prises pour endiguer ce phénomène préjudiciable à l’économie et à la relance wallonne
préconisée par le Plan Marshall ?
Nous savons qu’environ 60% des 2.500 personnes formées chaque année dans le secteur de la construction ne se retrouvent
jamais dans la filière du travail malgré le nombre d’offres d’emploi disponibles. Des hypothèses sont donc également à
envisager. Avez-vous établi une forme de collaboration avec votre collègue de la formation, Marie Arena, pour estimer
l’ampleur du phénomène en Région wallonne ?
Existe-t-il un instrument de mesure permettant d’évaluer la population qui échapperait à ses obligations fiscales et
sociales en travaillant au noir ?
Un tel outil est-il envisageable ?
Merci des réponses que vous voudrez bien me donner.
Réponse du Ministre Jean-Claude Marcourt,
Je rappellerai à M. Fontaine que l'économie souterraine est par nature difficile à chiffrer. Certes, McKinsey annonce dans
son rapport que la Belgique occupe la 5ème place dans l'Union européenne à 15 concernant l'importance de l'économie
parallèle qui représente 22 % de son PIB. Ce ne sont cependant que des estimations.
Par ailleurs, selon l'IWEPS, le travail au noir concernerait 30.000 personnes en Région wallonne, chiffres qu'il faut
évidemment prendre avec prudence.
Le Gouvernement fédéral a décidé de renforcer la législation et d'instituer des structures fédérales de lutte contre le
travail illégal et la fraude sociale. C'est la loi du 3 mai 2006. Dans ce cadre, cinq conventions de partenariat ont été
signées entre les ministres compétents et les organisations professionnelles.
C'est notamment le cas du secteur de la construction auquel vous faites référence. Une convention de partenariat entre le
service public fédéral de l'Emploi, du Travail et de la Concertation sociale et la Confédération de la Construction a été
signée, par laquelle les parties signataires constatent notamment que le travail illégal est une réalité et que les
conséquences en sont désastreuses de manière générale. Tout en reconnaissant l'opportunité et la nécessité d'une approche
répressive du phénomène, les parties ont estimé que leurs actions communes doivent reposer prioritairement sur une démarche
préventive. Les différents stades de la lutte contre le travail illégal seront rencontrés. Cette coopération se traduit par
des contrôles accrus et plus ciblés, des échanges d'informations, des propositions de réglementation ou de campagnes de
sensibilisation.
Concernant le taux d'insertion des demandeurs d'emploi ayant suivi une formation qualifiante en construction au FOREM, je
rappelle qu'en 2005, celui-ci atteignait pratiquement les 70 %, ce qui correspond au taux d'insertion moyen après une
formation qualifiante au FOREM .
Cependant, selon le FOREM, et cela va dans le sens des chiffres que vous citez et qui sont avancés par la Confédération de
la Construction wallonne, il apparaît que parmi ces 70 %, tous ne s'insèrent pas dans le secteur de la construction, où le
taux approche les 40 % seulement.
Quant aux 30 % qui, bien qu'ayant terminé une formation dans un métier de la construction, ne trouvent pas à s'insérer,
alors même que le secteur ne cesse de lancer des messages indiquant que des offres sont non satisfaites, je vous concède
que c'est interpellant. Je n'en connais pas aujourd'hui les causes même si plusieurs sont supputées. C'est donc par besoin
d'objectivation de la situation que la Ministre Marie Arena et moi-même avons, à travers le Plan Marshall, (et réaffirmé
dans le Contrat de gestion du FOREM), investi le FOREM de la mise en place d'un service de gestion globale et intégrée des
pénuries.
Ceci implique clairement que le FOREM devra connaître autant que faire se peut, les raisons des pénuries, si elles sont
liées au profil des candidats, à la nature intrinsèque de l'offre, à des motifs personnels, etc.
En outre, pour en revenir au secteur de la construction, cet aspect a fait l'objet d'une attention particulière au moment de
négocier la nouvelle convention entre la Région wallonne, les partenaires sociaux du secteur et le FOREM, convention qui
sera signée dans les prochaines semaines et qui intègre notamment un programme intensif de renforcement de la formation
des travailleurs, pour développer leurs qualifications mais aussi, parce qu'il s'agit-là d'un élément de stabilisation de
ces travailleurs dans le secteur.
Enfin, concernant l'instrument de mesure permettant d'évaluer la population qui échapperait à ses obligations fiscales et
sociales en travaillant au noir, il relève du Gouvernement fédéral et je vous renverrai au Ministre de l'Emploi,
M. Vanvelthoven ainsi qu'au Ministre des Finances, M. Reynders, si vous souhaitez plus de détails, tant sur les chiffres
que sur les mesures visant à lutter contre ce phénomène.
Philippe Fontaine (MR).
Il y a effectivement un problème de compétences entre le pouvoir fédéral et régional. Le pouvoir fédéral a un rôle
essentiel en ce domaine. Néanmoins, les conséquences pour la Région sont catastrophiques car elles nuisent aux efforts de
relance. Il semble que chez certains entrepreneurs, un certain état d'esprit continue à régner. Il est donc essentiel que
le secteur de la construction décide de participer sincèrement à cette politique. C'est un phénomène extrêmement
problématique puisqu'il se maintient du seul fait de la concurrence. Comment lutter, en effet, contre des concurrents
étrangers si ce n'est par le travail au noir ? Il faut faire la chasse aux entreprises qui utilisent le travail au noir.
À vrai dire, les contrôles sont trop peu nombreux. Dans le cas évoqué par M. Wesphael, ce ne sont pas les pouvoirs publics
qui ont révélé la fraude mais bien les syndicats. Il ne me semble pas que ce soit leur travail.