Parlement wallon

Questions orales

     

 Questions du 09/05/06

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La création d’un arrondissement administratif et...

Question orale de Philippe Fontaine, Député wallon, à Elio Di Rupo, Ministre-Président du Gouvernement de la Région wallonne, concernant :
« La création d’un arrondissement administratif et électoral de la Région du Centre »


Monsieur le Ministre-Président,
Lors d’une soirée organisée par la Communauté Urbaine du Centre récemment, vous avez déclaré vouloir soutenir la création d’un arrondissement du Centre.

Cette idée  qui chemine depuis au moins 70 ans avait été lancée par la Chambre de Commerce et d’Industrie du Centre à une époque où le Centre représentait une véritable force socio-économique et elle semblait  définitivement enterrée à cause de l'incapacité de trouver un accord politique à ce sujet à l'intérieur même de la Région du Centre. Alors florissante, la Région du Centre souffrait de ne pas avoir d’unité politique et administrative et donc d’être moins bien défendue que d’autres régions, les parlementaires ayant, de fait, un pied dans la Région du Centre et l’autre dans le reste de leur arrondissement.

Vous le savez, une occasion historique a été ratée en 1978 lors de la conclusion du  "PACTE D'EGMONT" qui prévoyait une réforme profonde des structures de l'Etat et notamment la constitution d'arrondissement électoraux sur base d'entités régionales basées sur des critères socio-économiques.  Dans cette perspective, la région du Centre avait une chance réelle de constituer enfin une entité politique.

Depuis cette époque, plus rien de vraiment sérieux n'a été tenté et la Région du Centre a continué à perdre de son influence : la presque totalité des centres de décision ont quitté la Région: les sièges de banques dont la Banque Nationale ,certains syndicats et mutuelles, les associations professionnelles patronales, certaines administrations publiques.

La position des communes n’est pas plus confortable que celle des parlementaires dans la Région du Centre. Que dire de l'attitude de communes comme Manage, Chapelle , Seneffe, Binche, Anderlues, Morlanwelz, qui ont adhéré à la Communauté  Urbaine de Charleroi-Val de Sambre tout en adhérant également à la Communauté Urbaine du Centre ?

Une autre contradiction , dont la responsabilité revient au Gouvernement que vous présidez, est la constitution de deux agences locales d'animation économique, l'une pour les arrondissements de Charleroi et Thuin, l'autre pour le reste du Hainaut.

La région du Centre est ainsi coupée en deux: les communes de Seneffe, Chapelle, Manage, Estinnes, Anderlues, Morlanwelz et Binche sont ainsi rattachées à la zone de Charleroi. Cette conception, ignorante des réalités du terrain, porte en son sein le germe de l'éclatement de l'IDEA.

Mes questions sont les suivantes Monsieur le Ministre- Président :

Comme c’est au titre de Ministre-Président que vous avez fait ces déclarations, puis-je savoir comment vous pouvez être actif pour créer cet arrondissement administratif et politique du Centre à moins que vous ne parveniez à convaincre le président du Parti socialiste ?

Est-ce plutôt une déclaration de circonstance ou peut-on y voir une réelle volonté de faire aboutir ce dossier, contrairement à ce qui s’est passé antérieurement ?

Merci des réponses que vous voudrez bien me donner.
Réponse du Ministre-Président Elio Di Rupo,
Je vous remercie pour ces questions relatives à la création d'un arrondissement administratif et électoral de la région du Centre. Je voudrais avant tout indiquer qu'étant né à Morlanwelz et ayant habité à Chapelle-lez-Herlaimont, je connais bien la souffrance que représente la situation évoquée – lorsque j'étais à Morlanwelz, c'était le Sud-Hainaut, à Chapelle, j'étais à Charleroi -. Je me suis toujours senti de la région du Centre jusqu'au moment où je suis arrivé à Mons. Je connais cette Région et ses spécificités. Par ailleurs, je m'interroge sur le grand écart réalisé par M. Fontaine, dans son exposé. Par rapport à la situation actuelle de l'arrondissement administratif du Centre, je n'ai pas vu le découpage. Peut-être me suis-je trompé car je ne connais pas tous les détails et n'ai donc pas bien suivi cette démarche intellectuelle, à moins qu'elle soit purement politique. J'apprécierais que cela puisse m'être expliqué dans le cadre des répliques.

Relativement à cet arrondissement, je relève que cette région a été dénommée « région du Centre » par l'administration des Mines pour désigner le bassin charbonnier situé entre Charleroi et Mons-Borinage. Cette région regroupe 13 communes et quelques 250.000 habitants. Cinq de ces communes sont sociologiquement du Centre mais font partie de l'arrondissement de Soignies, il s'agit de Braine-le-Comte, Ecaussines, La Louvière, Le Roeulx et Soignies ; trois appartiennent à l'arrondissement de Charleroi, à savoir Chapelle-lez-Herlaimeont, Manage et Seneffe ; cinq font partie de l'arrondissement de Thuin : Anderlues, Binche, Estinnes, Merbes-le-Château et Morlanwelz.

La question de la création d'un arrondissement redéfini se retrouve dans les Accords de Stuyvenberg qui complètent le Pacte d'Egmont.

Malgré la tenue de nombreux congrès et l'adoption de diverses résolutions, l'arrondissement en tant que tel n'a jamais eu lieu. Je vous confirme toutefois mes propos du 20 avril à La Louvière. Je les ai tenus en mon nom personnel, mais je ne doute pas que le Gouvernement puisse s'y associer.

Si un consensus se faisait jour en la matière parmi les décideurs locaux, je ne verrais pas de difficulté à ce que l'on propose une redéfinition de l'arrondissement administratif et électoral du Centre. Je comprends cette démarche d'un point de vue sociologique. Je pourrais dessiner cet arrondissement en quelques secondes, mais j'estime qu'il ne m'appartient pas de dire comment cela doit aller. Il faut avoir ce consensus.

Mes propos ne réfèrent pas à un harcèlement, ils ne sont pas davantage une déclaration de circonstance, mais bien d'une conviction profonde. Je crois que ce serait plus adéquat et ce n'est pas le seul endroit où on pourrait le faire.

Il me revient que les Bourgmestres de la région en discutent. Il faudrait que cette concertation aboutisse à un consensus dont nous prendrions acte au Gouvernement, et le Ministre Courard pourrait alors prendre une initiative en la matière.

L'analyse selon laquelle le Gouvernement wallon est responsable d'une incohérence dans la région du Centre relève de la politique politicienne. Je ne vois pas en quoi les deux agences locales d'animation économique créent une difficulté additionnelle par rapport à ce qui existait. En effet, il y a, d'un côté, Igretec qui a réussi à rassembler un certain nombre d'acteurs, et, de l'autre, la Maison de l'Entreprise. Le Gouvernement a laissé l'initiative aux acteurs locaux qui ont discuté entre eux. Il n'est pas intervenu et moi non plus. On a laissé les acteurs agir, d'autant qu'il s'agit de la stimulation économique qui dépasse de loin les arrondissements.

Pour ce qui concerne l'arrondissement administratif et politique du Centre, il faut que les Bourgmestres et les conseils communaux se déterminent et, le cas échéant, nous pourrions aussi parler avec les arrondissements voisins, notamment ceux du Hainaut occidental et de Charleroi. S'il y avait, sur le plan local, un dessein et une volonté partagée, la discussion deviendrait très concrète.

Philippe Fontaine (MR).
– Je remercie le Ministre-Président pour sa réponse. Pour ce qui concerne l'équivoque qu'il a cru pouvoir identifier dans mes propos, sa réponse m'a donné le sentiment que c'était une déclaration sous réserve d'obtenir un consensus. Or, quand on sait que ce consensus n'a jamais été obtenu jusqu'à présent, je ne vois pas très bien comment ce dossier pourrait aboutir sans initiative de votre part.

Elio Di Rupo,
– Vous voudriez donc que je sois autoritaire.

Philippe Fontaine (MR).
– On peut être un moteur sans être autoritaire. Ou il existe une volonté de faire avancer ce dossier, ou on renvoie dos à dos ceux qui ne s'accordent pas depuis septante ans. On n'a donc pas beaucoup de chances de voir aboutir ce dossier dans un avenir proche. Par ailleurs, vous dites que je ferais le grand écart, mais je n'ai pas relancé cette idée. Par ailleurs, vous dites que vous n'êtes pas opposé à ce qu'on crée un arrondissement du Centre tandis que le Gouvernement prend des dispositions qui créent un certain nombre de problèmes dans le développement économique. On peut discuter de tout cela, mais relancer une agence de développement économique qui coupe le Centre en deux et dire en même temps qu'on va relancer un arrondissement administratif et électoral du Centre me paraît contradictoire. Je voulais savoir s'il existait une faisabilité réelle dans un avenir plus ou moins rapproché, mais je constate qu'aucun élément nouveau n'est apparu. Ca restera l'inaccessible étoile.

Elio Di Rupo,
– Jupiter rend fou celui qu'il veut perdre. Je n'ai rien demandé. Lors d'une conférence, on m'a demandé si le Ministre-Président voyait d'un oeil favorable la création de l'arrondissement administratif et j'ai répondu favorablement. Par ailleurs, il est clair que tout acte autoritaire ne serait pas approprié et il est donc normal qu'une fois relancé, notamment par les organisations syndicales et M. Taminiaux, une initiative soit prise et, s'il est couronnée d'un consensus, nous savons d'ores et déjà que cela ira bien. Enfin, les acteurs locaux pour l'agence de stimulation économique se sont accordés sur ce schéma-là. C'est un élément d'un ensemble très vaste. Il n'y a pas de difficulté à cet égard.

Philippe Fontaine (MR).
– Je remercie le Ministre-Président pour sa deuxième salve et je prends acte qu'il n'aime pas prendre des positions autoritaires. J'hésite à qualifier sa réponse de macchiavélique ou de jésuite.