Réponse de la Ministre Fadila Laanan,
– Ma réponse a été rédigée en concertation avec la ministre-présidente.
Je passerai les éléments positifs et agréables de votre exposé pour en arriver directement à vos questions.
Vous semblez pressé de connaître l’impact des mesures que j’ai prises sur l’économie du livre. Sachez cependant que les bourses aux auteurs et aux illustrateurs, les résidences et les prix sont d’une autre nature. Elles visent à donner aux écrivains une plus grande disponibilité, un plus grand confort d’écriture, la possibilité de produire des oeuvres plus originales et plus abouties.
Les plus-values se situent là, en amont du circuit commercial et non ailleurs. Les premiers labels seront décernés dans les prochains jours. Nous devrons les faire vivre pour qu’ils atteignent l’objectif visé. Néanmoins, les statistiques du marché du livre de langue française en Belgique portant sur l’année 2006 sont sorties récemment et livrent des données intéressantes.
Si notre marché intérieur dépend à 70 % des importations d’ouvrages, essentiellement français, il faut signaler aussi que l’exportation de la production des maisons belges en 2006 était proche de 60 % alors qu’elle n’était que de 57 % en 2001. Une progression de 3 % mérite d’être soulignée. Par ailleurs, la proportion d’achats de livres édités par des maisons belges de langue française est passée de 28 % à 30 % entre 1998 et 2006. C’est également une augmentation.
L’évolution des ventes entre 2005 et 2006 varie selon les catégories éditoriales. Ainsi, les livres scolaires et parascolaires sont en progression de 9,3 %. Les livres de sciences humaines sont largement en hausse, plus de 9 %. Les livres pour la jeunesse sont aussi en hausse, mais dans une moindre mesure, ainsi que les beaux livres et les livres pratiques. La littérature générale et le livre de poche se maintiennent à niveau tandis que les ventes de bandes dessinées diminuent de 3,1 %.
La vente des livres scientifiques et techniques et médicaux diminue de 12,1 %. Les ventes de dictionnaires et encyclopédies sont en baisse de 20,4 %, car ils sont largement remplacés par des documents librement accessibles sur Internet. En 2006, le marché du livre de langue française en Belgique représentait 253 millions d’euros, soit une progression de 0,8 % par rapport à 2005.
Toutefois, le maintien de ce secteur au dessus des marchés du disque et de la vidéo réunis ne suffit pas à rassurer, car on ne peut nier que la part du livre dans le budget des ménages est en diminution. Une autre explication est que les générations actuelles sont moins familiarisées avec la lecture ou l’achat d’ouvrages. J’ai donc raison de revaloriser de manière significative le secteur littérature de jeunesse. Il faut susciter de nouvelles générations de lecteurs, mais aussi de livres.
En effet, l’encre électronique est à nos portes, le livre électronique est une réalité. Les pouvoirs publics ne peuvent laisser passer le train du progrès. Dans ce cadre, j’intensifie mes contacts avec différents niveaux de pouvoir, notamment les Régions, pour imaginer une articulation de nos actions dans le respect des missions de chacun : créer et entreprendre.
Je répondrai ainsi aux déclarations de M. Georges Hoyos sur le renforcement d’une politique concertée en faveur du livre. Mme Arena estime que les propos de M. Fontaine sur les manuels scolaires sont surprenants. Elle ne souhaite pas entrer dans un débat visant à identifier ceux qui ont permis le retour progressif des manuels scolaires.
Le parlement a voté un décret en ce sens en 2006, concrétisant ainsi l’une des dix priorités du Contrat pour l’école. Quoi qu’il en soit, ses propos sur le chiffre d’affaires – en baisse, selon lui – sont incorrects : tous les éditeurs affirment que leur chiffre d’affaires augmente sensiblement d’année en année.
M. Philippe Fontaine (MR). – À l’exception des éditions De Boeck. . .
Mme Fadila Laanan, – En outre, la Communauté française consacre à cet effet, depuis 2006, un budget annuel spécifique de 1,5 million d’euros. L’association des éditeurs de manuels scolaires, reçue dans cette assemblée voici quelques semaines, annonce d’ailleurs que depuis la mise en oeuvre de ce financement public, le chiffre d’affaires de ses membres a augmenté de 12 % par an.
Nous pouvons donc difficilement parler de chute du chiffre d’affaires. Bon nombre de sociétés souhaiteraient enregistrer de tels résultats. Selon moi, si des écoles ont recours aux photocopies, c’est en toute connaissance de cause. Des mécanismes de régulation sont prévus, notamment dans le décret « missions » et dans la politique de retour au manuel scolaire dans les écoles que mène la Communauté française depuis trois ans.
M. Philippe Fontaine (MR). – À vous entendre, tout va bien. Dès lors, pourquoi le groupe De Boeck se plaint-il ? Je n’ai pas inventé les chiffres que je vous ai communiqués. Ils ont été formulés par le patron d’un grand groupe éditorial spécialisé dans le manuel scolaire.
Soit il est incompétent, soit la situation n’est pas aussi rose que vous semblez le dire. Je regrette que Mme Arena ne soit pas venue me dire elle-même qu’elle trouvait ma question surprenante. Il n’y a rien de surprenant à cela puisque c’est ce que l’on pouvait lire dans un journal économique.
Vous me dites qu’ils sont contents des 12 % d’augmentation. Sûrement, mais 12 % par rapport à quoi ? Ce n’est pas difficile quand on part de zéro.
Je vous ai cité les chiffres relatifs à la chute de la vente du manuel scolaire de ces dix dernières années. On parle aujourd’hui d’une hausse de 9,3 ou de 12 % selon les sources. Heureusement, mais ce n’est pas vraiment positif. Je n’ai pas constaté de réelle détermination du gouvernement en matière de promotion . .
Mme Fadila Laanan, – Vous ne pouvez pas dire que le gouvernement dort sur ce dossier puisqu’il a réinstauré l’usage du manuel scolaire. Au contraire. C’est avant que les choses étaient difficiles.
M. Philippe Fontaine (MR). – En tout cas, ce n’est pas assez rapide.
Mme Fadila Laanan, – Il faut toujours beaucoup de temps pour reconstruire ce qui a été détruit par d’autres.
M. Philippe Fontaine (MR). – Ma deuxième remarque concerne les aides octroyées aux auteurs. Vous nous dites que vous travaillez en amont du circuit commercial. Je veux bien, mais un auteur écrit pour être lu. Si c’est pour être lu par lui-même, c’est inquiétant. Je serai toujours aux côtés de ceux qui veulent défendre le livre, mais encore faut-il qu’on le lise. Voilà le problème.