Parlement wallon

Questions orales

     

 Questions du 18/09/02

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La situation de détresse des services d’aides   ...
Question orale de Monsieur Philippe Fontaine, Député wallon, Président du Groupe MR au Parlement wallon à Monsieur Thierry Detienne, Ministre des Affaires sociales et de la Santé concernant:
«La situation de détresse des services d’aides familiales»


Pendant les vacances, nous avons pu prendre connaissance dans la presse, de la situation à laquelle sont confrontés les services privés d'aides familiales.
Le fossé entre les moyens reçus et les demandes croissantes se creuse et ce sont les patients qui en souffrent.
Les aides familiales n'ont plus suffisamment de temps pour aider les patients vu la surcharge de travail, quand les services ne doivent pas purement et simplement refuser certaines demandes par manque d'argent.
Les services fonctionnent grâce à un quota d'heures subventionnées par la Région, à hauteur de 80 %, fixé à la fin 1998.
Ce quota est resté inchangé depuis, alors que la demande, elle, ne cesse d'augmenter (+ 10 % pour certains entre 1999 et 2001).
Ces services d'aides familiales cadrent parfaitement avec la volonté du Gouvernement wallon exprimée dans le CAWA, d'encourager le maintien à domicile.
Certaines personnes n'ont d'ailleurs d'autres choix, étant donné le manque de place en maisons de repos et les prix pratiqués par celles-ci.
Certains services préfèrent licencier leurs aides familiales pour conserver une situation financière saine alors que la demande existe et est croissante, comme je l'ai dit.
De plus, dans le secteur public - les C.P.A.S. -, le quota d'heures n'est pas atteint.
Ne pourrait-on envisager un transfert de l'un vers l'autre?
Ne risquons-nous pas l'émergence d'un travail au noir presté par des personnes n'ayant peut-être pas les qualifications requises?
Il semble que vous soyez conscient du problème et que vous cherchiez une solution avant l'entrée en vigueur d'un décret qui refondra tout le système prévu dans deux ans.
Quelles solutions transitoires avez-vous trouvées?
Quelles sont les lignes de force du projet de décret en préparation?
Quand comptez-vous le présenter au Gouvernement, le déposer au Parlement?
Les acteurs du secteur ont, semble-t-il, identifié une des causes de leur situation difficile: au-delà du vieillissement de la population, la diminution du nombre de jours d'hospitalisation.
Cette situation que nous connaissons, aujourd'hui, résulte de la décision du Gouvernement fédéral, dans les années 1990, de diminuer le nombre de lits d'hôpitaux.
Ces personnes se retrouvent alors chez elles, sans être totalement rétablies, leur état de santé ne leur permet pas d'être autonomes et elles font appel à ces services d'aides familiales.
Il y a certes une économie dans le secteur hospitalier, mais les coûts se sont répercutés sur le patient et sur les services d'aides familiales.
Une approche globale et intégrée du secteur soins de santé ne pourrait-elle pas éviter ces effets pervers?
N'éviterait-elle pas une concurrence malsaine entre prestataires, au détriment du bien-être des patients?
Quelles initiatives avez-vous prises ou comptez-vous prendre en ce sens?
Réponse du Ministre Detienne,
Comme vous le soulignez vous-même, la volonté du Gouvernement wallon clairement exprimée dans le CAWA est d'encourager le maintien à domicile.
Cette problématique est donc prioritaire pour mon cabinet dans le cadre de cette deuxième partie de législature.
Avant de préciser mes intentions notamment en matière de nouvelle réglementation, il convient de faire la distinction entre d'une part, certaines problématiques relevant de la gestion d'un opérateur et d'autre part, le réel problème relatif aux réponses qu'il convient d'apporter dans le cadre d'une politique volontariste du vieillissement en Région wallonne.
En effet, vous relevez que, et je vous cite «certains services préfèrent licencier leurs aides familiales pour conserver une situation financière saine alors que la demande existe et est croissante».
Je tiens à préciser que chaque opérateur est informé du contingent-heures annuel qui est mis à sa disposition par la Région et qu'il ne peut présupposer d'une augmentation de celui-ci sans notification ministérielle.
Certains services mettent en oeuvre une politique de recrutement intensif qui ne tient pas suffisamment compte de l'évaluation de leur consommation.
Cela traduit une insuffisance de contrôle budgétaire, donc un problème relevant de la gestion quotidienne de ce qu'on doit convenir d'appeler une entreprise.
En aucun cas, la Région wallonne ne peut être tenue pour responsable d'éventuels licenciements contrairement à ce que laissent croire certains opérateurs.
Et d'ailleurs, ce raisonnement est valable pour l'ensemble des services du secteur, je crois qu'il est bon de le rappeler.
La situation actuelle en matière de contingent est la suivante.
Pour 2001 le secteur public, essentiellement constitué des C.P.A.S., disposait de 1.474.706 heures dont 1.409.321 ont été consommées, ce qui implique une sous-utilisation de 65.385 heures.
Le secteur privé disposait de 3.918.583 heures et 3.944.431 heures ont été consommées.
Le dépassement était donc de 25.848 heures.
La question relative à un transfert des heures non utilisées par les C.P.A.S. vers les services privés a été envisagée au sein de mon cabinet.
II convenait, à notre avis, avant toute décision éventuelle de transfert, d'attirer l'attention des C.P.A.S. sur cet état de fait.
L'Union des villes et des communes a été sollicitée de façon précise sur cette problématique et nous a fait des propositions qui sont aujourd'hui opérationnalisées et feront l'objet d'une évaluation fin 2002.
S'il apparaît suite à cette évaluation, que la sous-consommation du secteur public se confirme et persiste, je prendrai alors les mesures permettant un glissement des heures non consommées vers le secteur privé.
Mais pas avant d'avoir eu la preuve qu'elles ne seront pas utilisables directement dans le secteur public.
Avant d'envisager une éventuelle augmentation des contingents et ses incontournables retombées financières, il convient de repréciser clairement et d'objectiver les méthodes pour l'attribution d'heures sur la base des besoins de la population, en tenant compte de toute une série de critères dont la distribution géographique n'est pas la moindre.
La problématique du contingent n'est qu'une des facettes de la question bien plus large de ce qu'il est convenu d'appeler le «maintien à domicile» auquel je préfère le concept d'«accompagnement à domicile».
Celui-ci fera l'objet d'une réglementation dont les lignes de force se développent comme suit, puisque vous avez souhaité en connaître la teneur:
- un décret-cadre relatif à l'accompagnement à domicile organisé sur la base territoriale à partir des zones de soins intégrés à domicile;
- trois arrêtés portant sur les services d'aides familiales, la coordination et la biotélévigilance.
Je présenterai un avant-projet de décret avant la fin de l'année au Gouvernement.
D'ici là, les prestataires seront informés et consultés, suivant en cela mon habitude, depuis que je suis à la tête du Département des Affaires sociales et de la Santé.
Vous faites également état, Monsieur Fontaine, d'une nécessaire approche intégrée du secteur des soins de santé, afin d'éviter certains effets pervers dont la concurrence malsaine entre prestataires au détriment du bien-être des patients.
Sachant que nous sommes devant une configuration institutionnelle fragmentée en ce qui concerne les compétences de santé, mon intention d'organiser la coordination des soins et services sur la base des zones de soins intégrés à domicile - en rapport avec les initiatives prises dans le secteur de la santé, bien entendu - va tout à fait dans le sens de l'approche globale et intégrée que vous prônez.
Quant à la concurrence malsaine entre opérateurs que vous redoutez, le fait d'objectiver les attributions d'heures et de définir clairement les limites d'intervention de l'accompagnement à domicile - ce qui sera fait dans le cadre de la future réglementation - devrait permettre d'éviter cet écueil.
On ne peut pas tout faire au travers de l'accompagnement à domicile, il convient de déterminer des règles du jeu qui, aujourd'hui, à mon avis, restent trop floues.
Enfin, comme vous le savez, le Gouvernement wallon a chargé un consortium interuniversitaire, d'étudier la mise en place d'une assurance autonomie dans notre Région.
Les résultats définitifs sont attendus pour la fin de cette année et une initiative du Gouvernement en la matière devrait être prise, sans doute, dès 2003, mais ceci appartient aux débats des semaines à venir.
Il va de soi que cette assurance autonomie aura une influence prépondérante sur l'offre de services en matière d'accompagnement à domicile et notamment les prestataires familiaux.
Mais je rappelle que l'assurance autonomie joue sur la solvabilité des bénéficiaires et non pas sur le financement des services.
On n'a donc pas résolu un problème par l'autre.
Il donc plus important encore que nous disposions d'un cadre réglementaire adapté à ces nouveaux défis.
Et c'est précisément le défi que je souhaite pouvoir relever dans les semaines qui viennent et avec l'espoir de pouvoir vous en informer au plus vite. (Applaudis - sement de M. Bayenet et sur les bancs Écolo.)
Réplique de Philippe Fontaine
Je remercie Monsieur le Ministre pour les précisions qu'il m'a apportées.
Je ne lui demandais d'aller si loin en matière de réglementation.
Je citais un certain nombre de cas précis en ce qui concerne le problème spécifique des aides familiales et vous m'avez répondu nettement au-delà de ce que je vous demandais.
Je ne vais donc pas, aujourd'hui, vous dire que ce que vous m'avez répondu me donne totalement satisfaction, parce que, évidemment, en ce qui concerne les projets de décret, je demande à voir.
Je souhaite simplement, en ce qui concerne les transferts des heures non utilisées entre secteur public et secteur privé, que vous soyez particulièrement attentif parce qu'il me revient qu'il y a quand même des C.P.A.S. où il y a des problèmes à ce niveau-là.
Il semblerait que les heures demandées n'ont pas été accordées.
Je ne sais pas où se trouve le problème, soit le C.P.A.S. ne dit pas nécessairement la vérité, soit il y a un problème au niveau de la transmission des informations.
Je pense donc qu'une évaluation est absolument nécessaire afin que les heures qui peuvent être utilisées, le soient réellement puisque manifestement il y a un manque.