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Les statistiques relatives aux exportations ...
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Question orale de Monsieur le Député Philippe FONTAINE à Monsieur Serge KUBLA, ministre
de l'Economie, des PME, de la Recherche et des Technologies nouvelles, sur:
« Le caractère biaisé des données statistiques relatives aux exportations wallonnes»
Chacun sait l'importance accordée par mon groupe à l'évolution du commerce extérieur de la
Wallonie.
Pour une économie comme celle de notre région l'importance des marchés extérieurs n'est pas
contestable, ni contestée.
A ce propos, je rappellerai l'objectif ambitieux fixé par le Contrat d'Avenir d'atteindre une
croissance annuelle des exportations de 10% en moyenne, tout en veillant à diversifier le
positionnement géographique de celles-ci.
La récente publication des chiffres définitifs 2001 en matière d'exportation est l'occasion de
se féliciter des progrès enregistrés en ce domaine.
Bien sûr la difficile conjoncture économique mondiale - et notamment les difficultés dans le
secteur sidérurgique - n'a pas permis en 2001 une croissance comparable à celle,
exceptionnelle, de 2000.
Cependant, on soulignera que pour les années 2000 et 2001, le pari des 10% de croissance
moyenne a été atteint, et a même été dépassé avec une croissance de +12.1 %.
A ce propos, on constatera avec intérêt que le rythme moyen de croissance des exportations
wallonnes sur ces deux années est supérieur à celui de la Flandre, mais aussi à celui des
trois principaux partenaires commerciaux étrangers: la France, l'Allemagne et les Pays-Bas.
La Wallonie fait donc montre d'une résistance aux soubresauts économiques qu'on ne lui
connaissait plus depuis longtemps, et nous ne pouvons que nous en féliciter.
Mais selon moi, les principaux motifs de satisfaction résident dans la plus grande
diversification sectorielle des exportations wallonnes (dès lors moins dépendantes des
fluctuations cycliques des produits sidérurgiques notamment) et dans la hausse importante des
exportations « hors Union Européenne » qui ont crû de 12.5% en 2001 et représentent aujourd'hui
20% du total des exportations wallonnes - contre 16.8% en 1999.
Ces évolutions sont la preuve d'une évolution structurelle positive de notre économie.
Elles prouvent que le travail du gouvernement, dont le degré de satisfaction des entreprises
vis-à-vis de l'Awex est révélateur à cet égard, portent ses fruits.
Si les chiffres du premier trimestre 2002 publiés récemment sont certes moins bons, il ne faut
pas perdre de vue que cette situation résulte de facteurs exogènes et principalement de
l'atonie des exportations intra-européennes.
En tout état de cause, il convient d'attendre les prochaines données statistiques de la BNB
afin de se faire une idée plus précise pour l'année 2002.
Ma question portera justement et précisément sur ces données statistiques et leur relative
exactitude.
En effet, la presse s'est fait l'écho d'une remarque de la BNB à propos du caractère biaisé
des chiffres à l'exportation flamands.
Ainsi, il apparaîtrait qu'une nouvelle activité dans le secteur pharmaceutique gonflerait
artificiellement les exportations flamandes de 4 milliards d'euros grâce à des produits qui
ne font que transiter à Zaventem, dans le Brabant flamand et sont pourtant comptabilisés comme
exportations de la Région flamande.
Ce phénomène de prise en compte du lieu de transit et non du lieu de production est
communément appelé « l'effet de porte » et a pour effet de biaiser les données statistiques,
souvent au détriment de notre région.
A cet effet - qui pourrait être comparé à un « quasi-détournement de valeur ajoutée »
(déclaration de M. KUBLA), il me semble qu'on pourrait y ajouter deux autres qui me paraissent
également pervertir la réalité des chiffres
- Tout d'abord, l' « effet de siège », qui fait qu'un bien produit dans une région se voit
attribué à une autre, parce que le siège administratif de l'entreprise s'y trouve.
La région de Bruxelles-Capitale en bénéficierait surtout.
Si ce phénomène est régulièrement corrigé par l'Institut des comptes nationaux, il n'en reste
pas moins qu'une partie des exportations échappe encore à cette correction, encore une fois au
détriment de la Wallonie.
- Ensuite, « l'effet de production » qui a pour origine le fait que l'exportation est
enregistrée sur le site de production du produit fini, sans ventilation de la part des valeurs
ajoutées des stades intermédiaires de production.
Ainsi, des produits semi-finis qui sont livrés en Flandre, puis transformés et exportés par
elle, sont considérés comme des exportations exclusivement flamandes.
Encore une fois, il me semble que ce comptage pénalise la Wallonie du fait de la non-prise en
compte de la part wallonne de valeur ajoutée.
Ma question sera donc la suivante
• Une neutralisation des opérations de transit qui faussent les données à travers
« l'effet de porte » a été annoncée pour les prochains mois.
Tout en vous encourageant à suivre de près l'évolution de ce dossier - ce dont je ne doute pas
- , je désirerais savoir si un échéancier précis a été avancé ?
N'étant pas un spécialiste, pouvez-vous nous indiquer dans les grandes lignes comment se fera
la future méthode de calcul de la BNB ?
Pouvez-vous nous donner une estimation de l'impact d'une telle réforme sur les chiffres
wallons, ou à tout le moins, nous fournir une estimation des exportations wallonnes transitant
par des plate-formes flamandes et comptabilisé dans les chiffres flamands ?
• Qu'en est-il concernant les effets de siège et de production que j'ai mentionnés.
Des corrections statistiques sont-elles envisagées à ce sujet ?
D'après mes estimations et celles de nombreux spécialistes, les chiffres seraient actuellement
favorables à la Flandre et à Bruxelles ?
A quel pourcentage estimez-vous l'impact négatif de ces deux effets ?
Je vous remercie, Monsieur le Ministre, des excellentes réponses que vous ne manquerez pas de
me donner.
Réponse du Ministre Serge KUBLA,
Avant de répondre à votre question plus technique, permettez-moi de présenter les chiffres 2001
et les chiffres du premier semestre 2002.
Après une année exceptionnelle en 2000 où la croissance des exportations pour la Wallonie avait
dépassé celle de la Flandre (21,7 % pour 19,9 %), nous connaissons une année 2001 nettement
moins bonne mais toujours positive, tant en valeur qu'en pourcentage
(30.041 millions d'€ en 2001 contre 29.090 millions d'€ en 2000 et 3,3 d'augmentation par
rapport à 2000).
Nous nous situons malgré tout en dessous de la moyenne nationale (4% d'augmentation), de celle
de la Flandre (4%) et de celle de Bruxelles (3,8%).
C'est l'évolution du quatrième trimestre qui s'est montrée négative (-3,9% par rapport au
quatrième trimestre 2000) alors que l'évolution des 3 trimestres précédents était positive
(+ 10,2 % pour le premier, + 6,4 % pour le second et 0,8 % pour le troisième).
Lorsque l'on aborde les approches sectorielles et géographiques, on peut faire les
constatations suivantes
1) Une part plus importante de la grande exportation dans notre commerce extérieur et, par
conséquent, une plus grande diversification (19,54 % du total des exportations pour 2001 et
augmentation, tant en valeur et en pourcentage (17,94 % en 2000 pour 5.220 millions d'€
et 19,54 % en 2001 pour 5.871 millions d'€) ;
2) Une stagnation en valeur et en pourcentage sur les marchés limitrophes même si, sur
l'Europe des 15, nous progressons ;
3) Trois secteurs occupent une place prépondérante dans nos exportations.
II s'agit des produits des industries chimiques (16 ,99 % du total de nos exportations) ;
des machines et équipements mécaniques, électriques et électroniques (19,19 %) et des métaux
communs et ouvrages en ces métaux (17,11%) ;
4) Ces trois secteurs ont connu des fortunes diverses en 2001 (3,5 d'augmentation pour la
chimie ; 12,4 % pour les machines et - 4,9 % pour les métaux).
La chimie est le seul secteur, tant en volume qu'en pourcentage, qui continue à progresser en
2002 (+3,8%).
La baisse de nos exportations en 2002 s'élève pour l'ensemble du premier trimestre à 6,9%.
Ce chiffre est comparable à l'ensemble de nos voisins (Bruxelles (-9,5%), Pays-Bas (-7,8%),
France (-6,2%) dont le Nord Pas de Calais (-11%).
Seule l'Allemagne (-2,2%) et surtout la Flandre (+4%) font mieux.
D'un point de vue géographique, notre commerce extérieur à la grande exportation continue de
progresser au ter trimestre 2002 (1,3%) avec des hausses significatives en Asie du Sud Est
(+17,1%) et dans une moindre mesure sur l'Asie (+10%), l'Europe de l'Est (5,9%),
l'Afrique (+5,6%) et les Etats-Unis (+1,5%).
Nous perdons cependant des parts de marché sur nos marchés traditionnels
(-8% sur l'Union européenne, -11,5% sur l'Afrique du Nord).
Pour répondre à la question que vous posez, je voudrais d'abord souligner que c'est la BNB qui
établit les statistiques pour l'ensemble de la Belgique.
Par conséquent, l'AWEX ne peut influencer ce processus qu'informellement.
La BNB annonce l'arrivée du nouveau système pour le fin 2003.
La méthodologie suivante sera adoptée.
Afin que les statistiques officielles reflètent correctement le potentiel d'exportation des
firmes wallonnes, l'AWEX a entrepris des négociations avec la Banque Nationale depuis mi-2001
en collaboration avec le Service des Etudes et de la Statistique (SES) de la Région Wallonne.
Suite à de nombreux contacts et réunions, le dossier a progressé très positivement. Nous avons bien fait prendre conscience à la Banque Nationale des problèmes de déformation des statistiques d'exportations régionales liés aux effets de siège et de porte et celle-ci a entrepris des travaux visant à neutraliser leur impact. Ces travaux s'inscrivent dans le cadre d'un vaste programme d'amélioration de la qualité des statistiques du commerce extérieur. Voici les deux plus importants changements qui seront apportés aux statistiques du commerce extérieur
1 - La Banque Nationale introduira progressivement une comptabilisation des exportations selon
le concept national.
Contrairement au concept communautaire, le concept national se limite aux opérations
d'exportations et d'importations qui résultent d'un transfert de propriété avec les résidents
belges.
Le concept national exclut les mouvements physiques de marchandises d'origine étrangère qui ne
font que transiter sur le territoire belge et pour lesquels les résidents belges
n'interviennent pas.
En d'autres termes, cela signifie que les données d'exportations seront graduellement
expurgées de l'effet de porte international.
Le concept national est déjà appliqué sur les totaux nationaux depuis fin 2001.
Les premiers résultats révèlent que les exportations belges se dégonflent de 15% en 2001
lorsque les mouvements de marchandises attribués aux non-résidents (le transit déguisé)
sont neutralisés.
L'extension du concept national aux données d'exportations régionales se fera normalement de
façon graduelle en 2003 en fonction des ressources disponibles à la Banque Nationale.
2 - La Banque Nationale introduira également une nouvelle méthode de régionalisation des
exportations qui se fera sur base d'informations récoltées dans les déclarations
(Intrastat et Extrastat) et non en fonction des adresses des entreprises déclarantes.
Plus précisément, toutes les entreprises belges qui déclarent des exportations
(environ 25,000) devront répondre dans les formulaires Intrastat et Extrastat à une question
sur l'origine régionale des marchandises qu'elles exportent.
Cette nouvelle méthode de régionalisation favorisera l'élimination progressive des effets de
siège et de porte national des statistiques du commerce extérieur.
En effet, si les entreprises flamandes répondent correctement à la question sur l'origine
régionale de leurs produits exportés, cela signifie que la possibilité de voir attribuer à
la Flandre des exportations de marchandises wallonnes qui ne font qu'y transiter sera
fortement réduite.
La collecte des données d'exportations régionales avec cette méthode de régionalisation est
en cours de développement et, après contrôles et tests, les résultats seront soumis aux
instances régionales pour accord.
Les statistiques comptabilisées avec cette nouvelle méthode seront disponibles mi-2003.
En conclusion, ces développements constituent de bonnes nouvelles pour l'AWEX car les données
d'exportations wallonnes devraient progressivement (vers fin 2003) être expurgées des effets
de siège et de porte.
Cette amélioration de la qualité des données d'exportations permettra aux institutions de la
Région Wallonne et aux opérateurs wallons de soutien au commerce extérieur de disposer de la
meilleure banque d'information possible pour la conception et l'évaluation de la politique
d'exportation de la Wallonie.
On peut raisonnablement chiffrer à 4 % du total des exportations belges la correction en
faveur de la Wallonie.
Ce fait couplé au rattrapage progressif de la Flandre, sur les trois dernières années, par la
seule action régionale est encourageante pour la Wallonie