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Questions orales

     

 Questions du 13/10/05

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 L’inadéquation entre l’offre de formation et...
Question orale de Philippe Fontaine, Député wallon à Marie Arena, Ministre-Présidente de la Communauté française, concernant:
 « L’inadéquation entre l’offre de formation et les pénuries de candidats dans certaines filières professionnelles »


Madame la Ministre-Présidente,
Pendant les vacances, la presse publiait un dossier qui proposait aux lecteurs un inventaire des « métiers qui manquent de bras ». Il mettait une nouvelle fois en lumière une certaine inadéquation entre l’offre de formation et le manque cruel de candidats dans certaines filières professionnelles.

Alors que certains jeunes se sont demandés pendant toutes leurs vacances dans quelle direction ils allaient bien pouvoir s’engager, des employeurs, dans le même temps se demandaient comment ils allaient bien pourvoir certains postes dont la vacance devient chronique.

Chaque année pourtant, la fédération des sociétés de consultance en interim, Federgon, réalise une enquête
- 485consultants en interim ont participé à cette enquête - qui révèle une série de fonctions dites « critiques »
- parce qu’en manque de candidats - mais qui se retrouvent aussi bien chez le employés que chez les ouvriers. Cette étude n’est pas la seule en la matière et celles menées par l’ONEM, le FOREM ou encore l’ORBEM viennent confirmer ces tendances récurrentes depuis plusieurs années.

De plus le problème est connu depuis longtemps et il semble qu’un des problèmes expliquant cette situation soit le manque de valorisation positive de certains métiers auprès du grand public ainsi que le manque de communication tout court. Cela a notamment pour conséquence que de trop nombreux jeunes s’orientent vers certaines filières où les débouchés sont actuellement peu nombreux par méconnaissance des autres possibilités qui s’offrent à eux.

Ce n’est évidemment pas le seul problème. Souvent, révèle encore l’enquête, et elle n’est pas la première à le faire, il y a un profond décalage entre les attentes des employeurs et la formation des candidats.

Je ne citerai que deux chiffres qui me paraissent illustrer à eux seuls le fond du problème : pour les fonctions d’ouvriers, les causes de la pénurie sont principalement liées à des problèmes qualitatifs dans 64,3% des cas et pour les fonctions d’employés, la tendance est encore plus nette pour les causes qualitatives dans 73,71% des cas.

Mes questions seront les suivantes, Madame la Ministre-Présidente :

Bien que les étudiants doivent pouvoir choisir leur filière indépendamment des possibilités d’emploi, un accès aux informations relatives à ces possibilités d’emploi dans les divers secteurs est-il organisé par la Communauté française à destination des étudiants s’engageant dans l’enseignement professionnel ? Si oui, de quelle manière ? Si non, pourquoi ?

une concertation est-elle mise en place pour mettre face à face les employeurs et les écoles afin de rapprocher les programmes des seconds avec les exigences des premiers ? Quelles dispositions sont prises pour mettre en place cette concertation ? Que serait le rôle de la CCPQ dans un tel processus ?

comptez-vous à l’avenir poursuivre les diverses expériences mises en places par votre prédécesseur en faveur de l’enseignement technique et professionnel : l’organisation de la semaine d’immersion dans l’enseignement de la CF, la mise sur pied de la vitrine des métiers que l’on apprend à l’école et campagnes publicitaires en faveur de l’enseignement technique et professionnel, … ?

Merci des réponses que vous voudrez bien me donner.
Réponse de la Ministre-Présidente Marie Arena,
Il est exact que tant à Bruxelles qu’en Région wallonne, une série de métiers ne trouvent pas candidats.
Dans certains cas, les raisons de cette pénurie sont quantitatives, trop peu de demandeurs d’emploi offrant la qualification requise.

J’ai eu l’occasion de visiter une école supérieure technique en physique nucléaire. Il m’a été confirmé que le nombre d’élèves était en régression dans ce type de filière.

Ce phénomène est compréhensible, si l’on tient compte de la difficulté de telles études, mais il doit nous inciter à travailler sur la remédiation.

En effet, un enfant qui décroche, dès les premières années, sur les mathématiques de base, ne se lancera évidemment pas dans des études en physique nucléaire.

Il ne faut pas attendre que l’enfant soit en sixième primaire pour s’attaquer à son problème de décrochage. La remédiation doit permettre à chaque enfant d’aller le plus loin possible dans son cursus scolaire, mais aussi d’orienter les jeunes vers des filières plus compliquées qui sont, aujourd’hui, désertées.

Une autre raison qui explique l’absence de candidats à certains métiers est le degré de pénibilité de ces derniers.
Dans ce cas-ci, nous ne maîtrisons pas réellement la situation. Nous demandons donc au secteur d’être attentif à cette réalité.
Le manque d’information est un autre élément. Certains métiers sont méconnus des élèves. Une étude menée en France auprès d’enfants âgés de quinze ans montre que ces adolescents, lorsqu’on les interroge sur le métier de leur père ou de leur mère, et sur le métier qu’ils souhaiteraient exercer, répondent en citant les métiers les plus traditionnels – ceux de leurs grands-parents – et disent ignorer le métier de leurs parents.

Aujourd’hui, les adolescents ne se projettent pas dans les métiers de demain, faute d’information. Quelles solutions pouvons-nous envisager ?
D’abord, nous devons faire en sorte que les adolescents disposent d’un bagage suffisamment large qui leur permette de s’orienter le mieux possible, et cela grâce à la remédiation précoce des décrochages scolaires, dès l’école primaire.

Une deuxième mesure consiste à mieux informer les jeunes. Le choix d’une orientation ne doit pas être imposé, mais décidé en parfaite connaissance de cause.

En collaboration avec le FOREM, nous prévoyons de mettre à disposition tant des demandeurs d’emploi que des étudiants une banque de données présentant l’éventail complet des métiers exercés en Région bruxelloise, ainsi que les filières scolaires qui permettent d’y accéder.

Actuellement, il n’existe aucun guide liant métiers, formations et entreprises du secteur. En ce qui concerne le rapprochement entre écoles et entreprises, j’ai demandé aux secteurs professionnels de s’impliquer davantage dans la CCPQ, mais aussi de faire preuve de plus d’exigence et de ne pas se montrer complaisants lorsque le profil d’une formation ne correspond pas au profil exigé.
J’aimerais que ce secteur professionnel soit aussi associé aux évaluations finales. En effet, disposer de profils de formations ne suffit pas ; il faut aussi avoir la garantie que le parcours suivi par un jeune à l’école lui a permis d’acquérir toutes les compétences nécessaires.

Je demande donc au secteur de participer aux épreuves finales, ce qui n’est actuellement pas le cas dans toutes les écoles.
Les stages constituent le troisième moyen de rapprocher les écoles et les entreprises.

Vous savez que nous voulons créer un stage généralisé pour les enseignements technique et professionnel.
Tous les élèves du dernier degré doivent suivre un stage en entreprise de deux à quatre mois.

Ceci sera amélioré grâce au pouvoir fédéral. Nous lui avons demandé de pouvoir renforcer le tutorat. En effet, les entreprises ont du mal à organiser des stages car elles ne disposent pas nécessairement des personnes qui vont accompagner les stagiaires. Nous avons proposé au gouvernement fédéral de financer des tuteurs. C’est donc par ces biais – stage en entreprise, profil garanti, visite médicale et tuteur payés par le pouvoir fédéral – que nous pouvons améliorer le nombre et la qualité des stages en entreprise.

Vous pouvez ainsi constater que nous soutenons la logique de rapprochement entre les entreprises et les écoles, notamment dans le technique et le professionnel. Mais penser que l’école ne propose que les modules de formation garantissant une place sur le marché du travail serait un mauvais calcul.

En effet, les disponibilités d’aujourd’hui ne sont pas celles de demain. Nous devons donc garder une certaine souplesse face à l’augmentation du nombre d’élèves. Les jeunes doivent être informés de manière complète des métiers d’aujourd’hui et de demain.
Philippe Fontaine (MR).
Nous pouvons être d’accord sur les objectifs mais je pense qu’il faut atteindre certains d’entre eux à court terme.
C’est notamment le cas de l’information. Il convient en effet d’éviter que certains jeunes continuent à s’inscrire dans des filières qui ne débouchent sur rien du tout et que certaines sections doivent fermer faute d’inscriptions alors que des emplois sont disponibles dans ce secteur.
Je suis d’accord avec vous pour affirmer que l’école n’a pas pour seul but de fournir une maind’œuvre qualifiée à l’industrie.
Elle doit aussi former les jeunes pour leur permettre de devenir les adultes de demain : c’est la partie la plus importante de son rôle.
Toutefois, il est dommage de constater que certaines entreprises ne trouvent pas les travailleurs dont elles ont besoin et sont obligées, notamment dans le Hainaut, d’aller chercher des travailleurs en France.
D’où le paradoxe : nos hautes écoles sont remplies d’étudiants français alors que nous devons aller chercher, en France, des ouvriers et des employés pour remplir des fonctions qui ne sont donc plus occupées par des personnes formées dans notre enseignement secondaire. C’est quand même dommage.