Parlement wallon

Questions orales

     

 Questions du 19/04/05

-

La pollution de la Sambre par du cyanure...

Question de Monsieur FONTAINE, Député Wallon, à Monsieur LUTGEN, Ministre de l’Agriculture, de l’Environnement et de la Ruralité sur:
" La pollution de la Sambre par du cyanure."


Monsieur le Ministre,
Chers collègues,
Les 21 et 22 mars derniers, une pollution au cyanure a été constatée dans la Basse-Sambre à hauteur de Roselies.
Le taux de cyanure mesuré à la sortie d’un égouttage desservant des particuliers et des industries était 16 fois supérieur à la norme admissible.
Cette pollution a provoqué d’important dégâts à la population de cette rivière.
Des milliers de poissons ont été décimés.
Je souhaiterais tout d’abord, Monsieur le Ministre, connaître les raisons de l’important retard qu’il y a eu quant à l’évacuation de ces poissons morts.
Une enquête a été ouverte pour déterminer la cause et l’origine de cette pollution.
Il est clair qu’il faudra déterminer si cette pollution est intentionnelle ou accidentelle et appliquer le principe du polluer-payeur en conséquence.
Selon la presse, Monsieur le Ministre, vous avez orienté vos soupçons vers le secteur industriel puisque la substance en cause est peu utilisée par les particuliers.
Je crois pour ma part qu’il est préférable d’attendre les conclusions de l’enquête avant de viser qui que ce soit.
Dès lors, un mois après cet incident, disposez-vous de plus amples informations quant à l’origine de cette pollution ?
D’autre part, les permis d’environnement des entreprises locales ne comportent-ils pas de dispositions spécifiques quant au rejet de substances chimiques présentant des risques pour l’environnement ?
Des mesures de contrôles et un registre de celles-ci ne sont-elles pas prévues pour chaque entreprise en vue de respecter les normes inscrites dans leur permis d’environnement ?
A quelle fréquence la Région Wallonne établit-elle des contrôles préventifs, s’il tel est le cas ?
Par ailleurs, cette pollution démontre aussi la nécessité de sensibiliser les particuliers sur les risques que représentent les rejets illicites à l’égout de produits polluants ou dangereux.
Le temps ou les huiles usagées et les produits chimiques de ménage passaient directement à l’égout n’est pas totalement révolu.
Ne serait-il pas opportun de mener des actions de sensibilisation et d’information comme cela l’a été concernant la problématique des feux de jardin ?

Je remercie Monsieur le Ministre pour les précisions qu’il m’apportera.
Réponse du Ministre LUTGEN,
L'enquête est ciblée, en fonction de l'origine géographique de la pollution, sur les principales sources potentielles d'exposition aux cyanures :
-activités de récupération des métaux (films photographiques, rayons X...);
-électrolyse (nickelage, chromage, zingage...) ;
-traitement des aciers (traitements de surface) ; -production de teintures, pigments, nylons ; -fabrication de pesticides ;
-industrie du charbon ( cokeries ).
Les pistes suivantes sont prises en considération :
-l'accident;
-La négligence, l'ignorance ou l'acte intentionnel ("nettoyage" sauvage d'un site industriel désaffecté sur lequel auraient été laissés en dépôts dans des conditions précaires des bains de cyanures ou des déchets contenant cette substance ).
Pour la réalisation de cette enquête qui est prioritaire, il convient de noter que la DPE peut compter sur la collaboration des polices locales de Châtelet et de Charleroi, notamment pour les observations sur le terrain et le recueil de témoignages et d'auditions.
L'enquête a fait l'objet des développements suivants :
-8 entreprises ont fait l'objet d'un contrôle qui n'a pas donné de résultats.
Des prélèvements dans des secteurs d'activités dont question ci-dessus ont été effectués et des analyses sont en cours.
-Deux sites désaffectés suspectés de détention de produits cyanurés ont également fait l'objet d'un contrôle de la DPE.
Des échantillons ont été prélevés mais n'ont pas donné de résultats significatifs
-Le trafic fluvial ayant transité dans la zone durant la période incriminée a fait l'objet d'une vérification.
A ce stade de l'enquête, la DPE n'a pas encore identifié le responsable de cette pollution.
Ce lundi 18/04/05, la DPE de Charleroi a constitué un groupe de travail qui se consacrera exclusivement à la recherche de nouvelles pistes, en collaboration avec les polices locales et l'ISSeP .
Le cyanure est toxique en contact direct.
Il est très soluble dans l'eau.
Il provoque une asphyxie cellulaire.
Il est très toxique pour les organismes aquatiques (algues, invertébrés, poissons).
Au niveau de la chaîne trophique, le risque de bio-accumulation du cyanure est extrêmement faible, voire nul.
Le potentiel d'accumulation au niveau des sédiments est également faible.
Dans l'eau, le cyanure s'oxyde ou se complexe en formant notamment des cyanométallates, ce qui a pour effet de diminuer fortement la toxicité.
J'ai demandé à mes services d'organiser des contrôles physico-chimiques de l'eau et des sédiments ainsi que des inventaires biologiques afin de vérifier l'état de la situation, d'évaluer l'impact de la pollution et la capacité de récupération du milieu.
5 stations seront échantillonnées dans la Sambre et 2 dans la Meuse.
Je peux déjà vous dire qu'à l'heure actuelle, le réseau de mesure physico-chimique nous indique que les concentrations en cyanure sont bien en-dessous des normes de qualité définies.
Le Service de la Pêche a organisé deux journées de ramassage des poissons (le 01 et le 05 avril).
Lors de la deuxième journée de ramassage, la Protection civile a fourni des conteneurs afin de récolter les poissons morts.
Ils ont été évacués à destination d'une filière d'élimination.
Ce sont presque 2,5 tonnes de poissons qui ont été repêchées.
Pour répondre à la question du rempoissonnement éventuel de la Basse Sambre est étudiée au niveau de mes services et des instances du Fonds Piscicole.
A ce stade, personne ne peut en effet dire quelle quantité de poissons il faudrait remettre pour qu'il soit réellement efficace et si la régénération naturelle des peuplements piscicoles ne pourrait pas se suffire à elle- même.
Dans un premier temps, des contrôles physico-chimiques de l'eau et des sédiments ainsi que des inventaires biologiques sont organisés par mes services afin d'évaluer l'impact de la pollution et la capacité de récupération du milieu.
En tout état de cause, les commissions provinciales concernées par la pollution interviendront en justice via les avocats mis à leur disposition par le Fonds et les indemnités qui seront, le cas échéant, obtenues en réparation du préjudice subi bénéficieront évidemment en priorité aux pêcheurs victimes de la pollution.
Un système de veille existe, le réseau de mesure permanent "Aquapol", développé par la DPE mesure en continu (un échantillonnage tous les quarts d'heure) une série de paramètres de la qualité de l'eau en plusieurs points stratégiques de notre réseau hydrographique.
C'est d'ailleurs une de ces stations qui nous a permis de détecter cette pollution.
Je compte à la lumière de cette expérience encore améliorer la réactivité.
De même, Monsieur Fontaine, les industries utilisant et rejetant des produits cyanurés font l'objet de conditions d'exploitation et de rejets spécifiques.
Le contrôle des entreprises fait partie des missions de la DPE.
Des actions de sensibilisation des particuliers concernant le comportement responsable et citoyen par rapport au rejet dans les égouts sont régulièrement menées.
En ce qui concerne le tourisme fluvial, hormis l'éventuel impact psychologique, cette pollution n'entravera normalement pas le tourisme fluvial sur la basse Sambre.
Comme je l'ai déjà évoqué lors des débats budgétaires, j'ai demandé et obtenu que le programme triennal de tourisme fluvial soit prolongé d'une année ce qui permettra d'assurer des investissements complémentaires renforçant le maillage du tourisme fluvial, notamment sur la basse Sambre, en particulier le relais nautique de Sambreville.
Quoi qu'il en soit, tous les moyens sont mis en reuvre afin de découvrir le(s) responsable(s) de cette pollution.
Une plainte sera déposée et réparation sera demandée.
Le bilan de cette pollution sera réalisé.
Les points positifs et négatifs seront relevés et analysés.
Des enseignements seront également tirés de cette malheureuse expérience afin de réagir encore plus efficacement face à ce type d'événement.