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Laminoirs de LONGTAIN, Manage Steel Center...
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Question orale de M. le Député Philippe FONTAINE à Monsieur le Ministre J-C MARCOURT sur:
« Les inquiétudes quant à l’avenir du site des laminoirs de LONGTAIN et la situation de Manage Steel Center et Longtain Inox »
– Monsieur le Ministre, c’est en tant qu’administrateur de la Communauté
urbaine du Centre, mais aussi en tant qu’élu de la commune de Manage, que je vous interpelle
aujourd’hui, tant sur les «laminoirs de Longtain», comme mon Collègue, Maurice Bayenet, que sur la
situation de Manage Steel Center et de Longtain Inox dans la Région du Centre. Ces deux entreprises
ayant aussi quelques problèmes.
En octobre dernier, Monsieur le Ministre, je vous avais interpellé et ce n’était d’ailleurs pas la
seule interpellation sur le sujet, je pense que je suis déjà revenu sur le dossier de Longtain sous la précédente
législature, au moins quatre ou cinq fois. Je vous avais interpellé sur les inquiétudes qui
pesaient sur l’avenir des «laminoirs de Longtain». Votre réponse à l’époque s’était voulue confiante
et rassurante. L’actualité récente m’oblige pourtant, malheureusement, à revenir sur ce dossier.
En effet, les rumeurs que j’évoquais quant à la volonté du tubiste espagnol de renforcer ses unités
lorraines au détriment des laminoirs de Longtain sont aujourd’hui appuyées par des éléments objectifs
qui ne peuvent que nous inquiéter davantage. Ainsi, depuis la prise en main par Condessa, Longtain
qui a connu, fin 2004, une restructuration ayant coûté 40 emplois, s’est vu restreindre son périmètre
«clientèle», décapiter son service commercial et a été contrainte à s’approvisionner à des coûts importants,
alors que Duferco pourrait être un fournisseur intéressant, puisqu’il est situé pratiquement à côté,
ce qui ne manque pas de se répercuter sur les prix, donc sur la position concurrentielle de l’entreprise.
Preuve de l’aggravation, la situation financière qui avait retrouvé une certaine vigueur s’est considérablement
dégradée avec trois premiers mois catastrophiques en 2005. Dès lors, il n’est pas insensé
de croire qu’il s’agit d’une baisse artificielle de la production. De plus, contrairement aux sites de
Lorraine, aucun investissement important n’a été réalisé. Tout semble fait pour que les points faibles
identifiés lors de la reprise (situation financière, délais de fabrication trop longs, manque de cash-flow
et coûts de transformation élevés) soient davantage accentués.
On ne s’étonnera donc pas qu’aujourd’hui, que les organisations syndicales craignent une stratégie
visant à la mort programmée du site de Longtain qui, rappelons-le, occupe toujours 105 personnes
dans une région où l’emploi est tout sauf abondant, comme le rappelait d’ailleurs mon Collègue à
l’instant. L’attitude attentiste que vous avez défendue jusqu’ici doit à mon avis cesser. La Région ne
peut se permettre de se voir bafouée et la Région du Centre ne peut se permettre un nouveau drame
social d’autant plus que la situation des sites de Manage Steel Center, tout proche, et de Longtain
Inox ne sont pas non plus sans poser quelques inquiétudes.
Dès lors, Monsieur le Ministre, je voudrais vous poser les questions suivantes.
Selon la presse, vous deviez rencontrer les syndicats – je sais que votre Cabinet l’a fait – mais je ne
sais pas si vous les avez rencontrés ? Quels éléments avez-vous retiré de votre rencontre ? Que comptez-
vous mettre en œuvre pour apaiser les craintes légitimes des travailleurs?
Lors de la séance du 6 octobre, vous m’aviez affirmé que la Sogepa suivrait de très près l’évolution
de ce dossier. Quelle analyse la Sogepa fait-elle de la situation ? Quels étaient les termes de l’accord,
si accord il y a eu, entre Condessa et la Sogepa qui ont conditionné le nihil obstat ?
Il semblerait que des investissements soient prévus pour 800.000 euros. Confirmez-vous cette
information? Dans le même temps, confirmez-vous la volonté de Condessa de récupérer une avance
sur fonds de roulement de 4 millions d’euros ces prochaines semaines, obligeant ainsi Longtain à
financer ses investissements par des fonds propres?
Avez-vous des contacts avec Condessa afin d’évaluer les possibilités de développement de ce site
au sein du groupe espagnol ?
La piste de la reprise du site par un autre repreneur est-elle ou peut-elle être envisagée puisqu’il y avait,
à l’époque où Condessa a repris l’entreprise, un autre candidat qui était un groupe d’origine turque?
Concernant Manage Steel Center, disposez-vous maintenant d’éléments nouveaux depuis ma question
d’octobre dernier? Il m’est revenu en effet que Bombardier ne respectait pas ses engagements et
notamment ne versait pas les compensations qu’il devait verser suite à une baisse de commandes
importantes. Et si tel le cas, que compte faire la Région wallonne ?
Enfin, disposez-vous d’informations sur la situation actuelle de Longtain Inox qui, elle aussi, ne
manque pas de susciter quelques inquiétudes.
Réponse du Ministre J-C MARCOURT,
– Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs
les Députés,
le dossier des «laminoirs de Longtain» effectivement présente des caractéristiques
qui ont légitimement inquiété les travailleurs puisqu’ils ont constaté qu’en Lorraine, un certain
nombre d’investissements étaient réalisés, que la production du deuxième semestre 2004 atteignait
18.000 tonnes seulement et qu’il y avait effectivement des modifications de comportement en ce qui
concerne la trésorerie.
Alors, qu’avons-nous fait ?
Effectivement, mon Cabinet a rencontré les travailleurs. Une réunion est prévue pour que j’aie un
entretien personnel avec eux, mais le calendrier ne m’a pas permis d’être présent, lors de la première
réunion.
En outre, nous avons – je le confirme – demandé à la Sogepa de suivre ce dossier qui est important
pour la Région.
Enfin, j’ai eu des contacts directs avec Condessa et les dirigeants de Condessa.
Alors, en ce qui concerne le problème des investissements en Lorraine, il faut savoir que Condessa est
propriétaire de plusieurs unités en Lorraine et qu’ils ont restructuré leur pôle d’activités en Lorraine
conduisant à un certain nombre de fermetures et de réinvestissements dans le cadre de cet investissement.
Il est indiqué – je le prends pour un fait annoncé par la direction – qu’il n’y a pas de relation entre
les deux.
2. Il y a une volonté de maintenir la production aux «laminoirs de Longtain» au niveau voulu qui est
normalement de 80.000 tonnes par an pour rester dans les critères de rentabilité. La volonté de Condessa
n’étant pas seulement de prendre la réserve qu’ils font, tout en indiquant que pour l’année 2005 il y aura
une amélioration substantielle, puisque 18.000 tonnes sur un semestre, ça veut dire qu’il en manque
22.000 pour atteindre 40.000 (par l’arithmétique est compréhensible).
La restriction que Condessa fait, c’est qu’ils ne veulent pas prendre de commandes à perte ou de
mauvaise qualité. Ça, on peut effectivement se dire que, économiquement, il y a une certaine logique.
Ils s’engagent néanmoins à remonter le carnet de commandes de manière significative.
3. Il y a la volonté effectivement de changer la politique qui était celle d’Arcelor. Arcelor avait une
gestion centralisée du cash donc ils faisaient un cash pooling. Ce qui voulait dire qu’ils faisaient, à
l’intérieur de ce cash pooling, entre leurs filiales, des avances de trésorerie et Condessa considère que
chaque entité doit être self supporting. Donc il y a une politique financière différente.
Nous avons obtenu néanmoins – et je ne sais si c’est une concession de leur part ou si c’était une
volonté réelle préexistante – que Condessa puisse assister les «laminoirs de Longtain» dans la mesure
où cette ouverture de crédit auprès du secteur bancaire pourrait avoir deux effets :
– le premier, c’est évidemment de dégrader éventuellement la situation financière à tracer avec leur
entreprise ;
– le deuxième effet pouvant être une restriction d’un certain nombre de lignes de crédit pour faire
autre chose, puisque si vous les utilisez pour financer votre fonds de roulement, vous ne l’avez plus
pour financer éventuellement d’autres éléments.
Quatrième élément que nous avons abordé, la politique commerciale.
Condessa a une politique commerciale intégrée. Ce qui pouvait faire craindre que les «laminoirs de
Longtain» ne soient plus qu’un atelier de fabrication dépourvu d’une capacité de trouver des clients et
donc être dépendant de la répartition de clientèle en fonction du bon vouloir des commerciaux. Il a été
indiqué qu’il y aurait une autonomie donnée aux «laminoirs de Longtain» avec la volonté de spécialiser
en partie, donc il y aurait une mutualisation entre les différents éléments, mais une spécialisation
par entreprise de manière à leur garantir des clients – quand je dis spécialisation, c’est sur des espaces
géographiques permettant d’assurer mieux l’avenir des «laminoirs de Longtain» –.
Nous continuons à avoir des contacts réguliers avec les «laminoirs de Longtain» et, avec Condessa
plus exactement, et donc je suis cette situation.
Nous aurons des contacts avec les travailleurs et la direction, a posteriori.
Il y a un Conseil d’entreprise où le patron de Condessa viendra personnellement en Belgique pour
s’expliquer avec les travailleurs et donc j’aurai encore l’occasion de suivre ce dossier et, le cas
échéant, de vous en faire rapport, si vous le souhaitez.
Pour les deux autres dossiers, Manage Steel Center. Effectivement, nous avons des difficultés avec
Bombardier. Autant il avait été possible, jusqu’en 2003, de voir Bombardier respecter les engagements,
autant aujourd’hui il y a un certain nombre de difficultés.
Des négociations sont toujours en cours aujourd’hui, mais effectivement, il y a une difficulté réelle
sur l’exécution de l’accord qui avait été pris lors de la fermeture de Bombardier à Manage.
Je dirais que des compensations, non pas par Bombardier, mais par Duferco, jouent de manière à
maintenir une activité. Mais je dois reconnaître que, au jour d’aujourd’hui, nous n’avons pas finalisé
ces négociations qui ne sont pas faciles et nous devrons à un moment donné, effectivement, examiner
la réalité de la situation.
Dernier point sur l’inox. À cet égard, je dirais, je n’ai pas d’informations particulières. En tout cas,
il y avait une rumeur qui courait sur le désengagement de Longtain Inox et de faire en sorte que les
travailleurs soient renvoyés sur Car Inox. Je tiens à dire que personnellement ces rumeurs ne m’ont
pas été confirmées et que j’ai reçu des dénégations à cet égard.
M. Fontaine (MR). – Je remercie M. le Ministre pour ses réponses et pour le détail des contacts
qu’il a eu avec Condessa.
J’enregistre – comme vous l’avez fait – un certain nombre de promesses ou d’affirmations faites par
l’entreprise, mais évidemment on sait bien que, dans ce type de dossier, on a une tendance, souvent, à
ne dire qu’une partie de la vérité. Vous n’y pouvez rien, moi non plus. Nous ne pouvons que prendre
acte d’un certain nombre d’engagements, mais je suis persuadé que, malheureusement, on devra sans
doute y revenir et que, si on ne redonne pas une réelle autonomie, notamment commerciale, à l’entreprise,
pour moi, elle est condamnée à terme. Parce que, dans ce que vous avez dit, on a parlé du fait
que Condessa ne voulait pas amener des commandes à pertes ou de mauvaise qualité. Quand j’entends
parler de mauvaise qualité, j’ai un peu peur que ce soit un des motifs utilisé dans le futur alors que
jusqu’à présent tout le monde avait reconnu la très grande qualité des produits de Longtain.
Vous ne m’avez pas répondu non plus sur l’importance du périmètre qui était celui de Longtain
jusqu’à présent et que, semble-t-il, Condessa a diminué.
Je crois qu’il faut rester attentif là-dessus parce que, si on spécialise trop, qu’on dit après que les
produits sont de mauvaise qualité, qu’on réduit le périmètre et que l’autonomie commerciale est quasi
nulle. Et bien, c’est la chronique d’une mort annoncée, ce que je ne souhaite pas et que je sais que
vous ne souhaitez pas non plus. Je crois qu’il faut rester particulièrement attentif dans ce dossier.
En ce qui concerne Manage Steel Center, je crois que, là aussi, il faut être particulièrement attentif
parce que, finalement, si Bombardier ne respecte pas ses engagements, c’est en prétendant que leur
chiffre d’affaires, en ce qui concerne le ferroviaire, est en baisse – si je ne me trompe – de 50 %, mais –
si j’ai bon souvenir – c’était la même argumentation qu’ils avaient utilisée à l’époque où ils se dégageaient
de l’entreprise elle-même et où, effectivement, Duferco est venu au secours et a permis le sauvetage
de l’entreprise.
Il ne faudrait pas, aujourd’hui, que l’entreprise Bombardier parvient finalement à se tirer d’affaires en
ne respectant pas les accords. Parce que les accords qui ont été conclus, c’est ce qui permettait quand
même à Bombardier de s’en sortir de manière relativement élégante. Cela a été très dur, à l’époque.
Maintenant, ils essayent tout simplement – me semble-t-il – de ne pas respecter les accords qu’ils
avaient signés. Ils ont peut-être peur aussi que cela leur coûte finalement plus cher puisqu’ils n’amènent
plus les commandes nécessaires. Cela leur coûte plus cher que s’ils avaient accepté les premières
propositions qui étaient faites, à l’époque.
Mais cela, ils ont joué, ils perdent. C’est un peu dommage, mais c’est une entreprise, c’est une
multinationale. Ils doivent connaître la loi du marché. À partir du moment où ils ont pris un engagement,
ils doivent le respecter.
Ma crainte, c’est que les quelques dizaines de travailleurs, qui sont encore utilisés dans ce secteur-là,
ne se voient privés relativement vite de leur emploi et qu’il n’y ait pas de possibilité de compensations
dans l’autre partie de l’entreprise qui, elle, tourne apparemment bien grâce, notamment, à Duferco.
Je vous demande, Monsieur le Ministre, de rester particulièrement attentif sur cette affaire et de
continuer à mener ces négociations avec la fermeté suffisante.
Je prends acte des déclarations que vous venez de nous faire sur Longtain-Inox. Vous dégonflez un
peu, vous abattez un canard qui réapparaît de temps en temps.
M. Marcourt, – Simplement, un mot, quand je parlais de
commandes de mauvaise qualité, ce n’était pas la qualité de sortie du produit, mais bien la qualité de
la commande. Je ne tiens pas du tout, je voudrais quand même éviter qu’il y ait une confusion et
qu’on dise que des travailleurs et l’unité de production produisent des choses de mauvaise qualité.
Je pense que l’équivoque méritait d’être levée.
Pour le surplus, il faut maintenant suivre le dossier, il y a un certain nombre d’éléments qui ont été
annoncés. Je suis comme vous. On peut mettre les indices, les cumuler. C’est soit une coïncidence
malheureuse, soit un plan, mais je dirais à nous de suivre cela. En fonction de l’évolution des choses,
je dirais: «Nous prendrons un certain nombre d’initiatives».