Parlement wallon

Questions écrites

     

Questions du 06/03/09

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La maîtrise des projets éoliens ...
Question écrite de Philippe Fontaine, Député wallon, à André Antoine, Ministre du Logement, des Transports et du Développement territorial, concernant :
« La maîtrise des projets éoliens et le manque de vision globale en la matière en Région wallonne »


Monsieur le Ministre,
En réponse aux problèmes climatiques et aux difficultés liées à l’approvisionnement énergétique, la Région wallonne s’inscrit résolument, dans le développement de l’énergie éolienne sur son territoire.

Nous savons que la production d’énergie renouvelable s’inscrit dans un contexte qui doit tenir compte des réalités issues du Protocole de Kyoto notamment, des mesures contraignantes pour les états membres prises par l’Europe et des réalités et législations régionales parfois complexe.

C’est précisément de la manière dont la Région wallonne gère ces contraintes que je veux vous entretenir. Avec l’ambitieux objectif d’augmenter la part des énergies renouvelables dans la consommation totale d’énergie de 20% d’ici à 2020, la Région wallonne prévoit pour atteindre cet objectif d’atteindre la production de 370GWh/an (gigawatt) d’électricité produite à partir d’éolienne installées sur son territoire, ce qui représente quelques 150 turbines pour l’horizon 2010.

La réalisation de cet objectif n’est pas sans conséquences et plonge inévitablement la Région dans des paradoxes qu’elle va devoir gérer par une politique globale et une maîtrise du développement éolien sur l’ensemble du territoire.

Ainsi, l’impact sur nos paysages est bien réel. Soucieuse précisément de protéger, gérer et aménager ses paysages de façon cohérente et déterminer ce qui est souhaitable ou ce qui l’est moins, la Région wallonne a donné son assentiement à la Convention de Florence relative au paysage. De la même manière, de plus en plus d’études semblent démontrer un impact non négligeable pour la faune wallonne et sur l’avifaune en particulier alors que la Région wallonne est engagée au respect de plusieurs conventions en matière de protection de la biodiversité (Convention internationale sur la diversité biologique de Rio en 1992 ; la directive européenne « habitats » de 1992 ; l’Accord Eurobats sur la protection des chauves-souris en 1994 ou la résolution du conseil européen des ministres de l’environnement obligeant de mettre fin à l’érosion de la biodiversité de juin 2004)

Par ailleurs, certaines communes se voient « échapper » à tout projet d’implantation d’éoliennes alors que d’autres voient leur parc à peine construit déjà faire l’objet d’un projet d’extension comme c’est le cas en ce moment pour les communes de Beaumont, de Ciney, de Perwez, etc.

A la lecture du rapport du Conseil Wallon de l’Environnement pour le Développement Durable publié fin 2008, il y a lieu de se demander si la Région wallonne maîtrise bien la flambée des projets en cours et si elle a une vision globale de l’éolien sur son territoire.

En effet, parmi les recommandations formulées par le CWEDD figurent une demande de mener une réflexion globale au niveau régional en amont des projets. Le CWEDD semble dire que les zones de potentiel éolien sont mal définies parce qu’elles n’intègrent pas les contraintes et opportunités sociales, environnementales et économiques. Le CWEDD souligne également la nécessité d’actualiser le cadre de référence pour l’implantation d’éoliennes en Région wallonne. Un cadre cohérent qui tient à la fois compte de la qualité des paysages et des objectifs de développement éolien doit être mis en place pour éviter, comme cela semble le cas, de voir s’implanter des parcs éoliens au cœur de paysages classés.

En ce qui concerne la cohabitation entre l’éolien et la biodiversité, le CWEDD fait remarquer que les études préalables sur l’avifaune et les chiroptères dans les zones susceptibles d’accueillir un parc éolien font défaut ou ne sont pas menées sur une période assez longue.

Il semble que ce qui apparaît comme une relative cacophonie soit essentiellement due à un manque de volonté politique, en tout cas selon certains professeurs d’université qui se sont penchés sur le problème. L’un d’entre eux déclarait dans la presse que « seul un projet d’éoliennes sur dix est mis en œuvre. Le reste est bloqué, parce que les projets ne reçoivent pas d’autorisation ou parce que des comités d’action protestent. »

Mes questions sont les suivantes Monsieur le Ministre :

- Le cadre de référence pour l’implantation des éoliennes en Région wallonne a été adopté par la Gouvernement wallon en 2002. Ce cadre n’a pas fait l’objet d’une nécessaire actualisation et certains points sont totalement obsolètes et posent dès lors des difficultés d’application. Le cadre de référence a-t-il fait l’objet d’actualisations ? Lesquelles ? Si non pourquoi ?

- Où en êtes-vous dans l’élaboration d’une cartographie des zones autorisées en matière d’implantation éolienne ?
- Est-il exact que la cartographie utilisée par l ‘administration pour motiver ses avis n’a rien d’officiel ?
- Pourquoi cette cartographie n’est-elle pas accessible au public ?

- Je faisais référence à une certaine anarchie en matière de promotion de projets éoliens. Plusieurs communes sont convoitées par plusieurs promoteurs qui se retrouvent en concurrence sur des bases qui semblent éloignées des vraies préoccupations à prendre en compte. Pouvez-vous m’expliquer comment les autorités compétentes font un choix dans les situations de concurrence entre projets éoliens ?
- Comment le potentiel éolien d’un projet est-il évalué par rapport à d’autres ?
- Est-il exact que des parcs éoliens se trouvent au cœur de paysages classés ? Lesquels et où ? Comment cela est-il possible ?

- Comment la Région wallonne gère-t-elle l’impact de l’implantation de parcs éoliens et le respect des conventions de Rio et Florence respectivement en matière de respect de la biodiversité et des paysages ?
- Est-il exact que des parcs éoliens ont vu le jour en RW sans étude d’incidence ? Lesquels et pourquoi ?
- Existe-t-il un instrument de mesure de l’incidence des éoliennes sur la faune et l’avifaune en particulier ?
- Combien de projets sont bloqués ? Pourquoi ? Les chiffres d’un projet sur dix qui voit le jour alors que les autres sont bloques faute d’autorisation est-il exact ? Pourquoi ne voient-ils pas le jour ?
Réponse du Ministre André Antoine,
Contrairement à ce que prétend l'honorable Membre, le Cadre de références approuvé par le Gouvernement wallon en 2002 ne pose pas de réels problèmes d'application.
Par nature, le Cadre de références ne peut prendre en considération toutes les données d'un parc éolien.
C'est pourquoi il est parfois jugé insuffisant ou incomplet.
En tout état de cause, le Cadre de références ne remplacera jamais l'étude d'incidences sur l'environnement qui, seule, permet de donner à l'autorité administrative une connaissance parfaite des impacts du projet.

Au demeurant, même si certaines dispositions du Cadre de références peuvent paraître obsolètes, elles sont de, manière générale, mineures. L'administration étudie une proposition d'adaptation du cadre de référence sur base de l'expérience des nombreuses demandes introduites et permis délivrés.

L'approche globale et transversale est une réalité en ce qui concerne l'implantation des projets éoliens. Je réfute donc l'idée d'un développement anarchique des projets éoliens en Région wallonne tant les différentes étapes de procédure à franchir sont parfaitement adéquates pour faire le tri entre les projets qui doivent être retenus et ce qui ne le seront pas. Depuis l'imposition d'une étude d'incidences et l'entrée en vigueur du permis unique, tous les aspects liés à l'aménagement du territoire et à l'environnement sont pris en considération au travers d'un seul dossier.

Si l'idée d'une planification cartographique, sur la base des contraintes environnementales et urbanistiques, a effectivement été abandonnée pour diverses raisons sur lesquelles je ne reviendrai pas, il n'en demeure pas moins que de tels outils cartographiques existent (carte Feltz) et constituent une aide à la prise de décision pour les autorités compétentes. Bien qu'utiles, il convient d'insister sur les limites d'une telle cartographie, la plupart des nuisances ne pouvant être évaluées précisément que lorsque l'implantation exacte des éoliennes est connue, ce qui n'est évidemment possible qu'une fois que le promoteur a précisé son projet.

De plus, une approche individuelle au niveau du traitement des demandes de permis uniques ne signifie nullement que l'interférence éventuelle avec d'autres projets existants n'est pas prise en compte. Dans la plupart des cas, les projets éoliens sont suffisamment éloignés les uns des autres pour que seul leur impact paysager donne lieu à un cumul des nuisances.

Le cumul des nuisances environnementales pour des éoliennes est relativement rare, car l'impact en termes de bruit et d'ombrage stroboscopique est insignifiant à partir d'une distance de 450 mètres.

l'impact sur le paysage et la biodiversité est dûment analysé. Aussi, les Conventions de Rio et de Florence ne sont pas bafouées.

Aucun parc éolien n'a été autorisé en site classé. De par leur hauteur importante, les éoliennes peuvent être visibles en toile de fond d'un paysage classé. Les éoliennes ne sont cependant pas incompatibles avec des paysages de qualité.

A ce jour, on dénombre en Région wallonne:

- 115 éoliennes en fonction réparties sur 26 parcs pour une puissance de 202 MW;
- 96 éoliennes autorisées non encore installées pour une puissance de 242 MW.

Sachant que seuls 10 % des projets éoliens voient le jour, on ne peut se permettre de qualifier d'anarchique le développement éolien. La maîtrise des projets éoliens peut s'effectuer autrement que par l'élaboration d'une cartographie des zones d'implantation d'éoliennes.