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La problématique du permis de travail pour ...
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Question orale de Monsieur le Député Philippe FONTAINE à Monsieur Jean-Claude MARCOURT, ministre de l’Economie et de
l’Emploi sur:
« La problématique du permis de travail pour les étrangers extra-européens ».
La presse du 10 février dernier nous relatait un fait plutôt étonnant sur lequel j’aimerais vous interroger.
Voici en quelques mots l’exposé des faits :
Un ingénieur civil mécanicien de nationalité libanaise avait postulé en 2000 suite à un appel d’offre de l ‘entreprise
DUFERCO – La louvière.
Choisi pour ses qualités professionnelles parmi un grand nombre de candidatures et après plusieurs épreuves de sélection,
ce dernier avait sollicité l’octroi d’un permis de travail de type B.
Or, ce sont les régions qui sont compétentes (Service de l'Immigration du Ministère de la Région wallonne de la Division
de l'Emploi et de la Formation professionnelle), pour l’octroi d’un tel permis.
Ce permis lui avait été accordé en 2000 et avait jusqu’ici été renouvelé annuellement comme la législation l’impose.
Après une période de 4 ans, cette personne – pensant légitimement être dans les conditions d’octroi et n’ayant reçu aucune
information lui permettant de penser le contraire - a introduit une demande pour bénéficier d’un permis de travail de type
A ( à durée illimitée).
On imagine sa surprise en apprenant que cette demande lui était refusée.
Quant à son recours introduit auprès du ministre compétent – c.-à-d. vous-même –, il connut le même sort.
Le problème proviendrait du fait que cette personne :
· D’une part : est originaire d’un pays n’ayant signé aucune convention internationale en matière d'occupation des
travailleurs avec la Belgique
· D’autre part : relève, selon son contrat de travail, de la catégorie de personnel dite « hautement
qualifiée », exclue du bénéfice de cet octroi par la réglementation.
Etant donné que la législation précise qu’après 8 renouvellements annuels, aucun permis B ne peut être accordé, ce refus
implique de facto une obligation de quitter le territoire wallon en 2008 !
Cette personne n’ayant semble-t-il pas l’intention de quitter son travail (où ses hautes responsabilités actuelles prouve
sa parfaite intégration) il s’est mis à la recherche de solutions alternatives.
Et c’est là que les choses deviennent assez cocasses.
En effet, l’alternative – légale - qu’il choisit fut de se domicilier en France tout en continuant à travailler en Belgique !
Solution d’autant plus avantageuse qu’en plus de lui permettre de continuer à travailler selon ses desiderata (et ceux de
ses employeurs), elle lui permet de bénéficier des avantages fiscaux qui en découlent.
Alors que la Wallonie revendique – légitimement d’ailleurs – la qualité de son accueil, l’expérience particulière vécue
par cette personne semble assez paradoxale et appelle à tous le moins quelques réflexions et commentaires de votre part.
J’aimerais donc, monsieur le ministre, vous posez les questions suivantes :
- Etes-vous au courant de cette affaire particulière ?
Quel est votre sentiment sur celle-ci ?
N’estimez-vous pas nécessaire de revoir cette législation qui semble une des plus contraignante au niveau européen ?
- Avez-vous déjà eu à traiter des recours pour des cas similaires ?
Si oui, combien ?
- Envisagez-vous de rencontrer vos collègues compétents en la matière (du fédéral et des autres régions) afin de
parvenir à un assouplissement de la législation dans des cas comme celui-ci ?
- D’après la presse, un nombre important de cadre de l’entreprise en question serait également domicilié
Outre-Quiévrain.
Confirmez-vous ce fait ?
- En attendant une éventuelle modification légistique comptez-vous mettre en place une procédure d’information plus
claire à l’attention des personnes concernées par la réglementation ?
Réponse du Ministre Jean-Claude MARCOURT,
Je prie l'Honorable Membre de bien vouloir trouver, ci-joint, les éléments de réponse.
Je souhaite d'abord rappeler que la réglementation relative à l'occupation des travailleurs étrangers est une
réglementation fédérale et que la Région ne dispose que d'une simple compétence d'exécution et d'administration en
délivrant, au cas par cas, les permis de travail.
Ainsi, les griefs relatés dans le journal "l'Echo" relatifs au refus d'octroyer le permis de travail « A » notifié à
Monsieur YARAK et adressés à la Région wallonne, auraient pu être adressés de la même façon à la Région flamande, la
Région de Bruxelles-Capitale et la Communauté germanophone qui appliquent tous, de la même façon, cette législation
fédérale.
En ce qui concerne cette législation, je souhaite attirer votre attention sur le champ d'application concernant les
dérogations en matière de délivrance de permis de travail :
-la réglementation relative à l'octroi des permis de travail reste de la compétence de l'Etat fédéral
(cf. loi du 30 avril 1999), la Région étant en charge de son application ;
-dans ce cadre, en tant que Ministre régional de l'Emploi, il m'est possible de déroger à certains motifs de refus
d'octroyer un permis de travail (A, Bou C). En effet, l'A.R du 9 juin 1999 portant exécution de la loi du 30 avril 1999
prévoit dans son article 38, §2 :
« L'autorité compétente peut déroger par décision motivée aux a/tic/es 8, 10, 12, 14, 21, 1° et 22, 2°, pour des cas
individuels dignes d'intérêt pour des raisons économiques ou sociales » ;
-ces articles concernent, à titre d'exemple, l'étude du marché de l'emploi (principe de priorité à la main d'oeuvre locale),
l'absence de conventions ou d'accords internationaux liant la Belgique avec le pays d'origine du travailleur concerné
(ce qui est le cas du Liban, pays d'origine de Monsieur YARAK), etc.
Les demandes de dérogations qui me sont adressées doivent toujours être motivées en raison d'intérêts économique ou social
et clairement définies par la législation.
Il ne m'est pas possible de déroger à d'autres motifs de refus que ceux énoncés par la législation.
Pour rappel, le permis de travail « A » (à durée illimitée) est accordé aux travailleurs qui justifient de 4 années de
travail couvertes par un permis « B » (durée d'un an max. et renouvelable)
Toutefois, le permis « A », nonobstant ce qui précède, ne peut être accordé aux travailleurs engagés comme personnel
hautement qualifié (càd quand le travailleur reçoit un salaire annuel brut d'au moins 32.261 euros et peut justifier des
qualifications nécessaires pour l'emploi visé).
Pourquoi cette restriction ?
Le législateur a mis clairement l'accent sur l'aspect temporaire de l'emploi de personnel hautement qualifié venu de
l'étranger.
Cette disposition vise à proposer une solution de facilité à l'employeur pour pallier au manque de personnel compétent sur
le marché de l'emploi.
Le législateur a voulu ainsi empêcher une immigration par le travail couverte par cette procédure de recrutement de
personnel hautement qualifié.
Cette discrimination a été relevée par mes services (DGEE, Service Immigration) et a été relayée au Conseil consultatif
pour l'occupation des travailleurs étrangers ainsi qu'aux réunions de concertation entre l'Office des étrangers et les
Régions (le 04.03.2004, le 10.09.2004 et le 19.10.2004 ).
Par ailleurs, dans le cadre de la réforme intervenue le 6 février 2003, la possibilité de renouveler le permis « B »
durant une nouvelle période de 4 ans a été consacrée.
Ainsi, le personnel étranger hautement qualifié peut se voir délivrer des permis de travail B sur 8 années au total mais
sera, au vu de la législation actuelle, toujours exclu de la possibilité de prétendre à un permis de travail « A » à durée
illimitée.
Or, en 8 années, il est évident que le travailleur ( et souvent sa famille qui l'accompagne) se crée des liens culturels,
économiques et sociaux forts avec notre pays.
De ce point de vue, il semble illogique de lui refuser à terme un titre de séjour illimité alors qu'un ressortissant
étranger non qualifié qui se voit octroyer un permis de travail à l'immigration peut obtenir un titre de séjour illimité
dès le début de la troisième année de présence sur le territoire belge.
Comme je l'ai déjà souligné précédemment, le sujet a été soumis à plusieurs reprises aux réunions de concertation entre
l'Office des étrangers et les Régions.
Il a été débattu dans un cadre plus large, englobant la question de l'opportunité d'accorder un séjour illimité au
personnel hautement qualifié.
Vu la difficulté d'une modification de la loi et de son arrêté royal d'exécution, une proposition d'adapter la formulation
pour les travailleurs hautement qualifiés a été évoquée.
Les données qui permettent d'examiner et d'apprécier ce point doivent encore être définies.
La prochaine séance du Conseil Consultatif pour l'occupation des travailleurs étrangers doit aborder cette problématique.
Concernant le cas particulier de Monsieur YARAK, un nouveau permis « B » comme personnel hautement qualifié lui a été
délivré pour la période allant du 30.11.04 au 29.11.05 (renouvelable)
En ce qui concerne les statistiques :
Le nombre de recours introduits à la suite d'un refus de Permis « A» pour personnel hautement qualifié en Région wallonne
est de :
En2000: 1
-En 2001 : 2
-En2002: 1 -En2003 :3
- En 2004: 2
Nombre de demandes (accordées) de permis « B » pour personnel hautement qualifié en Région wallonne est de:
En 2000: 615
-En 2001: 668
-En 2002: 601
-En 2003: 594
-En 2004 : 648
Ces chiffres démontrent que très peu de travailleurs étrangers hautement qualifiés font une demande de permis de travail à
durée illimitée.
Après leur période d'occupation clairement définie, ceux-ci retournent dans leur pays d'origine.
Concernant le nombre important de cadres de l'entreprise DUFERCO domiciliés Outre-Quiévrain, je tiens également à souligner
que le Gouvernement wallon n'a pas le droit de s'immiscer dans la gestion interne de sociétés privées.
Aussi, c'est la raison pour laquelle il m'est juridiquement impossible de solliciter DUFERCO afin de connaître l'endroit où
son personnel est domicilié.
Par ailleurs, la libre circulation des personnes et des travailleurs est une des quatre libertés fondamentales garanties
par le traité instituant la Communauté européenne.
Quant à la mise en place d'une procédure d'information claire à l'attention des personnes concernées, je vous invite à
consulter le site http://www.emploi.wallonie.be, vous pourrez y trouver une description simplifiée de la mesure concernant les
permis de travail ainsi que l'ensemble de la législation et des documents nécessaires à l'introduction des demandes.
J'espère ainsi avoir répondu à la question de l'Honorable Membre.