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L’accord du Gouvernement sur le projet de
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Question orale au Ministre DARAS, Ministre des Transports, de la Mobilité et de l’Energie, sur:
« L’accord du Gouvernement sur le projet de décret libéralisant le marché du gaz »
Vous me permettrez de rappeler, en guise d'introduction, que le 12 avril 2001 était voté à l'unanimité le décret relatif à
l'organisation du marché régional de l'électricité.
Ce décret contenait, entre autres, une définition des sources d'énergie renouvelables très restrictive, des objectifs de
réductions de gaz à effets de serre très ambitieux et un mécanisme de certificats verts permettant de favoriser le
développement des sources d'énergie renouvelable wallonne.
Ce 27 septembre 2001, le Gouvernement wallon, dans le cadre de l'analyse en première lecture du décret relatif à
l'organisation du marché régional du gaz, décidait de modifier, via le décret gaz, le décret «électricité».
Il propose d'insérer un article 48 modifiant l'article 38, § 2, alinéa 2, du décret «électricité».
Or, l'article 38, § 2, du décret «électricité» attribue des certificats verts aux producteurs d'énergie renouvelable en
proportion du taux d'économie de dioxyde de carbone généré par cette production.
Le mode de calcul décrit dans le décret «électricité» plafonne toutefois l'attribution des certificats verts à deux par
Mégawatt/heure produit.
En effet, les centrales de cogénération à partir de biomasse permettent, outre la production d'électricité verte, de
produire de la chaleur et engendrent donc, par ce fait, une économie d'énergie et de dioxyde de carbone supplémentaire à un.
L'article 48, § 2, alinéa 2, du décret «gaz» apporte une exception à ce mécanisme: il limite à un seul certificat vert les
Mégawatt/heures produits à partir d'installations d'une puissance supérieure à 5 MW/h.
En d'autres termes, il pénalise fortement les grosses installations d'électricité verte telles que les centrales de
cogénération à partir de biomasses.
Alors que dans le décret «électricité», le législateur wallon, ambitieux, envisageait de faire mieux que les objectifs
imposés à Kyoto, sans toutefois utiliser toutes les possibilités permises par l'Union européenne pour y arriver - ce que
l'on peut résumer par «faire mieux avec moins» -, force est de constater qu'à nouveau, par le biais de l'article 48 du
décret «gaz», on nous conduit vers une situation étonnante.
En effet, on propose aux députés, qui ont voté à l'unanimité un texte, une modification du système d'octroi des certificats
verts à l'égard des grosses unités de cogénération.
On est en mesure de se poser la question de savoir si on ne va pas à l'encontre du développement durable en Région wallonne.
En effet :
- on se coupe ainsi d'un potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre important alors que nos objectifs
sont ambitieux et nos moyens pour y arriver faibles;
- on néglige le développement d'une filière de production d'énergie renouvelable rentable et en plein développement;
- on ne profite pas de notre potentiel forestier, source d'énergie renouvelable unique, par rapport aux autres sources
d'énergie renouvelables que sont le vent, le soleil et l'hydroélectricité où le potentiel wallon est plus faible;
- on met un frein à plusieurs investissements annoncés à court terme - chiffrables à plusieurs centaines de millions de
francs belges - dans nos régions boisées, qui seraient source d'emploi et d'activités économiques en tout genre;
- on supprime un débouché important de vente des produits forestiers pour les communes forestières de Wallonie déjà
durement frappées par la maladie du hêtre et les tempêtes françaises;
- on change les règles du marché des certificats verts «en cours de partie»;
- on décide de favoriser les petites unités de cogénération au détriment des autres alors que rien de tout cela n'a été
envisagé dans le décret électrique;
- on pourrait aisément revoir à la hausse le nombre de certificats verts émis afin de rassurer certains sur leurs craintes
de voir quelques grosses unités de cogénération constituer un oligopôle sur le marché des certificats verts.
En effet, rien n'empêche le Gouvernement wallon de revoir les chiffres d'émission de certificats verts à la hausse, sur
base d'un rapport de la CWAPE qui irait en ce sens;
- aucune justification théorique ou matérielle ne justifie le chiffre de 5 MW/h.
Bref, au regard de ces considérations, on est en mesure de se poser la question de savoir s'il sera réellement possible
d'atteindre les objectifs de Kyoto si on se prive des instruments les plus performants pour y arriver.
Plus spécifiquement, Monsieur le Ministre, pourriez-vous nous dire sur quelle base vous avez choisi le chiffre de 5 MW/h?
Quelles sont les préoccupations qui vous animent pour que vous utilisiez un décret relatif au gaz afin d'apporter un
amendement au décret électrique qui avait pourtant été voté à l'unanimité par le Parlement wallon?
Pourquoi changer les règles du jeu en cours de partie, alors qu'il était tout à fait possible de revoir à la hausse le
nombre de certificats verts diffusés ?
Et enfin, pourquoi négligez-vous le développement d'une filière dg, production d'énergie renouvelable rentable et en plein
développement, et pour laquelle nous disposons, en Wallonie, d'un potentiel extraordinaire, par rapport aux autres sources
d'énergie renouvelables que sont le vent, le soleil et l'hydroélectricité?
Réponse du Ministre Daras,
Je voudrais d'abord préciser qu'à l'heure actuelle, nous en sommes au stade de l'avant-projet de décret.
Je ne vous reprocherai pas d'être rapide sur la balle - pourquoi pas?
- mais nous aurons encore certainement l'occasion d'approfondir le sujet ultérieurement
Quelle est la logique du système?
Je pense que c'est cela l'essentiel.
Nous avons effectivement, en vertu de ce décret, créé un mécanisme de soutien à la production de l'électricité verte via
le mécanisme des certificats verts.
Rappelons que ce mécanisme vise à promouvoir les sources d'énergie renouvelables et les installations de cogénération de
qualité qui contribuent d'une part, au développement socio-économique de notre Région - nous sommes bien d'accord - et,
d'autre part, aux objectifs de réduction de gaz à effet de serre imposés par Kyoto, et - c'est important - dont la
rentabilité ne serait pas assurée dans un marché libéralisé.
L'électricité verte est l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables ou de cogénération de qualité
dont la filière de production génère un taux minimum de 10 % d'économie de C02 par rapport aux émissions de C02 d'une
production classique dans des installations modernes de références.
Une limite de 20 MW a été fixée pour l'électricité produite à partir d'installations hydroélectriques ou de cogénération à
partir de combustibles fossiles parce que le jour où les certificats verts seront échangeables au niveau européen, nous ne
souhaitons pas que notre marché soit saturé par l'électricité produite par les grosses installations hydroélectriques que
l'on trouve, entre autres, dans le nord de l'Europe.
L'octroi des certificats verts par MW/h produit est fonction du taux d'économie C02 de la filière.
Pour les filières de cogénération de qualité à partir de sources d'énergie renouvelables, ce taux d'économie de C02 peut
être supérieur à 1, ce qui peut paraître paradoxal.
Comment peut-on économiser plus de 100 % de C02?
On comptabilise d'une part, la source d'énergie renouvelable et, d'autre part, la technique de cogénération avec production
de chaleur.
Effectivement, il y a un cumul du taux d'économie de C02 venant des deux côtés.
Le décret électricité plafonne ce taux d'économie de C02 à 2.
Les installations de production d'électricité à partir de sources d'énergie renouvelables bénéficieront, sans limite de
puissance, de l'octroi de certificat vert - à l'exception des installations hydroélectriques de plus de 20 MW.
Cette absence de limite de puissance - j'attire votre attention sur ce point - résulte d'un amendement approuvé par le
Parlement lors de la discussion du décret «électricité».
Un seuil de 20 MW avait été proposé, car au-delà de ce seuil, la rentabilité était suffisante et qu'il y avait un risque
pour que des pays voisins autorisent des certificats verts pour des puissances supérieures à 20 MW.
Ce risque n'existe pas pour la cogénération, ne serait-ce que parce qu'aujourd'hui aucun pays voisin n'a prévu --
contrairement à nous qui sommes déjà dans une situation plus favorable pour notre industrie - de certificat vert pour
la cogénération.
Par conséquent, nous estimons qu'il n'y a pas lieu d'attribuer des certificats verts pour des installations qui seraient
réalisées de toute façon car rentables par elles-mêmes.
En vertu de l'article 38 du décret «électricité» tel que modifié par l'article 48 de l'avant-projet dont vous avez pris
connaissance, la situation serait la suivante :
- les installations de cogénération de plus de 20 MW fonctionnant à partir de biomasse recevront des certificats verts en
rapport avec l'économie de CO2 générée grâce à la biomasse, mais sans tenir compte du gain lié à la cogénération.
Elles auront donc des certificats verts, mais on peut dire que ce sera limité à 1;
- les installations - cogénération + biomasse - comprises entre 5 et 20 MW recevront des certificats verts en tenant compte
de l'économie de CO2 résultant de la cogénératiion et de la biomasse, avec un maximum de 1 certifiait vert par MW/h produit,
parce qu'elles n'ont pas besoin de plus pour être rentables;
- pour les installations inférieures à 5 MW, ce plafond est porté à 2, parce qu'elles ont besoin de ce soutien pour être
rentabilisées.
Je dois vous dire que les rapports avec la Commission européenne ne sont pas simples, même dans le domaine énergétique et
même si elle veut encourager des énergies renouvelables.
Mais, il faut noter que dans son encadrement très strict des aides d'Etat pour la protection de l'environnement, la
Commission n'accepte des aides que dans la mesure où celles-ci compensent un surcoût de production.
Sans ce seuil intermédiaire de 5 MW, il faudrait relever sensiblement le quota de certificats verts - vous l'avez signalé -
sous peine de voir leur valeur chuter fortement.
Mais cela peut avoir un effet pervers, c'est-à-dire que certains industriels pourraient être incités à fractionner
artificiellement leur production d'électricité.
Cela aurait des conséquences néfastes sur les coûts d'investissements et les rendements d'utilisation.
Ce seuil de 5 MW engendre beaucoup moins de risques face à ces risques d'effets pervers.
Il ne s'agit pas d'un seuil arbitraire mais d'une limite technologique très simple.
En dessous de 5 MW, on utilise des moteurs qui, en général, fonctionnent de manière intermittente et sont moins rentables.
Au-delà de 5 MW, on utilise des turbines à utilisation quasi permanente, leur assurant une grande rentabilité et qui ne
nécessitent pas d'aide supplémentaire.
Voilà donc les raisons de la modification que nous proposons.
Comme je vous l'ai dit, je suis aujourd'hui convaincu que nous allons dans la bonne direction, mais nous n'en sommes qu'au
stade de l'avant-projet.
Nous allons recueillir toute une série d'avis et envoyer le texte au Conseil d'Etat.
Le texte sera ensuite déposé au Parlement.
Nous aurons donc sans doute, l'un comme l'autre, l'occasion d'approfondir cette problématique afin de trouver la meilleure
réponse possible à ce problème.
D'autre part, il me semble que vous avez dressé un tableau un peu excessif.
Par exemple, avec mon collègue José Happart, nous avons lancé un programme «bois-énergie» qui doit effectivement permettre
de valoriser des sous-produits valorisables forestiers dans les communes sur le territoire desquelles il y a des forêts
qui ont des sous-produits valorisables.
C'est aussi une dimension biomasse que nous souhaitons développer et qui peut être très intéressante.
Réplique de Philippe Fontaine,
Je remercie M. le Ministre pour sa réponse détaillée qui me donne un certain nombre d'éclaircissements sur la manière dont
la limite de 5 MW/h a été fixes.
Je pense effectivement que le débat ne fait que commencer et c'est pour ça que j'ai voulu l'initier ici.
Je pense que c'est aussi ici qu'on doit poser des questions de ce genre.
Je pense aussi que tout le problème réside dans la manière dont on évalue la rentabilité pour les entreprises, en dessus
ou en dessous des 5 MW et on aura certainement l'occasion d'y revenir lors du débat en commission.