Parlement wallon

Questions orales

     

 Questions du 25/06/03

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La politique de compensations industrielles en ce  ... 
Question orale de Monsieur le Député Philippe FONTAINE à Monsieur Serge KUBLA, ministre de l’Economie, des PME, de la Recherche et des Technologies nouvelles, sur:
«La politique de compensations industrielles en ce qui concerne les marchés militaires»


Le dernier Salon aéronautique du BOURGET ( désormais baptisé Paris Air Show) fut l’occasion - pour ceux qui l’ignoraient - de constater l’importance et la qualité des entreprises wallonnes du secteur.
Présentes en nombre (41), plusieurs de ces entreprises ont même signé d’importants contrats, apportant une brise d’optimisme à un secteur durement touché par la crise actuelle, et paraissant confirmer une reprise prévisible dans les prochaines années.
Je me félicite bien évidemment de ces nouvelles encourageantes.
Toutefois, ce salon a également été l’occasion pour nos industriels (travaillant à la fois dans le secteur civil et militaires) de soulever un problème que j’aimerais évoquer aujourd’hui, à savoir la question des compensations industrielles dans les contrats de matériel de défense, que beaucoup estime – à juste titre il me semble – trop peu importantes.
Cette question du « juste retour » en matière d’investissements militaires n’est à mon avis ni neuve, ni négligeable.
Il me paraît normal en effet, qu’à l’instar de la très grande majorité des pays, la Belgique – et donc la Wallonie - puisse faire profiter ses entreprises des contrats de défense qu’elle signe.
Pour un petit pays comme le notre, les retours sur les achats militaires sont d’une grande importance, d’un point de vue économique bien sûr (donc aussi social à travers l’emploi qui en découle) mais aussi en matière de capacité d’innovation et de transfert de technologie.
Chacun se rappellera que la législation belge en la matière a connu - en 2001 - des modifications importantes dont l’absence de protocole entre les ministères compétents (Défense et Economie (pour le volet compensation) ) a malheureusement empêché la mise en œuvre jusqu’il y a peu.
Si cette nouvelle réglementation apporte des avancées salutaires en terme de transparence, de clarification et de contrôle, (et devrait par là permettre d’éviter un scénario style « Agusta bis »), son efficacité économique par contre ne fait pas l’objet d’une reconnaissance unanime.
En effet, la législation modifiée en 2001, pêche par le caractère facultatif des compensations industrielles qu’elle introduit.
Elle définit les critères d’opérationnalité et du prix comme primordiaux, le critère de compensation quant à lui ( le return ) étant subsidiaire.
Il n’intervient en fait que pour départager des offres similaires ou comparables pour les deux premiers critères.
Ainsi, par exemple, si une seule offre est rentrée – ce qui est souvent le cas en matière de défense – la possibilité de compensation n’est même pas envisagée.
Si deux offres similaires sont présentés sans inclure de compensation, la situation est identique.
En cette période conjoncturelle difficile – dans le domaine civil surtout -, il ne me semble pas normal qu’un tel levier économique soit laissé de côté.
Quand on voit le return obtenu récemment par la Pologne pour son achat de 48 F-16 américains ( qui dépasse les 100% de l’investissement) on ne peut que regretter que le système de compensation belge ne permette pas à nos entreprises de bénéficier d’un tel retour salutaire sur les dépenses de la défense nationale.
Et ce d’autant plus que ce serait surtout le secteur des technologies avancées (aéronautique, électronique,…) qui serait gagnant, soit un secteur structurant et d’avenir.
Pour terminer, je voudrais insister ici sur l’urgence d’une clarification dans cette matière.
En effet, vous n’êtes pas sans savoir que la modernisation en cours de l’armée belge s’accompagnera d’achats conséquents, estimés à plus de 400 millions par an d’ici 2015.
Alors que la signature tardive du Protocole entre les deux ministres compétents aurait déjà empêché nos entreprises de bénéficier de compensations pour les contrats signés en 2002 et 2003, il serait dommage que le phénomène se reproduise lors du remplacement annoncé pour bientôt des fameux Sea King de la Force Aérienne, contrat estimé à un montant de plus de 250 millions EUR.
J’aimerais dès lors, monsieur le Ministre, vous posez les questions suivantes :
· Partagez-vous mon analyse ?
Bien que les nouvelles procédures soient depuis peu – enfin - opérationnelle, un système de compensation automatique ne vous paraît-il pas plus indiqué dans ce domaine que le système facultatif ?
Comptez-vous, si ce n’est déjà fait, mettre ce dossier sur la table du formateur afin que celui-ci soit traité en urgence ?
· L’exemple hollandais avec un système de compensation automatique à 100% est-il envisageable en Belgique ?
Si non, n’y aurait-il pas lieu de fixer un pourcentage minimal de compensation, bien entendu liée à une clé de répartition régionale à définir ?
Le chiffre de 80 % pourrait-il être par exemple être une limite raisonnable ?
· Quelles sont les limites imposées par le droit de la concurrence européen, étant entendu que le commerce des armes n’est pas visé par l’ensemble des dispositions de celui-ci en matière commerciale ?
· Si je ne me trompe, la région wallonne dispose de deux représentants au sein de la commission (Conseil ) des Compensations industrielles.
Ceux-ci sont nommés par le CESRW.
Qui sont ces représentants ?
De quand date la dernière réunion de la commission en question ?
Est-il vrai que celle-ci ne s’est plus réunie depuis un temps certain ?
Ne conviendrait-il pas de la réactiver ?
Réponse du Ministre Serge KUBLA,
Je partage, pour l'essentiel, l'analyse de l'honorable Membre.
Bien que les nouvelles procédures soient depuis peu enfin opérationnelles sur papier,
j'espère qu'elles le seront rapidement dans les faits.
Je suis donc favorable aux compensations économiques et industrielles dans le cadre des achats de la Défense Nationale lorsque le prix et la qualité sont équivalents au niveau des offres et que la compétition permet d'obtenir les meilleurs propositions et donc pas ou peu de surcoût par rapport à une offre sans retour et tant qu'il n'y pas de politique, de marché et de règles au niveau européen.
Je le suis d'autant plus que les autres pays continuent à pratiquer la politique du « juste retour » et à réclamer des compensations économiques (ex : les Pays-Bas souvent 100 %)
J'ai demandé que les négociateurs du prochain Gouvernement Fédéral puissent examiner ce dossier.
Une étude de Price W. Cooper aux Pays-Bas démontre par ailleurs que l'obligation de compensations ne porte pas atteinte au bon fonctionnement du marché.
Le maintien d'une clé de répartition entre les Régions reste pertinent sur l'ensemble des programmes et non programme par programme.
Un minimum obligatoire de retours devrait être discuté entre le Pouvoir Fédéral et les Régions.
Le chiffre de 80 % pourrait être une limite raisonnable.
En ce qui concerne la représentation de la Région wallonne au sein de Conseil des compensations industrielles, il est exact que ses 2 représentants sont issus du C.E.S.R.W.
Il s'agit de Monsieur Joseph Henrotte et Monsieur Pol Lenaerts.
Ce Conseil, par ailleurs présidé par Monsieur Ph. Suinen le Directeur Général de l'AWEX, s'est réuni pour la dernière fois le 6 février 2003.
Enfin, je suis d'avis qu'il conviendrait de réactiver l'actuel Conseil et de revoir notamment ses compétences et la représentation des Régions.