Réponse du Ministre,
Préambule
II convient de faire remarquer que l'histoire minière wallonne est loin d'être révolue.
En effet, 250 concessions minières (houille, minerais métalliques, etc.) existent toujours sur les 355 résultant du
regroupement des 766 concessions et extensions de concessions primitives octroyées après 1793.
Ces concessions sont des propriétés distinctes de celles de la surface, ne portant que sur
les substances concédées et les ouvrages et travaux créés pour leur exploitation.
Comme toute propriété foncière, elles ont été créées pour une durée illimitée, qui ne prendra fin qu'avec le retrait du
titre minier par le Gouvernement wallon, pour cause de déchéance, de retrait d'office ou de renonciation.
Le retrait ne peut intervenir qu'après sécurisation de la concession aux frais du propriétaire responsable ou, en son
absence, par la Région wallonne (plus de 11.000 puits, sont déjà recensés).
Les concessions retirées retournent à la propriété de surface et non à l'Etat.
Plus de 40 concessions sont aujourd'hui en procédure de renonciation et une quinzaine devrait suivre, a l'initiative de
groupes miniers ou industriels.
Actuellement, 101 concessions de mines de houille existent toujours (54 ont été retirées depuis 1921, sur déchéance ou
renonciation).
Les concessions et leurs ouvrages (puits, galeries, ...) ne peuvent être cédés que sous le couvert d'une procédure
particulière qui limite la cession aux seuls exploitants capables.
Néanmoins, bien que faisant juridiquement partie de la mine, il a toujours été admis par le Gouvernement et le Conseil
d'Etat que les dépendances superficielles de mines, dont les terrils, pouvaient être librement cédées par le
concessionnaire, comme tout bien immobilier ordinaire.
C'est pourquoi, aujourd'hui; la presque totalité des terrils appartient à des particuliers, à des sociétés immobilières ou
industrielles, ou à des collectivités locales.
Ils ont généralement été cédés, avec les installations des charbonnages, dès le début de la liquidation des sociétés
minières.
Recensement des terrils en cours
La Direction générale des ressources naturelles et de l'environnement a pris l'initiative de demander à l'Université de
Mons de procéder à un recensement et à une cartographie des terrils, ainsi qu'à l'établissement d'une banque de données.
Dénombrement des terrils
La question du dénombrement des terrils est délicate.
En effet, un terril est défini comme étant un dépôt, temporaire ou permanent; de matières minérales résultant de l'activité
d'une mine de houille (excédent de roches provenant du creusement des puits et galeries, non utilisées en remblais de fond,
et déchets de triage ou de lavage du charbon en surface).
La législation ne fixe pas de limite inférieure au volume à considérer.
Lors de la première classification des terrils, fixée par l'arrêté de l'Exécutif régional wallon du 5 octobre 1989, on
avait dénombré, officiellement, 354 terrils.
L'arrêté du 16 mars 1995, fixant la seconde classification, en dénombrait 339, suite à la "découverte" de nouveaux terrils,
à l'arasement de certains autres et à la sortie de classification de certains dépôts (paires de charbonnage, remblais
schisteux, ...) qui ne furent plus considérés comme terrils.
Or l'exploitation de la houille sur le territoire de la Région wallonne remonte au moins à la fin du Xllème siècle et il
existe une multitude de petits terrils dans le bassin houiller principal et dans les bassins secondaires.
Leur nombre est actuellement estimé à plus de 1100.
Leur volume varie de quelques mètres cubes à quelques centaines de mètres cubes.
Les terrils classiques, considérés jusqu'ici ont été constitués, quant à eux, pour l'essentiel, après 1840.
Actuellement, d'après l'arrêté du 16 mars 1995, il est recensé 399 terrils en Région wallonne, se répartissant comme suit
(les catégories se référant à la classification :
A, exploitable;
B, inexploitable;
C, intéressant à exploiter moyennant des investigations complémentaires)
Dénombrement des terrils
Nombre de terrils recensés en Région wallonne, d'après la classification et d'après les recherches de terrain.
(Voir tableau)
Si on s'en tient aux gros terrils "classiques" repris dans les deux classifications successives, on constate qu'ils se
trouvent tous le long de l'ancien sillon houiller s'étendant de Quiévrain/Bernissart au Pays de Herve.
Toutefois, à proximité immédiate des terrils classés, on rencontre aussi un certain nombre de petits ou moyens monticules
non recensés.
En outre, certaines régions paraissent ne pas être concernées (nord du bassin de la Haine Bassin de Namur, Bassin
d'Antienne et de Huy, Bassin de Clavier-Bende-Ocquier, Cantons de l'Est, ...), alors qu'on y retrouve quelques centaines
de petits et moyens terrils.
Suite aux recherches de l'Université de Mons et de M. Ir. D. Pacyna, Attaché à la cellule sous-sol de la DGRNE; le nombre
total de terrils, toutes tailles confondues, est déjà porté à plus de 900 et est appelé à encore évoluer au fur et à
mesure des recherches.
La répartition des terrils classés par commune est donné par l'arrêté du 16 mars 1995.
II ne m'a pas semblé utile de fournir la localisation de chaque terril, sous forme d'une liste assez conséquente, dans le
cadre de la présente réponse.
Leur localisation précise, en coordonnées Lambert belge, est disponible auprès de la DGRNE, sur simple demande.
Pourcentage géré par le secteur public et le secteur privé
La question est difficile à aborder, en ce sens que la très grande majorité des terrils ne fait l'objet d'aucune gestion
particulière.
Leurs propriétaires n'y interviennent que comme pour tout autre bien non bâti et non exploité (entretien, fauche, coupe de
bois éventuelle, chasse, ...) ou les laissent sans suivi.
Dans le cas des petits terrils en zone agricole, la "gestion" se résume souvent en un arasement, parfois progressif lors
des labours, parfois plus radical, à l'occasion d'un besoin local en terres de remblais.
On ne peut vraiment parler de gestion que lorsque le terril est exploité, utilisé à des fins récréatives ou classé pour son
intérêt écologique.
II est à noter que l'exploitation d'un terril est parfois un outil de l'assainissement du site charbonnier.
Il n'est pas possible de préciser quels sont les terrils appartenant à des personnes publiques, dans la mesure où mon
administration n'a pas à tenir de telles listes ni à effectuer ces laborieuses et coûteuses recherches auprès de
l'administration du cadastre.
En effet, dès lors où il n'est pas visé par une procédure administrative nécessitant la fourniture de cette information,
un terril n'est qu'une propriété privée ordinaire, simplement gérée par son propriétaire.
Un cas particulier de gestion : la surveillance administrative
II est admis depuis longtemps que les terrils ne dépendant plus d'une mine active ne sont pas surveillés par
l'administration des mines (aujourd'hui Division de la prévention et des autorisations), dans le cadre des dispositions de
l'arrêté royal du 5 mai 1919 portant règlement de police des mines, minières et carrières souterraines.
Néanmoins, un arrêt de la Cour de Cassation du 15 juin 1925 et la jurisprudence minière pouvaient laisser penser que les
terrils dépendant de puits abandonnés, et dont la nature n'avait pas été modifiée, restaient soumis à cette surveillance
(la procédure impose alors à l'Ingénieur divisionnaire des mines, dès qu'il a connaissance qu'une dépendance superficielle
de mine compromet ou est de nature à compromettre la sûreté, la salubrité ou la commodité publique, à faire rapport au
Gouverneur et à lui proposer les mesures d'action.
La députation permanente arrête alors les mesures qu'elle juge nécessaires et, sauf urgence motivée, cet arrêté ne devient
exécutoire qu'après avis du Conseil d'Etat, section d'administration, et approbation du Ministre qui a les mines dans ses
attributions.
L'exécution des mesures imposées sont à la charge du concessionnaire (ou des ayant droit du dernier concessionnaire pour
les mines déchues).
En cas de refus ou d'absence du responsable, les travaux peuvent être exécutés d'office par la Région, qui peut se
retourner contre le responsable).
La question a donc été posée au Conseil d'Etat.
II ressort de son avis du 17 janvier 2000 et de l'interprétation qu'en a fait Me Moërynck, Avocat, à la demande de la DPA,
que les terrils de mines de houille, abandonnés ou non, seraient toujours à considérer comme des dépendances superficielles
de mines.
Seuls auraient été sortis de ce régime les terrils dont la nature, ou la destination, a été changée, soit les terrils
explicitement sortis des dépendances minières par un arrêté royal de 1976 désignant les terrils exploitables dans !e cadre
du RGPT T, ceux faisant l'objet d'un permis de valorisation et ceux ayant reçu une affectation ou une utilisation
particulière.
L'application des dispositions légales poserait de sérieux problèmes, tant de droit que d'exécution, et le Conseil d'Etat
n'a pas répondu, ou pas clairement, aux questions suivantes posées par l'administration.
- que faut-il entendre par "modification de la nature" d'un terril;
- qui, du propriétaire actuel ou du concessionnaire, est le responsable, au sens des lois minières, qui peut être actionné
par l'administration (sachant que les lois minières ne peuvent viser que le seul concessionnaire détenteur du titre minier !);
- y a-t-il solidarité, lors de la prise en charge de l'exécution des travaux, du concessionnaire et du propriétaire ?
Néanmoins, en poussant la réflexion plus loin, la cession libre des dépendances de mines et des terrils laisse penser que,
de ce seul fait, ceux-ci changent de nature et cessent d'être des dépendances de mines pour devenir des biens ordinaires,
échappant ainsi à la police de l'administration.
En effet, alors que des procédures minières rigoureuses de cession de biens ont notamment été mises en place pour vérifier
si l'acquéreur avait bien les capacités techniques et financières d'exploiter la mine et d'en assumer les charges (et que
ces procédures sont en vigueur pour la cession d'ouvrages souterrains isolés tels puits et galeries), et qu'elles
permettent en outre de désigner un responsable connu à actionner pour l'application des règlements de police, jamais leur
application n'a été exigée pour la cession des dépendances superficielles de mines, ce que l'administration ou le Conseil
d'Etat n'aurait pourtant pas manqué de réclamer dans le cadre des milliers de ventes réalisées lors de la liquidation des
sociétés minières.
II y a donc tout lieu de penser qu'en droit et en fait, l'administration n'a plus à surveiller ou à gérer les terrils
n'appartenant plus au concessionnaire de la mine et ne dispose d'ailleurs pas de moyens légaux d'action à l'encontre de
propriétaires ordinaires.
Pour ce qui est des terrils en exploitation, leur surveillance est de la compétence de la Division de la police de
l'environnement.
néanmoins, au terme du réaménagement des lieux, et donc à la caducité du permis, le terril, tout comme les carrières,
redevient une propriétaire ordinaire et la surveillance administrative cesse.
Terrils en exploitation
Les terrils exploités appartiennent à deux catégories
- ceux dont les schistes (noirs) sont valorisés en vue d'en extraire le charbon, en remettant en terril ou en bassin à
schlamms les stériles résultant du lavage, ou en revendant ceux-ci comme remblais;
- ceux dont les schistes, brûlés suite à la combustion spontanée ou accidentelle du terril (schistes rouges), sont exploités
et traités comme matériaux de génie civil (remblais ou concassés).
Certains terrils sont mixtes : les schistes brûlés sont alors soit laissés sur place, soit revendus comme matériaux de
génie civil.
Le contexte de crise énergétique des années 1970-1980, qui avait justifié la mise en place de la réglementation sur la
valorisation des terrils, n'étant plus de mise et les contraintes environnementales et sociales ayant évolué, le nombre de
terrils encore exploités est en régression rapide.
Le tableau suivant reprend la liste des terrils encore en exploitation en octobre 2003.
Par ailleurs, une demande de permis de valorisation du terril Sainte-Marguerite, à La Louvière, a été introduite par la
SPRL Carbonetta en 2003.
Cette société pourrait, en outre, peut-être, introduire une demande pour le terril Saint-Charles, en combustion, à
Charleroi (Rancart), en vue de régler le problème de sécurité que représente l'état du terril.
Terrils exploités en Région wallonne en 2003
( Voir tableau)
Terrils exploitables
L'arrêté du 16 mars 1995 classe 157 terrils en catégorie exploitable, ce qui ne signifie pas qu'ils le soient avec
rentabilité.
Le caractère exploitable, du point de vue énergétique, d'un terril, dépend en effet du contexte économique et technique du
moment.
Par ailleurs, il faut savoir que, dans l'esprit initial qui a présidé à l'élaboration du décret de 1985 sur la valorisation
des terrils, on ne visait que l'activité de valorisation énergétique des terrils charbonneux.
De même, initialement, la classification des terrils visait à déclarer une série de terrils "exploitables", au sens
économique et technique du terme, sur la base d'investigations (sondages, échantillonnages, ...) et à exclure de ceux-ci
une série de terrils à protéger pour leur intérêt environnemental et paysager.
La définition de la "valorisation" d'un terril, au décret de 1985, échappe déjà à ce cadre prédéfini.
L'opération de "valorisation" n'y est en effet même pas définie, mais est remplacée, dans le même article 2 qui l'introduit,
par la définition du terme "exploiter": "extraire, évacuer, éliminer, transformer ou utiliser les matières qui composent
le terril".
Les premières applications de cette législation ont donc conduit à envisager l'exploitation des terrils de tous types
(charbonneux et brûlés) comme une opération de valorisation.
De même, la classification a considéré tous les terrils comme "exploitables" par défaut, sauf ceux répondant aux trois
critères de classification permettant de les ranger en catégorie "inexploitable" (site classé, exploitation impossible
pour des raisons d'aménagement du territoire et d'urbanisme ou de protection de l'environnement).
Cette interprétation du décret a notamment conduit à considérer les "investigations complémentaires", dont devaient faire
l'objet les terrils classés en catégorie C, comme pouvant être la fourniture d'un dossier d'arguments en vue de les faire
classer comme terrils de la catégorie A (alors qu'initialement, ces investigations complémentaires devaient normalement
confirmer le caractère "intéressant à exploiter" du terril, de manière à le faire passer en catégorie B "exploitable" et,
s'il n'était pas "intéressant à exploiter", comme écrit au décret, il ne devenait pas pour autant un terril de catégorie A,
sauf s'il répondait à un des trois critères).
De même, sur la base de cette interprétation, des petits terrils sans le moindre intérêt économique ont été "laissés" en
catégorie B pour permettre, juridiquement, leur arasement éventuel.
On peut considérer que les terrils les plus directement intéressants ont déjà été exploités ou ont été achetés par des
exploitants existants ou potentiels.
Ils constituent leurs réserves pour le futur.
De ce fait, il est aujourd'hui difficile de préciser quels sont les terrils réellement exploitables avec fruit (par exemple,
dans les conditions les plus favorables de crise énergétique qui régnaient dans les années 1980 et au début des années
1990), on peut penser que, sur les 157 classés comme tels, il doit s'en trouver moins d'une cinquantaine.
Quant aux terrils brûlés, leur intérêt est directement lié à la présence de marchés assez proches (du fait du coût du
transport) ou aux besoins de gros consommateurs, comme les grands travaux publics d'infrastructures.
Le Couchant de Mons reste un des derniers marchés traditionnels qui paraît survivre, notamment grâce aux exportations vers
le Nord de la France.
Ce marché est néanmoins directement concurrencé par les concassés et tout-venant de carrières.