Parlement wallon

Questions écrites

     

 Questions du 11/02/02

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 La grenouille taureau ...
Question à Monsieur José HAPPART, Ministre de l’Agriculture et de la Ruralité:
La grenouille taureau


La grenouille taureau, encore appelée Rana catesbeiana, est originaire de Californie.
Une personne en avait ramené en France en 1968, et ce, dans un but d'élevage.
Mais le problème est que cette espèce n'a pratiquement qu'un seul prédateur: la loutre (qui est de plus en plus rare).
Aujourd'hui, ces batraciens ne rencontrent plus de réels prédateurs.
L'introduction de cette espèce exotique est une véritable catastrophe écologique.
En effet, ces grenouilles dévorent tous les autres batraciens, les reptiles, les poussins de poules d'eau et les canetons.
Ce sont de plus des carnivores qui mangent des petits animaux, des poissons, des souris et qui portent atteinte à la faune locale, mais aussi parfois aux espèces protégées.
Ce batracien a une durée de vie de plus ou moins neuf ans, il pèse 2 kilos et mesure entre 40 et 70 centimètres.
Il colonise environ 5 km2 de territoire par an et est un très bon nageur.
Il menace fortement l'écologie de certaines régions de France.
C'est pourquoi, la France a décidé de lancer à la fin de l'hiver une campagne de lutte contre cette espèce devenue plus qu'envahissante.
Elle aurait déjà été remarquée en Italie, en Espagne, au Portugal, en Angleterre et même en Belgique.
Monsieur le Ministre peut-il me préciser si cette espèce est présente sur le territoire wallon et, si c'est le cas, m'exposer quel serait son "plan" d'action pour protéger notre faune indigène ?
Réponse du Ministre HAPPART,
Je souhaite répondre à l'honorable Membre que, sur le territoire wallon, des naturalistes ont noté de manière irrégulière quelques individus isolés de l'espèce grenouille taureau dans la région de Chaumont-Gistoux, mais aucun séjour prolongé ni aucune preuve d'installation d'une population durable n'ont pu être mis en évidence.
En Flandre, toutefois, une population s'est installée dans la région d'Anvers.
Plusieurs directives et conventions internationales prescrivent aux États membres de "contrôler strictement l'introduction des espèces non indigènes
" (article 11, § 2, de la Convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel), de "réglementer l'introduction intentionnelle dans la nature d'espèces non indigènes de manière à ne porter aucun préjudice aux habitats naturels, ni à la faune et à la flore sauvages indigènes et, s'ils le jugent nécessaire, d'interdire une telle introduction" (article 22 de la directive 92/43 sur la protection des habitats), voire même d' "empêcher d'introduire, de contrôler ou d'éradiquer les espèces exotiques qui menacent des écosystèmes, des habitats ou des espèces" (article 8h de la Convention de Rio sur la diversité biologique).
La Région wallonne a traduit ces dispositions légales dans sa législation par l'arrêté du Gouvernement wallon du 29 novembre 1990, remplacé par l'article 5ter du décret relatif à la conservation des sites Natura 2000, ainsi que de la faune et de la flore sauvages, lequel prévoit l' "interdiction d'introduction dans la nature ou dans les parcs à gibier d'espèces animales ou végétales non indigènes, à l'exception des espèces servant à l'agriculture et à la sylviculture".
La grenouille taureau fait bien partie des espèces visées par cette disposition: son introduction dans la nature est donc interdite et on peut raisonnablement interpréter (en l'absence de jurisprudence en la matière) que cette interdiction concerne également les jardins, dans la mesure où les individus lâchés dans des jardins risquent fort probablement, au vu de leur vitesse de progression potentielle, de s'échapper dans la nature.
En outre, l'importation de cette espèce est interdite par un règlement du Conseil de l'Europe et il incombe au Ministère fédéral en charge de l'application du règlement Cites (convention de Washington) de veiller au respect de cette réglementation.
Afin d'éviter une éventuelle installation plus large et plus durable de l'espèce, les interventions à préconiser consistent, premièrement, à assurer un suivi régulier des populations et de nouveaux individus, ce qui se fait dès à présent dans le cadre du suivi de la biodiversité par bioindicateurs- volet herpétofaune -et, ensuite, à éliminer les individus repérés, sur la base d'une collaboration entre les naturalistes dét>enteurs des informations et les agents des services extérieures de la Division de la nature et des forêts mandatés pour intervenir.
Cette collaboration passera nécessairement par une information correcte des partenaires.