Parlement wallon

Questions orales

     

 Questions du 27/01/04

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La volonté du collège des bourgmestre et échevins...

Question orale de Philippe FONTAINE, Député wallon, Président du Groupe MR au Parlement wallon à Monsieur Charles MICHEL, Ministre des Affaires intérieures et de la Fonction publique sur :
« La volonté du collège des bourgmestre et échevins de la Ville de Charleroi de sponsoriser les véhicules communaux par des entreprises privées ».


J’ai pris connaissance avec intérêt du projet envisagé par le collège des bourgmestre et échevins de la Ville de Charleroi relatif au renouvellement de sa flotte de véhicules.
D’après les informations données par la presse, il s’agirait d’un projet visant à faire acheter 20 véhicules destinés au transport du personnel communal (service de nettoyage) par des entreprises privées.
Une firme intéressée ferait l’acquisition d’un véhicule en leasing et en assurerait donc entièrement les frais (entretiens, réparations, assurances, …).
La Ville ne prendrait en charge que le carburant.
La voiture serait, en contrepartie, décorée au logo de l’entreprise où d’un de ses produits.
Cette initiative est, semble-t-il, une première en Wallonie.
Certes, des véhicules dépendant de pouvoirs publics sont déjà recouverts de publicités (TEC wallon par exemple) mais il s’agit simplement du paiement d’un montant pour pouvoir afficher la publicité sur le véhicule.
Il n’est en aucun cas question de payer directement le véhicule lui-même.
C’est cette différence fondamentale qui pose un vrai débat quant à la problématique du sponsoring d’activités publiques.
En effet, si je me réjouis du fait que nos collègues de la majorité reconnaissent les vertus du sponsoring et de l'intervention du secteur privé dans le secteur public, toujours est-il que je m’interroge sur les balises fixées à cette intervention.
La presse m’informe que les publicités devront se conformer aux bonnes moeurs et à l’ordre du public sans caractère raciste ni xénophobe. Très bien.
Par contre, je n’ai pas d’information quant à la nature des entreprises qui pourront accéder à ce système.
Qu’en est-il des intercommunales, organismes d’intérêt public ou tout autre organisme dans lequel il y a une participation publique en général et de la Région wallonne en particulier ?
Si ces organismes devaient s’engager dans un tel système, ne devrait-on pas considérer qu’il y a un problème au niveau du financement public des communes ?
Au niveau déontologique, plusieurs questions se posent :
§ Comment garantir l’impartialité des décisions de la commune pour toute problématique qui concerne une entreprise qui finance un véhicule communal ?
§ Une entreprise qui acquiert plusieurs véhicules ne sera-t-elle pas considérée comme partenaire privilégié de la commune, faisant de ce fait une concurrence déloyale aux autres entreprises ?
§ Si ce système devait se généraliser, il est évident que les grandes entreprises seront plus intéressées par les grandes villes que par les plus petites.
De nouveau, n’y aura t’il pas alors un problème au niveau du financement des communes ?
Réponse du Ministre Charles MICHEL,
La question de Monsieur le Député a retenu toute mon attention.
J'ai pris connaissance avec intérêt du projet envisagé par le Collège des Bourgmestre et Echevins de la Ville de CHARLEROI relatif au renouvellement de sa flotte de véhicules destinés au transport du personnel communal et qui seraient acquis et mis à disposition par des sociétés privées.
Il n'existe en effet pas de précédents comparables à ce projet.
Toutefois, un parallèle pourrait être fait avec le projet, annoncé par la Ville d'ANDENNE en juin 2002, de faire sponsoriser les véhicules de police de sa zone par certaines firmes telles que des sociétés pétrolières ou de téléphonie.
Il semblait dans ce cas que le bourgmestre envisageait plutôt l'apposition de publicité sur les véhicules et non la mise à disposition pure et simple par des entreprises.
Le cas est donc différent mais des questions identiques peuvent être posées quant aux limites et aux conditions dans lesquelles une commune, voire plus largement un pouvoir public, peut rechercher des véhicules pour les services communaux en vue de rechercher un financement alternatif?
Premièrement,
il est bien entendu que, sous toutes réserves des remarques qui suivent, le recours à de telles techniques devrait, le cas échéant, être respecté la loi sur les marchés publics.
Il conviendrait également de vérifier que l'accord passé entre la Ville et l'entreprise ne puisse pas être interprété comme une libéralité faite à la commune.
Deuxièmement,
une telle pratique me semble devoir être exclue pour les véhicules communaux auxquelles certaines missions d'autorité ou de sécurité sont attachées (véhicules de police et de pompiers), voire pour des véhicules d'entretien de voiries.
Troisièmement,
il importe également de préserver la confiance que doivent inspirer les agents communaux dans leurs fonctions.
Notamment, les usagers ne doivent pas pouvoir avoir le sentiment qu'un traitement inégal leur sera réservé en raison du lien manifeste de la commune avec l'une ou l'autre entreprise.
Quatrièmement,
il se peut effectivement que l'image ou le message véhiculé par l'une ou l'autre entreprise soit incompatible avec l'image qu'une commune, et plus largement un service public, doit pouvoir défendre.
Mais dans ce cas, il me semble qu'il appartiendrait aux autorités communales de se réserver la faculté d'écarter l'offre de prix ou de service présenté par l'entreprise dans le cadre des conditions de l'appel d'offre.
Afin de fixer les limites du système envisagé par la Ville de CHARLEROI, dans le cadre de l'exercice de la tutelle, une analyse approfondie devrait être faite de la décision du Conseil communal qui adopte une telle mesure.
L'analyse sera faite sur une base de légalité et de l'intérêt général.
Enfin, quant à votre question sur la nature des entreprises qui pourraient soumissionner à un tel marché, il est bien entendu que, si des intercommunales par exemple, souhaitaient participer au marché, il conviendrait également de vérifier que cette activité relève bien de son objet social.
Le dossier mérite bien entendu une analyse plus poussée.
J'ai donc chargé mon administration d'évoquer la délibération de la Ville de CHARLEROI.
Je ne manquerai pas d'informer Messieurs les Députés de la suite qui sera donnée à ce dossier après qu'il soit analysé dans le cadre de la tutelle.