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La mise en décharge du fluff d’itradec...
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Question orale de Philippe Fontaine, Député wallon à Benoît Lutgen, Ministre de l’environnement concernant:
« La mise en décharge du fluff d’itradec plutôt qu’en cimenterie »
Monsieur le Ministre,
Itradec est une unité de tri et de valorisation des déchets par la biométhanisation à Havré près de Mons.
Le fluff est ce qu’on appelle un demi produit qui sert de combustible de substitution dans le processus industriel de
fabrication de clinker en cimenterie.
Mais itradec a dû reconnaître qu’il ne parvenait pas à valoriser le fluff pour en faire le combustible de substitution.
Le problème est que l’itradec produit 40.000 tonnes de fluff par an et qu’il doit pouvoir les éliminer. 8000 tonnes
partaient dans les fours à ciment de CBR et une autre partie devait partir dans les fours d’Holcim mais le piètre qualité
du produit sortant d’Havré n’a pas permis que la moindre tonne de fluff ne soit envoyée à Obourg.
Itradec se voit donc contraint de conduire son fluff dans la décharge de Mont Saint Guibert en payant plus de 60€ la tonne.
Ceci représente un surcoût annuel pour l’intercommunale de 1,5 million d’€ à faire supporter par les habitants des communes
affiliées.
Mes questions seront les suivantes Monsieur le ministre :
Est-il vrai qu’un investissement de 2 millions d’€ pourrait suffire pour permettre à itradec de mieux valoriser son fluff
qui pourrait ainsi être fourni en cimenterie ?
Si ce n’est pas le cas, que comptez-vous mettre en œuvre pour permettre à l’intercommunale d’éliminer son fluff au meilleur
prix compte tenu de la répercussion actuelle sur les communes et leurs habitants ?
Pouvez-vous me dire où en sont les négociations du projet de collaboration entre itradec et ipalle qui pourrait détruire le
fluff dans ses fours ?
Quelles mesures transitoires comptez-vous prendre jusqu’à la mise en place de cette politique ?
Merci des réponses que vous voudrez bien me donner
Réponse du Ministre Benoît Lutgen,
Votre question pose plusieurs problèmes et plus particulièrement celui de la pertinence du choix que les responsables de
gestion de déchets opèrent dans le développement de leur activité.
La situation du fluff d’Itradec que vous décrivez est exacte, selon mes renseignements, sans que je puisse néanmoins
confirmer les conditions financières selon lesquelles celui-ci est accepté à la décharge de Mont-Saint- Guibert. Je ne peux
à ce sujet que vous renvoyer vers les dirigeants de l’intercommunale.
En matière de flux, mes collaborateurs ont rencontré récemment les représentants des industries cimentières belges ; ceux-ci
ont confirmé que la composition du fluff et son humidité constituent des handicaps sérieux à une utilisation plus étendue
de ce type de combustible. C’est la raison principale pour laquelle Holcim n’aurait pas donné suite à la convention signée
avec Itradec voici une dizaine d’années.
Si le secteur cimentier se dit à présent disposé à reprendre les discussions, il n’entrevoit qu’une solution très partielle
au problème actuel d’Itradec, sauf amélioration sensible du combustible, y compris dans sa composition.
N’étant saisi actuellement d’aucun dossier technique ni économique relatif à l’amélioration du fluff, je ne puis me prononcer
sur le budget de 2 millions d’euros que vous évoquez, ni sur les probabilités de rencontrer les exigences des cimentiers.
Dans tous les cas, si un accord pouvait être trouvé pour le traitement même partiel du fluff, je conditionnerais d’éventuels
subsides pour Itradec à un partenariat public-privé assorti de garanties solides apportées par l’industriel. Par « solides »
, j’y intègre la dimension du long terme, à la hauteur des investissements complémentaires nécessaires. Vous conviendrez en
effet qu’il ne serait pas excusable de rééditer les échecs rencontrés à ce jour.
Dans le cas contraire, les experts ne voient, pour ce type de déchet, que la valorisation énergétique dans une unité
d’incinération.
Je rappelle à cet égard que l’intercommunale Itradec a négocié en 1998-1999 un droit d’utilisation des installations de
Thumaide situées à 25-30 km de Mons. À l’heure actuelle, Itradec n’utilise que très peu cette capacité, la décharge restant,
semble-t-il, plus intéressante économiquement que le prix proposé par Ipalle. Je n’ai pas reçu de comparatif financier, mais
il vous suffit à nouveau d’interroger les dirigeants d’Itradec.
La question du devenir du fluff se posera bien sûr différemment quand la mise en décharge sera découragée par une taxe que
je souhaite appliquer à ce mode d’élimination.
Selon les études qui ont été menées par mon prédécesseur, actualisées à ma demande, et l’évolution des gisements tels
qu’arrêtés à mi 2005, il est possible de traiter les flux des déchets ménagers et industriels banals combustibles, dans les
unités wallonnes, moyennant adaptation de certaines capacités tout en restant en deçà des capacités d’incinération que le
Gouvernement avait arrêtées en juillet 2003. Vous vous souviendrez qu’un incinérateur de 300.000 tonnes était prévu au pôle
environnemental de Mons. Une telle capacité complémentaire n’est plus d’actualité.
Avec le Ministre-Président, j’ai initié des réflexions nouvelles entre Itradec et Ipalle en vue de relancer et d’intensifier
le partenariat que j’ai évoqué ci-avant. Dans le cadre des dispositions que je compte proposer au Gouvernement, j’ai voulu
que le partenariat, comme d’autres en Wallonie, se fasse dans le respect des principes fondamentaux suivants :
non-discrimination entre les communes, quelles que soient leur intercommunale d’origine, lorsqu’elles utilisent un même
outil, transparence, responsabilisation accrue des opérateurs, encouragement au décloisonnement par des incitants
financiers tout en respectant la liberté d’association et l’autonomie communale. Ceci doit permettre d’aplanir les craintes
ou tensions entre sous régions.
J’en termine avec les mesures transitoires en vous rappelant qu’il m’appartient de tracer, avec le Gouvernement, une ligne
politique claire pour la gestion des déchets en Wallonie, en instaurant des incitants fiscaux comme dans toute politique
environnementale.
Toutes les intercommunales wallonnes auront à se positionner par rapport à cette nouvelle donne, et à réorienter leur
stratégie en fonction de ces éléments. Dès que le Gouvernement et le Parlement se seront prononcés, j’inviterai les
intercommunales à réagir rapidement dans l’intérêt financier des communes et pour une meilleure gestion environnementale des
déchets.
J’ai eu des contacts avec Idratec et Ipalle et je pense qu’il est essentiel d’agir afin d’éviter que ne se créent des
concurrences entre les intercommunales. Je pense qu’il faut d’abord privilégier les partenariats publicpublic avant les
partenariats public-privé.
Idratec est un outil qu’il ne faut pas abandonner et qui devra donc être réorienté, notamment vers la biométhanisation
agricole pure.
Philippe Fontaine,
Je vous remercie pour les pistes évoquées. Je serai bien sûr très attentif au projet. Je pense qu’il est nécessaire
d’uniformiser le recyclage des déchets car il n’est pas acceptable que les coût soient aussi différents d’une
intercommunale à l’autre.
Si aujourd’hui il n’y a pas de décharge chez Idratec, c’est parce qu’il a acheté un terrain avec la permission de la Région
wallonne mais que celle-ci lui a ensuite refusé le droit de l’utiliser.
Par ailleurs, au moment où le projet a été lancé, nous savions déjà que la qualité du compost qui sortirait de ce processus
n’aurait rien d’exceptionnel.
Benoît Lutgen,
Il est de notre responsabilité d’avoir des coûts équivalents pour nos communes. Par ailleurs, nous devons tout de même tenir
compte des choix du passé.
Philippe Fontaine,
Je tiens à souligner que le choix du processus ne relève en rien de l’intercommunale. C’est la Région qui a décidé pour
elle !
Benoît Lutgen,
Cependant, les choix ont été opérés dans cette intercommunale, des choix dont le bilan environnemental et financier est
catastrophique.
Philippe Fontaine,
Disons que la responsabilité est partagée.
Benoît Lutgen,
J’ajoute qu’il y a une nécessité absolue pour les intercommunales de rendre des comptes à leurs actionnaires, c’est-à-dire
aux communes, en ce qui concerne les choix qui seront opérés demain. Des projections financières sérieuses doivent être
faites et ce, afin de ne pas vendre un chat dans un sac. C’est une obligation pour les intercommunales.
Philippe Fontaine,
Je tiens à souligner, en ce qui concerne les responsabilités, qu’Idratec avait le choix entre plusieurs procédés mais que,
compte tenu des coûts, la Région a choisi pour elle le procédé actuel.
Willy Borsus,
Je souhaiterais la même transparence de la part de la Région wallonne vis-à-vis des communes. La Région doit notifier
clairement aux communes les coûts qu’elle leur réclamera. Ces coûts doivent être raisonnables.
Benoît Lutgen,
Je fixerai les règles du dispositif. En fonction de cela, chacun posera ses choix en matière de traitement des déchets. Il
est impossible de dire aujourd’hui quels seront ces choix.
Willy Borsus,
Pour les communes, pour les citoyens, l’évolution des coûts est une catastrophe financière. Quels seront les coûts demandés
par la Région ? Il faut savoir que la facture déchets des citoyens wallons va doubler en l’espace de 3 à 4 ans. C’est tout
le débat budgétaire que nous aurons demain.