Parlement wallon

Questions orales

     

 Questions du 11/06/02

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 ARCELOR,  gel des investissements lourds...
Question orale de Monsieur le Député Philippe FONTAINE à Monsieur Serge KUBLA, ministre de l’Economie, des PME, de la Recherche et des Technologies nouvelles, sur
« l’annonce par ARCELOR du gel de ses investissements lourds »


Monsieur le Ministre,
La semaine passée, la presse s'est fait l'écho de la décision d'Arcelor de geler les investissements lourds sur trois de ses quatre sites continentaux pour une période de 18 mois.
Il va sans dire que cette nouvelle n'est pas très agréable pour tout qui, comme la majorité des membres de ce Parlement, s'inquiète de l'avenir de la sidérurgie wallonne et du site de Cockerill en particulier.
A Liège, c'est la construction de la centrale de cogénération (vapeur-électricité), en accord avec Electrabel, qui sera retardée.
Pour ceux qui connaissent bien la situation, cette annonce n'est qu'une - mauvaise -demi-surprise.
En effet, le nouveau groupe a déjà fait part précédemment d'un futur problème de surcapacité à l'horizon 2006 dans le secteur du " chaud " (de la production d'acier au carbone) et de son intention de fermer l'un des trois sites continentaux, moins compétitifs, pour éviter les excédents de production.
Le site de Cockerill est, on le sait, l'un de ceux qui sont menacés de fermeture. Une étude technique est en cours à ce sujet, elle devrait apporter ses conclusions en 2003.
Le directeur de Cockerill voit même dans ce gel une certaine logique, en déclarant que des investissements lourds seraient absurdes dans un tel contexte.
Je me permet toutefois de regretter l'absence de concertation préalable à cette décision unilatérale.
Les syndicats ont d'ailleurs été prévenus par voie de presse. A cet égard, je me réjouis de la demande de convocation par la SOGEPA du comité de concertation et de suivi afin d'obtenir de plus amples explications.
Je crois néanmoins qu'il ne faut pas être alarmiste. Gel des investissements ne signifie pas fermeture.
De plus, comme je l'ai déjà dit lors de ma récente interpellation sur la sidérurgie, les atouts de Cockerill Sambre sont réels, son savoir faire et sa capacité d'adaptation ne sont plus à prouver.
Elle a en outre l'avantage par rapport au autres sites de disposer d'une sidérurgie intégrée.
Il convient donc de prendre cette annonce comme un avertissement ; la menace existe et l'entreprise doit tout faire pour améliorer sa compétitivité.
La bataille du maintien est désormais lancée.
Cette nouvelle ombre qui plane sur l'avenir de Cockerill doit être une incitation à accélérer la mise en œuvre du Plan DELTA, destiné à restaurer la compétitivité de l'entreprise.
Sans la réalisation de celui-ci les chances de sauvegarde seraient maigres.
Nous sommes persuadés que ce Plan est à même de rétablir la rentabilité et d'assurer l'avenir de l'entreprise.
Je crois que le moment n'est pas aux tergiversations et aux rapports de force qui ne sont bénéfiques à personne, et surtout pas aux travailleurs.
Une prise de conscience de toutes les parties en présence est plus que jamais indispensable aujourd'hui.
Je désirerais , Monsieur le Ministre, vous poser deux questions :

· Tout d'abord, je me souviens qu'ARCELOR avait accepté de reprendre tous les engagements liés à Cockerill Sambre concernant les investissements, la localisation et la recherche.
Des pénalités avaient d'ailleurs été prévues en cas de non-respect .
Cette nouvelle décision remet-elle en cause ces engagements ? En particulier, j'aimerais savoir si les autres investissements prévus, tels la construction d'une unité de pointe permettant le développement d'un dépôt métallique sous vide et la réfection du haut fourneau, sont aujourd'hui menacés ? Avez-vous des garanties sérieuses à cet égard ?
· J'aimerais également connaître l'état d'avancement réel du plan DELTA.
En effet, les différentes informations qui nous parviennent sont contradictoires.
Certains prétendent que la mise en œuvre du Plan est en avance sur le calendrier, d'autres, au contraire, stigmatisent son retard. Dès lors, qu'en est-il réellement ?
Réponse du Ministre Serge KUBLA,
Monsieur le Président, Chers collègues...,
Je me rends compte une fois de plus que toute information concernant l'avenir de la sidérurgie wallonne retient immédiatement l'attention des membres du Parlement Wallon.
Ceci est heureux car la sidérurgie reste un des piliers de notre économie, même si celui-ci n'aura plus demain l'importance qu'il avait hier et a actuellement.
La sidérurgie mondiale a connu une crise encore plus profonde que les précédentes au cours des deux dernières années.
Passant outre toutes les règles internationales et notamment, les règles de l'OMC, l'Administration BUSH a encore perturbé un marché mondial qui venait juste d'entrer dans une phase de redressement.
Il est donc normal que dans ce climat d'incertitude les dirigeants d'entreprises sidérurgiques, qui ont quand-même une responsabilité vis à vis de leurs actionnaires, mais aussi une responsabilité vis à vis de l'ensemble du corps social, soient d'une extrême prudence, même si l'évolution des prix s'avère provisoirement favorable.
En ce qui concerne ARCELOR, personne n'ignore que le groupe a été contraint par décision de la Commission européenne de céder à des tiers un certain nombre de ses capacités de finition, notamment dans le domaine du galvanisé.
La cession de ces avals implique naturellement une réduction des possibilités d'écoulement de la production des phases à chaud, et donc une fragilisation de certaines de celles-ci.
La logique économique veut, pour des simples problèmes de coût de transport, que les unités de production à chaud continentales soient plus menacées que les unités maritimes.
En ce qui concerne ARCELOR, cela concerne principalement Bremen, Florange et Liège.
Le seul gros investissement liégeois concerné par la décision d'ARCELOR est la construction de la centrale de co-génération (vapeur - électricité) dont la décision sera postposée de 18 mois.
En ce qui concerne le haut fourneau 6, l'avenant à la convention de partenariat stratégique, qui prévoit la reconstruction de ce haut fourneau, prévoit une décision deux ans avant le 31.12.2006, soit au 31.12.2004.
En cas de non respect de cette clause, une pénalité de l'ordre de 20 millions d'Euros, est prévue en faveur de la SOGEPA.
Je confirme également que le projet expérimental de revêtement sous vide n'est pas concerné par le gel des investissements.
Il suit actuellement son cours conformément à ce qui a été annoncé lors du dernier comité de concertation Cockerill Sambre - Sogepa, à savoir
- fin juin 2002, relecture détaillée du projet ;
- septembre 2002, décision du lieu de l'installation ;
- janvier 2003, lancement des commandes.
D'après les dernières informations recueillies, on s'oriente maintenant vers une installation au départ des lignes existantes.
J'attends des précisions définitives pour la fin de ce mois.
Toujours en ce qui concerne les investissements, la transformation du bassin de Charleroi et notamment de CARLAM en pôle inox du groupe, m'a été confirmée.
Les modalités de la production in situ d'acier inox, seront définies d'ici fin septembre, soit par la construction d'une AOD dans le site d'INDUSTEEL BELGIUM( ex-FAFER), soit par la construction d'une nouvelle aciérie en amont immédiat de CARLAM.
La plupart des intervenants se sont également interrogés sur l'exécution du plan DELTA, qui doit permettre, en concertation avec les organisations syndicales, d'aligner les coûts de production d'une sidérurgie continentale, telle que Liège, sur la sidérurgie maritime.
L'exécution du plan DELTA qui comporte une phase volontariste de responsabilisation, nécessite de nombreuses réunions de concertation.
Contrairement à ce qui a fait à certains moments les titres des journaux, l'exécution de ce plan est en légère avance sur son calendrier initial.
Les phases 1 à 4 ont d'ores et déjà été validées et les phases 5 et 6 sont en cours de discussion et devraient être validées en septembre prochain . D'ores et déjà, 364 personnes ont quitté l'entreprise et 277 autres ont été préavisées, soit au total 641 personnes.
L'accord passé la semaine dernière consiste à dégager les budgets pour accompagner les efforts de réorganisation et la modification des responsabilités de certaines personnes.
Quant aux craintes de Monsieur WESPHAEL, je ne peux les partager.
En effet, le maintien de l'outil sidérurgique en Wallonie, est lié au succès du plan DELTA.
Il est par ailleurs utopique de croire que la sidérurgie de demain sera identique à ce que nous connaissons aujourd'hui.
Il s'agit d'une évolution économique tout à fait normale que le Gouvernement Wallon a anticipée en essayant via le Contrat d'AVENIR et le CAWA, de promouvoir la diversification du tissu économique, notamment en encourageant la création de nouvelles PME.
Il est évident que cette évolution doit se faire par phases aussi lentes que possible et que la transition d'une industrie lourde vers de nouveaux secteurs porteurs, ne peut se faire que d'une manière progressive et accompagnée.
C'est là le devoir et la responsabilité du Gouvernement Wallon.